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119 Pages·2011·2.47 MB·French
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Julia CHIRON Master 2 Lettres, Arts et Pensée Contemporaine Paris VII - Denis Diderot Juin 2008 Introduction Depuis quelques années, la bande dessinée a fortement investi Internet. Si la coexistence du texte et de l'image est un des fondements essentiels du neuvième art, on la retrouve également sur le Web, ce qui explique que l’association de ce médium et de ce support fonctionne aussi bien. La consécration populaire de ce récent instrument de communication a favorisé l’émergence de bien des vocations artistiques. Les blogs de bande dessinée sont aujourd’hui à peu près aussi nombreux que leurs homologues littéraires. Un annuaire1 a même été créé et il en recense près de 650 en France. Tous ne sont cependant pas dignes d’intérêt ou ne sont pas régulièrement mis à jour. Il n’en reste pas moins qu’Internet est devenu, pour certains auteurs en herbe ou confirmés, un outil alternatif de création. Intéressons-nous dans un premier temps à la genèse du médium. L’histoire de la bande dessinée n’a cessé d’évoluer au cours du XXe siècle, et le blog dessiné peut être considéré comme son développement le plus récent. Les récits en images sont connus et 1Disponible sur : http:// annuaireblogbd.com/ 1 pratiqués tout au long de l’histoire de l’art occidental, la Tapisserie de Bayeux en est un bon exemple. Mais la bande dessinée telle que nous la connaissons aujourd’hui possède des caractéristiques qui lui sont propres, et qu’elle a récemment acquises. La bande dessinée est directement héritière de la caricature. Celle-ci existe dès l’époque antique, sur des fresques retrouvées à Pompéi, puis plus tard au Moyen-Âge et à la Renaissance. Cet art prospère au XVIIIe siècle en Angleterre avec des artistes comme Hogarth, Gilleray, Rowlandson. Ils y apportent leur intérêt pour la physiognomonie et y intègrent des phylactères, appelés communément « bulles », afin de donner la parole à leurs personnages. Auparavant, le texte se trouvait placé sous l’image, élément exogène à elle. Les caricaturistes britanniques ont donc été les premiers à faire coexister dans le même espace le texte et l’image. Le phylactère, que d’aucuns considèrent comme un élément constitutif de la bande dessinée (en omettant alors les bandes dessinées muettes, pourtant fort nombreuses), sera de nouveau utilisé par Outcault en 1896 dans The Yellow Kid, puis repris et généralisé en 1925, par Saint- Ogan, auteur de Zig et Puce. En 1830, Rodolphe Töpffer crée ce qu’il appelle des ouvrages de « nature mixte ». Cet enseignant suisse se pose alors en héritier de la caricature et de l’imagerie populaire. Celle-ci était souvent destinée aux enfants (c’est alors une succession de cadres) mais existait également pour les adultes (en une seule image). Elle représentait une histoire déjà connue, issue du folklore populaire, de certains contes et chansons, et, plus rarement, de romans. Le dessin était alors plus illustratif que narratif. L’image narrative est quant à elle « constituée par un ensemble d’éléments et de relations qui présentent un fait, racontent une histoire. Elle se lit comme le compte-rendu d’un fait, comme un récit. Situé dans l’espace et dans le temps, le déroulement de l’action a un sens particulier (…)2.» Rodolphe Töpffer présente la double particularité d’être le premier auteur de bande dessinée ainsi que le premier théoricien de ce médium. C’est en le pratiquant qu’il prend conscience du caractère novateur de ses créations. Il explique très clairement la mixité à l’œuvre dans ses ouvrages : 2 GARNIER, François, Le langage de l’image au Moyen-Âge. Paris : Le Léopard d’or, 1982, p.40. 2 Chacun de ces dessins est accompagné d’une ou deux lignes de texte. Les dessins, sans ce texte, n’auraient qu’une signification obscure ; le texte, sans les dessins, ne signifierait rien. Le tout forme une sorte de roman, d’autant plus original qu’il ne ressemble pas mieux à un roman qu’à autre chose3. Rodolphe Töpffer « maîtrise la planche en tant qu’unité plastique et narrative4», il est le premier à utiliser la page comme un espace créatif. Ses trois innovations principales touchent le support, puisqu’il a inventé l’album autographié, les relations du texte à l’image et des images entre elles, et enfin le contenu narratif, car il a inventé le personnage graphique moderne. Le découpage, la mise en page, la séquentialité, l’usage du multicadre, sont des éléments essentiels du récit dessiné, ils lui donnent une dynamique, un rythme. Il ne faut pas omettre le péri-champ5, que représentent les autres cases de la planche, de la double page. Le péri-champ est un espace à la fois autre et voisin, qui influence la perception. Une case de bande dessinée n’est pas une image solitaire : si on la désolidarise de son ensemble, son caractère narratif et son sens même disparaissent. Le terme de « bande dessinée » apparaît en 1930, mais ce n’est qu’à partir des années 1960 qu’il supplante les termes « récits illustrés », « film dessiné », « comic » et « histoire en images »6. Née quelques décennies avant le cinéma, médium avec lequel on n’aura de cesse de la comparer, elle se distingue des autres supports modernes de récits en images (comme le cinéma donc, mais aussi le roman-photo) « par le fait qu’elle ne mobilise, au stade de la création, aucune technologie particulière7 ». Jusqu’à il y a peu, un crayon, du papier et un sens du récit suffisaient à créer une bande dessinée. Cet art est ouvert à tous. C’est une activité artistique qui séduit bon nombre d’amateurs, par sa simplicité de conception, même si les nouvelles technologies récemment apparues (comme l’ordinateur ou la tablette graphique) ont quelque peu modifié la donne. 3 « Notice sur l'histoire de Mr Jabot » in GROENSTEEN, Thierry, Töpffer : l’invention de la bande dessinée, Hermann, 1994, p. 161. 4 GROENSTEEN, ibid., p. 88. 5 Notion établie par Benoît Peeters. 6 GROENSTEEN, Thierry, op. cit., p. 87. 7 GROENSTEEN, ibid., p.88. 3 La bande dessinée est un discours discontinu, il faut que le lecteur puisse combler les ellipses entre chaque vignettes ; c’est au personnage d’assurer la continuité du récit, comme agent de liaison. Rodolphe Töpffer, le premier, a saisi l’utilité des types et de la physiognomonie pour que le lecteur comprenne au plus vite à qui il a affaire. Certains personnages de bandes dessinées sont restés mythiques, mais longtemps les auteurs sont passés inaperçus, restant dans l’ombre de la renommée de leur héros. Au début, les bandes dessinées sont des œuvres collectives : aux États-Unis, ainsi qu’au Japon, il existe des studios de création. Cette « fragmentation du processus créatif (…) retarda considérablement l’émergence « d’auteurs »8 ». Les auteurs américains, japonais, et même européens, ont longtemps travaillé en équipe, dans des studios. Si beaucoup d’auteurs contemporains collaborent avec des dessinateurs, qui mettent en image les scénarios, certains en revanche produisent leurs œuvres seuls ; on assiste de plus en plus fréquemment à une véritable individualisation de la création de bandes dessinées. Les blogs de bande dessinée, quant à eux, sont généralement le fait d’une seule personne, comme nous le verrons. (Problème de temps, précise) Entre la bande dessinée traditionnelle et celle présente sur Internet s’est développée la bande dessinée multimédia, c’est-à-dire des œuvres préalablement publiées en albums adaptées sur des CD-Rom. Ce phénomène apparaît au début des années 1990 aux États- Unis, et en 1995 en France. Durant quelques années, certaines maisons d’édition, notamment Les Humanoïdes associés, vont exploiter ce nouveau support. Le concept est plaisant, novateur et évident aux yeux des technophiles convaincus : Tout comme le multimédia, la bande dessinée est une écriture discontinue : c'est au lecteur qu'il appartient de jeter les ponts entre les cases, c'est à lui de définir le rythme et le type de parcours. On pourrait donc dire que la bande dessinée est, par son fonctionnement, plus proche du multimédia que ne le sont le cinéma et la télévision9. 8 GABILLIET, Jean-Pierre, Des comics et des hommes : histoire culturelle des comic books aux États- Unis. Nantes : Éditions du Temps, 2005. p. 161. 9 SCHUITEN, François & PEETERS, Benoît, L’aventure des images : de la bande dessinée au multimédia, Paris : Autrement, 1996, p. 169. 4 Un des premiers auteurs à travailler sur une adaptation multimédia d’un album est Enki Bilal. Il réalise en 1995 et 1996 trois CD-Rom de bande dessinée aux Humanoïdes associés : La foire aux immortels (album paru en 1980 dans cette même maison d’édition), La femme piège (publié en 1986) et Froid Equateur (publié en 1992). L’interface des CD-Rom est simple : la bande dessinée apparaît sur un fond noir, case après case. Les dialogues, eux, apparaissent sous l’image, dans leur ordre chronologique. Les bulles sont donc complètement absentes de l’image, qui accède alors à un statut supérieur dans la relation du texte à l’image. Cette dernière domine par sa forte présence les quelques lignes du texte. L’écran permet un rendu visuel de qualité et met parfaitement l’image en valeur. Il faut noter également l’addition de sons, de bruitages et de musique, ainsi que d’éléments exogènes à la bande dessinée qui ravissent les admirateurs : une présentation détaillée des personnages, une interview d’Enki Bilal, des extraits de ses prochains albums en « exclusivité ». Une démarche similaire, mais néanmoins plus aboutie, est celle qui a conduit Art Spiegelman, l’auteur du très célèbre Maus : un survivant raconte, à élaborer un CD- Rom contenant les deux volumes qui composent son œuvre. Son titre explicite, The Complete Maus, contient effectivement, en plus du roman graphique, une introduction dans laquelle le dessinateur expose les raisons de cette adaptation numérique, les étapes de l'élaboration de l'album, les problèmes liés au support numérique pour la présentation des planches. On y trouve aussi une discussion très détaillée avec l’auteur, et surtout des appendices, qui contiennent, entre autres, les précieux enregistrements des entretiens d’Art Spiegelman avec son père, survivant de la Shoah, matériau à l’origine de la bande dessinée. Les concepteurs du CD-Rom ont été toutefois confrontés à des difficultés techniques relatives au passage du format de la page à celle de l’écran. Il y a une vogue des bandes dessinées sur CD-Rom en France entre 1995 et 1998, mais qui est bien vite abandonnée. Ce support permet, c’est son plus grand avantage, d’ajouter à l’œuvre originale un épitexte fort apprécié des lecteurs-spectateurs, mais la conception d’un tel objet est très longue et fastidieuse, puisque elle demande une année de travail et une équipe plus nombreuse que celle nécessaire à la création d’une bande dessinée. Qui plus est, celle-ci est très onéreuse, ce qui se répercute sur le prix de vente 5 du produit, qui ne séduit que peu le public, d’ailleurs relativement hostile au fait de lire sur un écran. Finalement, l’avènement d’Internet, qui, à l’aube du XXIe siècle, offre un terrain d'expérimentation plus économique à la création, met définitivement fin à ce phénomène. Les blogs arrivent donc après cette tentative rapidement avortée d’allier le neuvième art et le numérique. Pour bien comprendre l’ampleur du phénomène des blogs, il faut expliquer le contexte dans lequel ils ont pris place. Le paysage culturel et technologique qui a permis l’émergence d’Internet est complètement nouveau. Il offre de nouvelles perspectives à ses nombreux utilisateurs. Internet a modifié et donné une nouvelle ampleur à nos besoins de discuter, communiquer, convaincre, apprendre et partager. L’apparition des blogs au début du XXIe siècle est un des vecteurs principaux de ce « Web 2.0 » qu’on dit participatif. Ce nouveau moyen d’expression, gratuit, simple d’utilisation, est devenu en quelques années une véritable tribune pour certains internautes, un nouveau domaine de création pour d’autres. En France, en février 2007, il y a 28 millions de personnes qui se connectent régulièrement à Internet, ce qui représente une augmentation de 7% par rapport au premier trimestre de 2006. 12 millions de foyers français ont accès à Internet en novembre 2007, ce qui correspond à 47% des foyers10. Internet est devenu un formidable outil de communication. Par l’immédiateté qui le caractérise, il transforme notre conception de la distance et donc du rapport au temps. « L’éloignement physique perd toute pertinence dans de multiples contextes et l’instantanéité devient la règle (…). Le « où » composante spatiale du « où et quand » indissociable jusque-là de tout événement se délite lorsqu’il s’agit du réseau11.» Depuis quelques années, Internet est également apparu comme une communauté d’information, qui modifie notre relation au savoir. Internet est perçu par certains comme un « déchaînement des possibles (…). D’aucuns ont voulu voir en l’Internet l’incarnation enfin advenue du rhizome deleuzien, (…) d’un système acentré, non hiérarchique et non 10 Statistiques disponible sur : http://www.journaldunet.com/cc/01_internautes/inter_abonne_fr.shtml 11 SANDER, Emmanuel, « Comment Internet change notre façon de penser », in Sciences Humaines, octobre 2007, n°186, p. 44. 6 signifiant (…) où pourrait se déployer une autre forme de sociabilité et de cité12. » Les blogs participent pleinement de cet idéal de démocratisation de la parole et de liberté totale : chacun peut s’y exprimer, donner son avis, laisser sa trace. Internet offre ainsi un terrain de jeu aux potentialités multiples. En 2000, Philippe Lejeune s’intéresse aux premiers blogs intimes et constate déjà que ce support permet « une périodicité instantanée et illimitée (…), une dissémination virtuelle mondiale (…) et une éventuelle interactivité13. » C’est dans cette direction, effectivement, que le médium a évolué. Véritable domaine du partage, il incite à participer, de quelque manière que ce soit. Tout un chacun peut se révéler actif sur le Web, qu’il soit lecteur, « artiste » ou critique, assumant même parfois plusieurs rôles. L’univers numérique semble ouvert à tous, pour peu qu’on y ait accès. En cela, les blogs sont une modernisation de cet espace, favorisant, de manière simple, les pratiques d’échange et de discussion qui ont toujours eu cours dans nos sociétés. C’est finalement la notion de qualité qui devient problématique, car il n’y a pas, à proprement parler, de hiérarchisation qualitative sur Internet. Il faut donc que chacun réévalue sa perception, afin d’être suffisamment critique face à cette déferlante de propos. Il faut aussi changer son mode de lecture : faire des recherches sur les blogs revient à fouiller dans le médium. Un blog ne se feuillette pas comme un livre. Si on reste sur la page d’accueil, on passe vraisemblablement à côté de bien des éléments. Il s’agit donc de « naviguer », de découvrir les différents liens, au risque de perdre le fil. C’est ce qui fait à la fois le charme et la difficulté de l’entreprise. Dans ce monde virtuel qu’est Internet, notre attention est sollicitée simultanément à des endroits différents. Le domaine culturel doit beaucoup à Internet, et plus particulièrement la création artistique. Le net.art14, par exemple, forme de création née avec, pour et par Internet, est 12 SORBIER, Laurent, « Quand la révolution numérique n’est plus virtuelle… », in Esprit, mai 2006, disponible sur : http://www.esprit.presse.fr/review/article.php?code=13258 13 LEJEUNE, Philippe, Cher écran : journal personnel, ordinateur, Internet. Paris : Le Seuil, 2000, p. 193. 14 Terme inventé par Pitz Schultz et repris par l'artiste Vuk Cosic, qui désigne une « œuvre qui n'existerait pas sans Internet, lequel englobe différents protocoles (email, ftp, telnet, listserv, le Web, etc.). Les artistes, le numérique et les réseaux s'y confondent. Les moyens de production sont également les lieux de 7 défini comme un « art en réseau », qui utilise les techniques et spécificités de ce nouveau médium numérique. Le réseau est alors « tour à tour investi comme un atelier en ligne, un lieu d'exposition ou de réflexion, c'est-à-dire, comme un espace simultané de création, de communication et d’implémentation de la pratique artistique15. » L’écran d’ordinateur est pour ces artistes contemporains une plateforme multimodale. Ils l'adaptent pour recevoir leurs œuvres. Sans partager tous les attributs de ce mouvement, les blogs de bande dessinée participent tout de même de cette numérisation de la création artistique à l’œuvre dans notre société. Quels rapports entretiennent la bande dessinée traditionnelle et celle présente sur Internet ? La frontière semble ténue… Après tout, support mis à part, ce phénomène représente-t-il une réelle révolution dans l’histoire du médium ? Beaucoup d’auteurs semblent avoir du mal à s’émanciper des standards de l’édition, cela se remarque surtout au niveau graphique (le style « enfantin », d’inspiration cartoon, alliant les codes graphiques franco-belges et japonais classiques est, par exemple, très présent). Cet attachement à une certaine norme vient peut-être du fait que l’ambition de la plupart des auteurs est d’être édité. Leur blog devient alors une sorte de vitrine d’exposition. Il est plus intéressant de s’arrêter sur les œuvres d'auteurs qui utilisent les spécificités du médium Internet (interactivité, format, techniques) et s’en servent comme un support créatif à part entière. Ainsi, il faut s’interroger sur l’apport d’Internet dans la bande dessinée, sur l’inventivité que cela engendre, sur les modifications des habitudes de création, mais aussi de lecture. Ces démarches artistiques, quelles que soient les ambitions des auteurs, sont caractérisées par la notion d’« œuvres en mouvement » : Les dispositifs hypertextuels dans les réseaux numériques ont déterritorialisé le texte. Ils ont fait émerger un texte sans frontières nettes, sans intériorité définissable (…). Le texte est mis en mouvement, pris dans un flux, diffusion (et inversement). » Définition d’Annick Bureaud, critique d’art, disponible sur : http://fr.wikipedia.org/wiki/Net.art 15 FOURMENTRAUX, Jean-Paul, Art et Internet, Paris : CNRS éditions, 2005, p. 23. 8 vectorisé, métamorphique. Il est ainsi plus proche du mouvement même de la pensée, ou de l'image que nous nous en faisons aujourd'hui16. La production y est toujours en développement, volontairement fragmentaire. Le lecteur est face à une bande dessinée progressive, non figée et qui est susceptible d’être modifiée à tout moment. Les commentaires, généralement autorisés par le blogueur, font partie intégrante de la démarche. Ils permettent à l’auteur de recevoir immédiatement des appréciations de son travail. Le lecteur a quant à lui un accès direct, immédiat, à l’intérieur même du processus de création et il a également la possibilité, via les commentaires, de donner son avis. Nous essaierons dans un premier temps de mettre en lumière la filiation directe qui existe entre la bande dessinée traditionnelle et celle qui existe depuis une quinzaine d’années sur le Web. Il y a plusieurs modes d’existence de la bande dessinée sur Internet. On peut différencier les blogs de bande dessinée (également appelés blogs graphiques, blogs dessinés ou blogs BD) et les bandes dessinées en ligne (webcomics aux États-Unis). Leurs caractéristiques sont différentes : ces dernières représentent un récit entier, avec une chronologie et généralement un début et une fin. Les auteurs de bandes dessinées en ligne font le choix de donner à lire leur production, permettant ainsi au visiteur de passage sur leur site de lire leurs œuvres en ligne dans leur intégralité, souvent contre une contribution financière. Les blogs, gratuits et en libre accès, peuvent, eux, être composés d’éléments divers : anecdotes personnelles, courts récits, gags, illustrations… Certains auteurs conçoivent leur blog comme un journal, ils fournissent (« postent » dans le jargon des blogueurs) presque quotidiennement de nouvelles données (textuelles ou iconiques), souvent d’ordre personnel. Leurs dessins sont parfois mis en ligne comme une simple illustration de leur propos. Il y a alors une symétrie dans le rapport texte-image : l’un enrichit l’autre, mais ne s’en émancipe pas. Dans cette même logique de quotidienneté, quelques-uns conservent l’aspect du journal intime et de l’anecdotique en se mettant parfois directement en scène dans leurs planches de bande dessinée, sans ajouter de commentaire. La frontière n’est cependant pas 16 LEVY, Pierre, « La virtualisation du texte », disponible sur : http://hypermedia.univ- paris8/pierre/virtuel/virt3.htm 9 hermétique : certains auteurs mettent en scène de manière récurrente les mêmes personnages qui peuvent évoluer au fil du temps. Par l’étude de plusieurs blogs choisis pour leur créativité, leur dimension autobiographique ou métadiscursive, nous essaierons d’illustrer ces questions. Puis, il s’agira de comprendre comment et en quoi le médium Internet influence les pratiques des auteurs, dans les formes et procédés narratifs qu’ils emploient, les thématiques qu’ils abordent, leur créativité, etc. Nous nous pencherons ensuite sur le statut de l'auteur, qui n’est pas le même sur Internet que dans l’édition traditionnelle. Ainsi, les amateurs y tiennent une place importante, ou du moins, y sont plus visibles, utilisant le réseau numérique comme tremplin, afin de se faire connaître. Ce constat nous permettra de nous interroger sur les motivations et ambitions de ces auteurs. Internet étant également un domaine où la règne virtualité, nous tenterons de comprendre le rapport qu’entretiennent les blogeurs avec leur propre identité, mais surtout leur rapport aux autres. En effet, présenter une œuvre sur Internet inclue le désir d’être lu et aperçu, à défaut d’être admiré. Il faut alors accorder un moment de réflexion à un acteur décisif de cette reconnaissance : le lecteur du blog. Sans faire une enquête sociologique, nous essaierons d’en dresser un rapide portrait en nous attardant plus précisément sur le processus de lecture, les modifications et habitudes qui accompagnent la lecture sur écran. Enfin, pour clore cet aperçu de la « blogosphère » bande dessinée sur Internet, nous nous pencherons sur les rapports qu’entretiennent les blogs de bande dessinée avec le monde éditorial. Si beaucoup d’auteurs de blogs sont des auteurs aguerris de l’édition traditionnelle, qui utilisent Internet dans une perspective différente de celle de l’amateur en quête de reconnaissance, il n’en reste pas moins que l’édition de blogs de bande dessinée est devenu un véritable phénomène éditorial. Nous nous pencherons sur le cas particulier d’un blogueur, afin de mieux saisir la démarche qui consiste à changer son œuvre de support. Nous essaierons également de comprendre la position et les motivations des éditeurs qui alimentent leurs collections de productions dénichées sur Internet. La question que l’on est en droit de se poser est bien sûr la légitimité (esthétique, culturelle et éditoriale) de ces publications. Pour finir, nous nous 10

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Ogan, auteur de Zig et Puce. En 1830 .. payants. Ce système étant approuvé par le lecteur, les comic books au contenu inédit . Ce témoignage in vivo n'aurait pu être diffusé à une si grande échelle sans Internet et, dans ce
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