UNIVERSITE DU QUE BEC THESE PRESENTEE A L'UNIVERSITE DU QUE BEC A TROIS-RIVIERES COMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MAITRISE ES ARTS (PHILOSOPHIE) PAR CLAUDETTE MOREAU B. Sp. PHILOSOPHIE PHILOSOPHIE - IDEOLOGIE - SCIENCE CHEZ ALTHUSSER Juill et 1977 Université du Québec à Trois-Rivières Service de la bibliothèque Avertissement L’auteur de ce mémoire ou de cette thèse a autorisé l’Université du Québec à Trois-Rivières à diffuser, à des fins non lucratives, une copie de son mémoire ou de sa thèse. Cette diffusion n’entraîne pas une renonciation de la part de l’auteur à ses droits de propriété intellectuelle, incluant le droit d’auteur, sur ce mémoire ou cette thèse. Notamment, la reproduction ou la publication de la totalité ou d’une partie importante de ce mémoire ou de cette thèse requiert son autorisation. Résumé Phi1osophie-idéologie-science chez Louis Althusser Mémoire présenté à l'Université du Québec à Trois-Rivieres comme exigence partielle de la maîtrise ès arts (philosophie). Depuis une dizaine d'années beaucoup de p~ilosophes et de spécialis- tes en sciences humaines ont analysé des points spécifiques soulevés par la problématique d'Althusser. Pour notre part~ nous avons tenté, dans ces pages, de faire un peu la synthèse des études et recherches d'Althusser sur trois concepts (science- idéologie-philosophie) en suivant, à travers son oeuvre, les aspects importants de la démarche entreprise, en essayant d'y voir l es changements et modifications survenus, pour finalement dégager l'impact et l'importance des travaux de ce philosophe. Pour Althusser; aborder les questions relatives à la science, à • l'idéologie et à la philosophie, dans une perspective marxiste. consiste essen- tiellement à connaître la pratique et le mode de fonctionnement de ces trois champs théoriques, de même que leur articulation. La philosophie s'interroge et remet en question les pratiques scientifiques et idéologiques. A leur tour, ces pratiques modifient la pratique philosophique. C'est justement cette arti- culation que nous avons tenté d'analyser dans ces pages. Claudette Moreau Mars 1977. APprouv~: C~ ~cu~ Claude Pan~ Directeur de la thèse. TABLE DES MATIERES INTRODUCTION p. 'PREMIERE PARTIE: LA PREMIERE VERSION p. 7 1) LA PRATIQUE IDEOLOGIQUE p. 7 1. Fonction pratico-sociale de l'idéologie p. 7 2. Fonction théorique de l'idéologie p. 12 II) LA PRATIQUE THEORIQUE p. 18 l. La pratique théorique: sa spécificité p. 18 2. Le processus de connaissance p. 24 a) Idéalisme-empirisme p. 24 b) Le matérialisme de Marx p. 28 III) LA PRATIQUE SCIENTIFIQUE p. 31 1. Le discours scientifique de Marx p. 31 2. Science et idéologie p. 37 IV) LA PRATIQUE PHILOSOPHIQUE p. 42 1. La philosophie comme analyse des discours p. 42 2. La philosophie et les autres pratiques p. 45 DEUXIEME PARTIE LES MODIFICATIONS ULTERIEURES p. 50 1) LA LUTTE DE CLASSES p. 50 1. Classes sociales et lutte de classes p. 50 2. Lutte de classes dans la théorie p. 55 II) ELEMENTS POUR UNE THEORIE DES IDEOLOGIES p. 60 l. L'idéologie comme système de représentations p. 60 2. L'idéologie comme phénomène de reconnaissance-mécon- p. 64 naissance 3. L'idéologie comme interpellation des individus en p. 67 sujets III) LA MATERIALITE DES IDEOLOGIES p. 71 IV) L'IDEOLOGIE COMME INSTANCE ET COMME DISCOURS p. 77 V) LES NOUVELLES THESES A PROPOS DE LA PHILOSOPHIE p. 84 1. La spécificité de ces nouvel les thèses p. 84 2. Philosophie et lutte de classes p. 94 CONCLUSION p. 98 BIBLIOGRAPHIE p. 104 1 N T R 0 DUC T ION L'Oeuvre d'Althusser, de Pour r~arx (1965) à "Est-il simple d'être marxiste en philosophie" (1975), analyse, interroge, critique les con cepts, les discours, les pratiques sociales, en se plaçant toujours du point de vue des thèses fondamentales de Marx, mais en y incorporant en plus certains concepts de la linguistique et de la psychanalyse. Cette oeuvre qui s'appuie sur la théorie marxiste et y apporte des éléments nouveaux nous a intéressé pour deux raisons. D'abord, nous avons voulu voir en quoi et pourquoi les écrits d'Althusser on pris une telle importance depuis une dizaine d'années autant en Europe occidentale qulau Québec. Nous voulions savoir aussi si son oeuvre apportait vraiment "quel que chose de neuf" ou si ce n'était qui une redite de tous les thèmes mar xistes traditionnels. Nous nous sommes rendus compte qu'il y avait "du neuf". Althusser a reproché à certains théoriciens marxistes et com mentateurs de Marx dl interpréter le marxiste comme un historicisme (c'est-à-dire que 1 'histoire nlest la mise en rapport d'actions hu ~ maines "libres") ou comme un humanisme (le marxisme comme une théorie vi- 2. sant uniquement à l'épanouissement de 1 'homme). Pour Althusser 1 'histori cisme et 1 'humanisme ne pouvaient s'intégrer à la théorie marxiste. De plus, Marx a posé les bases d'une théorie de l'idéologie dans L'Idéologie Allemande. Althusser l'a développé. Marx et Lénine ont parlé de matéria lisme dialectique pour désigner la philosophie marxiste. Ils en ont donné quelques éléments, Althusser les a repris et développés. En cela, il a comblé certaines lacunes de la théorie marxiste. C'était d'ailleurs l'un des buts de son entreprise philosophique et , politique. Dans les années soixante (1960) en Europe, les partis commu nistes et socialistes éprouvèrent de la difficulté à comprendre la situa tion politique, à prendre position. Le régime politique de l'U.R.S.S. ne correspondait plus à ce que l'on attendait d'un régime socialiste. En France, les partis de gauche étaient divisés. Althusser, alors membre ac- tif du Parti Communiste Français, a voulu comprendre, voir clair dans cet- te situation, en connaître le pourquoi et tenter d'apporter des solutions. Ce fut croyons-nous, le but de son entreprise. Malgré les nombreuses critiques qui lui ont été adressées; celle en tre autre d'avoir relégué au second plan la question de la lutte de clas- se, celle qui se passe dans la formation sociale,et d'avoir accordé plus d'importance aux questions théoriques dans ses premières oeuvres, nous croyons que son apport à la théorie marxiste est loin d'être négligeable surtout en ce qui concerne la théorie des idéologies. Evidemment, il reste encore, dans l'oeuvre d'Althusser, beaucoup de points à développer, entre autre, celui portant sur l'articulation entre la lutte de classe dans la théorie et celle qui se passe dans les formations sociales. 3 Et c'est sur des points tel que celui-là que beaucoup de théoriciens mar xistes travaillent actuellement. Dans ce travail, il nous a semblé plus intéressant, pour le mo ment, d'approfondir les thèses althussériennes, de les résumer plutôt que d'en faire une critique. C'est à la triade science-philosophie-idéologie, à leur nature spé cifique et à leur articulation que nous nous intéresserons surtout dans ces pages. Pourquoi Althusser articule-t-il toujours science-philosophie idéologie? Sommairement, nous pouvons dire que pour Althusser, ces trois champs théoriques se recoupent constamment. Il y a, bien sOr, une démar cation conceptuelle très nette entre ces trois champs puisqu'ils ont une spécificité propre qu'une théorie de la philosophie doit définir. En pratique cependant, ces trois champs se recoupent constamment puisqu'ils sont en articulation constante avec les diverses instances de la forma tion sociale et "ce qui s'y passe". Au niveau théorique, cette démarcation conceptuelle suscite quel ques interrogations. A titre d'exemple, lorsqu'Althusser parle de l'ac tivité philosophique comme de" la vigilance théorique qui protège l'ouverture de la science contre la clôture de l'idéologie ... " (1) et soutient par ailleurs que " ... la philosophie est, en dernière instance, le concentré théorigue de la politique ... " (2), voilà deux propositions qui nous ont laissé quelque peu perplexe. (1) Althusser, Louis - Lire le Capital, 1, p. 111, note 4 (2) Althusser, Louis - Réponse à John Lewis, p. 13 4 Nous pouvons expliquer les difficultés de compréhension de ce gen- re chez Althusser en tenant compte du fait suivant: son oeuvre ne consti- tue pas un système clos, fermé, linéaire, à l'abri de tous les change- ments. Il prévient souvent ses lecteurs du fait que ses écrits sont soit des notes pour une recherche "Idéologie et appareils idéologiques d'Etat (notes pour une recherche)", soit une critique de ses oeuvres précédentes (Eléments d'autocritique), soit le début d'un travail qui se poursuivra ul téri eurement. Dans Pour Marx et Lire le Capital, l, II, Althusser aborde sensi blement de la même façon les problématiques de la science, de l'idéologie et de la philosophie, Mais il nous semble y avoir des coupures, des re- tours en arrière, des rejets de certaines notions, des modifications par après. Les plus importantes se retrouvent dans Philosophie et philoso phie spontanée des savants (1967), qui ne fut cependant publié qu'en 1974. Dans l'avertissement de ce livre, Althusser mentionne que: liOn y trouve- ra en effet les premières fomules qui ont "inauguré" un tournant dans nos recherches sur la philosophie en général et la philosophie marxiste en particulier ... " (3). Les développements importants sur la science se retrouvent aussi dans cet ouvrage. Quant à la question de l'idéologie, c'est surtout dans "Idéologie et appareils idéologiques d'Etat (notes pour une recher- che)", paru en 1970, que nous retrouvons les modifications les plus sen- sibles. (3) Althusser, Louis - Philosophie et philosophie spontanée des savants (1967}, p. 8 5 Il ne s'agit pas d'établir une coupure radicale entre les oeuvres d'avant 1967-68 et celles d'après cette date. Car, justement, nous ne pouvons parler d'une coupure au sens où Althusser en pose une entre les oeuvres de jeunesse de Marx et celles de sa maturité. Dans le cas d'Al thusser, nous parlerions plutôt de tournant, selon son expression même. Car les questions fondamentales restent les mêmes, et plusieurs analyses demeurent inchangées des premières aux dernières oeuvres (celle de la cou pure entre le jeune Marx et celui de la maturité par exemple) malgré l'a bandon de certaines notions et de certaines thèses. Ce tournant chez Althusser nous a quand même causé beaucoup de dif ficultés dans la rédaction de ce travail. La plus grande difficulté con cerne l'idéologie. Dans les premières oeuvres, Althusser mentionne cer tains éléments de sa théorie de 1 'idéologie (1 'idéologie comme système de représentation entre autres) mais sans les approdondir. Ce nlest qu'après ce tournant qu'il développera sa théorie de l'idéologie. Cependant, il nous est apparu que la ligne de fond qui parcourt toute 1 loeuvre est 1 lurgence pour Althusser de développer la théorie mar xiste pour aider à la compréhension de la conjoncture sociale et politi que actuelle et faciliter ainsi 1 'action sociale révolutionnaire. Citons à cet effet S. Karsz: "Sans théorie révolutionnaire, pas d'action révo lutionnaire": 1 loeuvre de L. Althusser tourne en fait autour de ce prin cipe décisif de Lénine ... " (4). (4) Karsz, - Théorie et Politique: Louis Althusser, p. 18 Sa~l
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