UNIVERSITE PARIS-SUD ÉCOLE DOCTORALE : SCIENCES DU VÉGÉTAL Laboratoire d’UMR de Génétique Végétale, Ferme du Moulon, 91190, Gif-sur-Yvette DISCIPLINE : Génétique, epigénétique et gestion des ressources génétique THÈSE DE DOCTORAT soutenue le 27/06/2013 par Abdul Rehman KHAN Short term response of European wheat populations to contrasted agro-climatic conditions: a genetic analysis and first step towards development of epigenetic markers in earliness gene VRN-A1 Directrice de thèse : Isabelle GOLDRINGER Directrice de recherche (INRA, UMR de Génétique Végétale, Gif sur Yvette) Co-directeur de thèse : Clémentine VITTE Charge de recherche (CNRS, UMR de Génétique Végétale, Gif sur Yvette) Co-directeur de thèse : Jérôme ENJALBERT Charge de recherche (INRA, UMR de Génétique Végétale, Gif sur Yvette) Composition du jury : Président du jury : Michel DRON Professeur (Université Paris Sud, Orsay) Rapporteurs : Valeria NEGRI Professeur (Université degli Studi di Perugia, Perugia, Italie) Stéphane MAURY Professeur (Université d'Orléans, Orléans) Examinateurs : Philippe BARRE Ingénieur de recherche (INRA, Lusignan) Evelyne TEOULE Maître de conférences (UPMC, Paris) Membres invités : Clémentine VITTE Charge de recherche (CNRS, UMR de Génétique Végétale, Gif sur Yvette) Abstract Short term response of European wheat populations to contrasting agro-climatic conditions: a genetic analysis and first step towards development of epigenetic markers in earliness gene VRN-A1 Genetic diversity provides the raw material for evolution and adaptation of populations and species. In agrosystems, the within-population genetic diversity is of major importance: on one hand, it can provide a buffering effect against the year-to-year variation of climate or biotic pressures and on the other hand diversity serves as a resource for the population to respond to selective pressures due to specific local conditions, thus allowing for local adaptation, particularly in the case where a population is introduced into a new location. Due to its wide geographic distribution, indicating a high adaptive potential and to its socio- economic value, wheat was chosen as model crop in this study. We focused on flowering time, which is a major adaptive trait that has been involved in wheat adaptation, leading to its ability to grow over a wide range of ecological and climatic conditions. This PhD study was designed to gain insights on the influence of within-population diversity onto the short-term response of populations to contrasting agro-climatic conditions, by studying the genetic, epigenetic and phenotypic variation. But due to the lack of prior existence of epigenetic markers, this thesis study was finally divided into two parts. In the first part, European wheat populations coming from a set of seven farmer varieties and one modern variety, grown in separate plots on seven farms distributed across Europe for three years were studied. These populations were used to study their short term response to contrasting agro-climatic conditions in Europe by analysing their phenotypic and genotypic variations. In the second part, the effect of vernalization on the DNA methylation profile of the VRN-A1 gene was studied in winter wheat as a first step towards the development of epigenetic markers in this gene. Results from the first part of this study revealed that conservation history of these farmer varieties strongly influenced the genetic diversity and fine genetic structure. Ex situ conserved farmer varieties showed low genetic diversity and simpler structure whereas in situ conserved farmer varieties and mixtures revealed higher level of genetic diversity and complex genetic structure. Genetic and phenotypic spatio-temporal differentiation depending upon the level of diversity and structural complexity of the farmer variety was observed. The traditional varieties tend to become more differentiated than the modern variety arguing in favour of the use of diverse traditional (farmer) varieties in organic and low input agriculture systems. Interestingly, a significant phenotypic differentiation for varieties with very low genetic diversity has also been observed in this study, thus indicating that other factors, such as epigenetic variation could possibly play a role in their evolution. The second part of the study revealed that in non-vernalized conditions, VRN-A1 is methylated in its body but not in the 5’ and 3’ ends. Comparison of vernalized and non- vernalized plants led to the identification of a region within intron one that shows significant increase in DNA methylation in response to vernalization treatment. This hypermethylation is positively associated with VRN-A1 expression. Although the role of this DNA methylation shift could not be investigated in the time frame of this PhD and needs further analysis, this study allowed to characterize the changes in the DNA methylation of the VRN-A1 gene in response to cold treatment. This provides new information and sets as the first step towards the identification of possible epialleles in our populations and provides the basis for the development of markers to monitor epigenetic variability in these and other populations. This study at large provides useful knowledge on the understanding of farmers' varieties evolutionary response to be used in the development of different breeding and conservation approaches, taking into consideration the importance of within-population diversity, to satisfactorily address the problems of organic agriculture. Résumé Réponse à court terme de populations de blé européen soumises à des conditions agro- climatique contrastées: analyse génétique et première étape vers le développement de marqueurs épigénétiques dans le gène de précocité de floraison VRN-A1 La diversité génétique est à l’origine de l'évolution et de l'adaptation des populations et des espèces. Dans les agrosystèmes, la diversité génétique intra-population est d'une importance majeure : d'une part, elle peut fournir un effet tampon contre les variations climatiques interannuelles et les stress biotiques, et d'autre part cette diversité peut permettre l’adaptation locale des populations, du fait de leur évolution sous l’effet des pressions sélectives spécifiques aux conditions locales de la région, particulièrement dans le cas d’une introduction dans un nouvel environnement. En raison de son importance socio-économique et de son aire de culture étendue, le blé a été choisi comme espèce modèle dans cette étude, en se focalisant sur l’étude de la précocité de de floraison, un caractère adaptatif majeur qui permet au blé de croître sur une large gamme de conditions écologiques et climatiques. Ce projet de thèse a pour objet l’analyse de l'impact de la diversité intra-population sur la réponse adaptative à court terme de populations soumises à des conditions agro-climatiques contrastées, ce par l'étude des variations génétiques, épigénétiques et phénotypiques. L'absence de marqueurs épigénétiques disponible pendant la thèse a conduit à développer deux études complémentaires. Dans une première partie, sept variétés paysannes (populations conservées à la ferme) et une variété moderne ont été distribuées et cultivées pendant trois ans dans sept fermes localisées dans trois pays d'Europe, puis étudiées pour leur réponse aux différentes conditions agro-climatiques, sous l’angle de leurs variations phénotypiques et génotypiques. Dans une seconde partie, l'effet de la vernalisation sur le profil de méthylation de l'ADN du gène VRN-A1 a été étudié, constituant une première étape vers le développement de marqueurs épigénétiques. Les résultats de la première partie de l'étude ont révélé que l'histoire de la conservation des variétés paysannes a fortement influencé leur diversité génétique et leur structure génétique fine. Les variétés paysannes conservées ex situ montrent une faible diversité génétique, avec une structure génétique simple. Les variétés paysannes et les mélanges conservés in situ révèlent une diversité génétique plus élevée, avec une structure génétique complexe. Une différenciation spatio-temporelle génétique et phénotypique a été observée, en relation avec le niveau de diversité initial et avec la complexité de structure des variétés paysannes. Les variétés traditionnelles se différencient plus nettement que les variétés modernes, ce qui plaide en faveur de utilisation dans des systèmes d'agriculture biologique et à bas intrants. De façon intéressante, une différenciation phénotypique significative a été observée pour les variétés qui présentaient une diversité génétique initiale très faible, ce qui suggère que d’autres facteurs, par example épigénétiques, pourraient intervenir dans les adaptations mises en évidence. La seconde partie de l’étude a permis de mettre en évidence un profil de méthylation intéressant de l’ADN de VRN-A1 : sur plantes non-vernalisées, ce gène présente des niveaux élévés de méthylation dans la partie centrale du gène, mais pas en début et fin de gène. De plus, une partie du premier intron montre une augmentation significative du niveau de méthylation de l'ADN suite au traitement au froid. Ce changement de méthylation est positivement associé au niveau d'expression du gène. Si la compréhension du rôle de cette méthylation sur la régulation de VRN-A1 nécessite des analyses complémentaires, cette étude a permis de caractériser les modifications de méthylation de VRN-A1 en réponse au froid et constitue une première étape vers l’identification de possibles epiallèles dans nos populations et fournit une base à la construction de marqueurs permettant de suivre la variabilité épigénétique dans différentes populations. En conclusion, cette étude apporte des connaissances utiles pour une meilleure compréhension de l’origine et l'évolution de la diversité génétique présente dans les variétés paysannes. Ces connaissances permettront de développer des méthodes de conservation et de sélection à la ferme, en tenant compte de l'importance de la diversité intra- populations, afin de répondre aux contraintes posées par l'agriculture biologique. SYNTHESE EN FRANÇAIS Réponse à court terme de populations de blés européens soumises à des conditions agro- climatique contrastées: analyse génétique et développement de marqueurs épigénétiques dans le gène de précocité de floraisonVRN-A1 La diversité génétique est à l’origine de l'évolution et de l'adaptation des populations et des espèces. Dans les agrosystèmes, la diversité génétique intra-population est d'une importance majeure :d'une part, elle peut fournir un effet tampon contre les variations climatiques interannuelles et les stress biotiques, et d'autre part cette diversité peut permettre l’adaptation locale des populations, du fait de leur évolution sous l’effet des pressions sélectives locales, spécifiques de la région, particulièrement dans le cas d’une introduction dans un nouvel environnement. Par conséquent la conservation de l'agrobiodiversité, en particulier, et de la diversité intra-population plus particulièrement, est essentielle. Deux stratégies de conservation sont utilisées: a) la conservation ex situ et b) la conservation in situ. Dans la conservation ex situ, les plantes ou semences sont conservées hors de leur lieu d'origine. Il s'agit d'une methode statique dans laquelle aucune évolution face aux variations environnementales ne peut se produire. Parce qu’il y a une nécessité de remultiplier régulièrement les semences (la viabilité chute au cours de leur conservation en chambres froides), les faibles effectifs manipulés entraînent généralement une perte de diversité génétique intra-accession. La conservation in situ quand à elle est définie comme la conservation plus large des écosystèmes, au travers du maintien ou du rétablissement de populations viables dans le milieu où se sont développés leurs caractères distinctifs. Pour les plantes cultivées, la conservation in situ correspond plus généralement à la gestion à la ferme, dans laquelle les populations hétérogènes sont cultivées dans les champs des agriculteurs, et où elles évoluent et s'adaptent aux conditions environnementales locales. Par conséquent, il s'agit d'une approche de la conservation dynamique dans laquelle les populations évoluent en permanence en fonction des conditions de l'environnement. Traditionnellement, les agriculteurs avaient pour habitude de maintenir différentes « variétés » sur leur ferme, produisant des semences pour un certain nombre de varietés de pays (landraces), et préservant ainsi la diversité génétique à la ferme. Mais, avec la modernisation et la mécanisation de l'agriculture, au XXe siècle, en particulier dans les pays développés, les agriculteurs ont remplacé les variétés génétiquement diversifiées par des cultivars génétiquement uniformes, à haut potentiel de rendement. Les rendements de ces cultivars dépendent cependant très fortement d’une agriculture intensive, avec de gros apports d’engrais, fongicides et pesticides pour maintenir une production élevée. Mais avec l‘appauvrissent des réserves de combustibles fossiles, et l'augmentation continue des prix des intrants, la durabilité de ce système conventionnel (système agricole moderne) est mise en doute. Sous l’action de différentes initiatives régionales, ou par engagement militant, de plus en plus d’agriculteurs se tournent vers une agriculture bas-intrants, ou une agriculture biologique, plus respectueuse de l’environnement. Cependant, l'absence de programmes de sélection spécialement conçus pour répondre aux besoins de l'agriculture biologique conduit à une maladaptation partielle des variétés élites à de telles réductions d’intrants. En conséquence, les agriculteurs sont de plus en plus intéressés par les anciennes variétés de pays et variétés historiques (premières variétés sélectionnées), qui ont généralement une bonne rusticité, c.à.d. une meilleure stabilité de production en situation de stress biotiques et abiotiques. Lorsque les agriculteurs cherchent à se procurer ces variétés traditionnelles, ils s’adressent généralement aux banques de genes, ou à d’autres agriculteurs, qui pour certains ont continué à cultiver des landraces malgré la modernisation. Lors de ces échanges de semences, les agriculteurs confrontent ces variétés à de nouveaux environnements. Par conséquent, il est important de comprendre les facteurs qui influencent la réponse de ces variétés paysannes à ces nouvelles conditions environnementales. En raison de son importance socio-économique et de son aire de culture étendue, le blé a été choisi comme espèce modèle dans cette étude, en se focalisant sur l’étude de la précocité de de floraison, un caractère adaptatif majeur, qui permet au blé de croître sur une large gamme de conditions écologiques et climatiques. Le travail de thèse avait pour objectif d’appréhender l'influence de la diversité génétique et épigénétique intra-population sur la réponse à court terme des populations soumises à des conditions agro-climatiques contrastées. Mais en raison de l'absence de marqueurs épigénétiques disponible sur le blé au cours de la thèse, cette étude a finalement fait l’objet de deux parties. Dans la première partie, pour étudier l'effet de la structure génétique des populations sur leur réponse à court terme à des conditions environnementales contrastées, certaines populations d'un précédent projet europeen (FSO : Farm Seed Opportunities, FP6) ont été sélectionnées, car elles fournissaient un matériel très adapté pour étudier notre question principale. Ces populations correspondent à sept landraces (populations), maintenues par sept agriculteurs européens, auxquelles s’ajoute une variété moderne de référence en agriculture biologique. Ces 8 variétés ont été cultivées dans sept exploitations agricoles (répartis à travers l'Europe), pendant trois années. Dans ce projet, nous avons caractérisé la diversité phénotypique et génétique au niveau moléculaire des populations initiales, et des populations issues des trois années de culture. Dans un premier temps, et en l'absence d'informations préliminaires sur la structure génétique de la plupart des variétés paysannes, les données moléculaires ont été analysées au moyen d’une analyse discriminante des composantes principales et d’une description des réseaux haplotypiques. Ces analyses ont révélé que l'histoire de la conservation des variétés paysannes a fortement influencé leur diversité génétique et leur structure génétique fine. Les variétés paysannes conservées ex situ montrent une faible diversité génétique, avec une structure génétique simple (1 seul groupe génétique et peu d’haplotypes differents). Les variétés paysannes et les mélanges conservés in situ révèlent une diversité génétique plus élevée, avec une structure génétique complexe. Pour compléter les analyses, les différenciations spatio- temporelles, tant au niveau des marqueurs génétiques que des caractères phénotypiques, ont été étudiées au moyen d’AFC, arbres phylogénétiques, AMOVA, différenciation temporelle par locus et par une étude d'association entre marqueurs et données phénotypiques. L’ensemble de ces résultats montre que la différenciation spatio-temporelle génétique et phénotypique est significative, même après seulement trois années de culture, mais cette différentiation est fortement dépendante du niveau de diversité initiale et de la complexité de structurelle de la variété paysanne. Les variétés traditionnelles se différencient plus nettement que les variétés modernes, ce qui plaide en faveur de leur plus forte utilisation dans des systèmes d'agriculture biologique et à bas intrants. Fait intéressant, une différenciation phénotypique significative a été observée pour les variétés qui présentaient une diversité génétique initiale très faible, ce qui suggère un rôle éventuel de la variation épigénétique dans les adaptations mises en évidence. Dans la deuxième partie, l'effet de vernalisation sur le profil de méthylation de l'ADN du gène VRN-A1 chez le blé d'hiver a été étudié, ce qui constitue une première étape vers le développement de marqueurs épigénétiques dans ce gène. Le gène VRN-1 a été choisi parce que c’est un gène central dans la cascade de régulations de la précocité de floraison, et que c’est un déterminant clé de sensibilité à la vernalisation chez les céréales. Deux génotypes d'hiver, sensibles à la vernalisation, ont été utilisés et les profils de méthylation de l'ADN de plantes non vernalisées et vernalisées ont été comparés en utilisant un traitement au bisulfite ainsi que d’autres techniques fondées sur l’utilisation d’enzymes de restriction sensibles à la méthylation. A partir de ces expériences, nous avons démontré l’existence d’une méthylation d’ADN au sein du gène VRN-A1. Ce gène présente des niveaux de méthylation élévés sur sa partie centrale. En outre, une partie de l'intron 1 montre une augmentation significative de méthylation de l'ADN après vernalisation. Ce changement de méthylation est positivement associé à l'expression du gène. Cette modification de méthylation est stable au cours du développement de la plante (stabilité mitotique), mais elle est réinitialisée dans la descendance. Si la compréhension du rôle de cette methylation sur la régulation génique nécessite des analyses complémentaires, cette étude a permis d’acquérir des informations originales permettant de conduire au développement de marqueurs épigénétiques, qui peuvent être utiles par exemple pour identifier des épiallèles et suivre la variabilité épigénétique de ce gène au sein de populations. En conclusion, cette étude apporte des connaissances utiles pour la meilleure compréhension de l’origine et l'évolution de la diversité génétique présente dans les variétés paysannes. Ces connaissances permettront de développer des méthodes de conservation et de sélection à la ferme, en tenant compte de l'importance de la diversité intra- populations, afin de répondre aux contraintes posées par l'agriculture biologique.
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