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Recherches sur le feu de Saint-Antoine PDF

42 Pages·1776·2.125 MB·French
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260 Mémoires de la Société Royale R E C H E R C H E S S U R LE FEU SAINT-ANTOINE. Par MM. de Jussieu, Paulet, Saillant & l’Abbé T essier. Lu le 31 de- L a maladie qui fait l’objet de nos recherches, a été si cembre 1776. remarquable en France dans les Xe, XIe & XIIe siècles de l’ère chrétienne, par les ravages qu’elle y a faits & par les fondations pieuses auxquelles elle a donné lieu ; les différent récits qu’on nous a laissés de ses effets, font si peu conformes entre eux; il y a tant de confusion dans l’histoire: des ma- ladies qui ont quelque ressemblance avec, le feu Saint-An­ toine ; enfin les notions qu’on a sur cette maladie, sont si peu- exactes, que la Société Royale de Médecine a pensé qu’un travail fait sur cette matière , & qui auroit principalement pour but de fixer les vrais caractères de cette maladie; de faire connoître les sources où il en est fait mention ,ainis que les circonftances dans lesquelles elle a paru, pourroit être utile. Elle a cru que ce travail pouvoit servir non-seulement pour conduire à la découverte des causes de cette maladie, & pour éclaircir plusieurs points de l’histoire de notre nation, mais qu’il étoit absolument nécessaire pour celle des maladies épidémiques, dont elle s’occupe éssentiellement. En consé-. quence elle a desiré que nous nous occupions spécialement de cet objet. Pour répondre} autant qu’il est en nous , à l’intention de la Société & pour remplir ses vûes, nous avons cru qu’il étoit nécessaire de rapprocher les différentes maladies qui ont le plus de rapport avec celle-ci, & dont on trouve des traces. dans l’histoire, dans les écrits de médecine & ailleurs, afin qu’au moyen d’un tableau de comparaison, on pût plus aisé- ment en distinguer les traits & en établir les différences. d e M é d e c i n e ; *<5i L’ordre chronologique nous a paru le plus commode : nous le fuivrons depuis le Xe fiècle jufqu’à celui-ci, en rapportant tout ce qui eft relatif ou analogue au feu Saint-Antoine» Le plus ancien monument que nous connoiilions de lès effets fenfibles, efl: la chronique de Frodoard fur. l’année 545 DO- C’eft là la principale fource ou Belleforeft,.Sauvai, &c. ont puifé ce qu’ils rapportent de cet événement, qui fut très-remarquable à Paris par les circonfiances dont il fut accompagné. Voici de quelle manière Sauvai l’a rendu dan? Antiquités de Paris ( liv. X. ). ' . - « Quantité de monde, tant à Paris qu’aux environs, périt. » d’une maladie appellée le feu facré, ou les ardens. Ce mal *> les.brûloit petit a petit, & enfin les confumoit fans qu’on » y pût remédier. Pour éviter ce mal ou en guérir, ceux de » Paris quittoient la ville pour prendre l’air des champs, 6c » ceux de la campagne fe réfugioient dans Paris. Hugues le » grand fit alors éclater fa charité, en nourrilfant tous les » pauvres malades, quoique par fois il s’en trouvât plus de » fix cents.. Comme tous les remèdes ne fervoierit de'rien , » on eut recours à la Vierge, dans l’églife Notre-Dame, » qui dans cette occafion fervit long-temps d’hôpital ». , Les auteurs ne font d’ailleurs mention-d’aucune circonf- tance particulière relative aux alimens, à l’air, ou aux eaux. On fait feulement que cela arriva dans le temps que'ce Hugues, comte de Paris, faifoit la guerre à Louis d’Ou- tremer, & après les couriès des Normands , qui avoient plufieurs fois pillé ôc facc'agé le territoire de Paris. C’eft à la même, époque que Félibien, auteur d’une chronique de ce temps, rapporte, une ancienne charte de [u] Anno 94$ ip pago Parifienfi nec- Mariæ fanatifuut; adcô ut quotquot illcr non per divifos circumquâque pagos di- pervenire potuerint, aflcrant ab hâc pefte vetfa membra jgnis plagâ pervaduntur, falvati; quos Hugo quoque dux ftipen- r que fenfim exufta confumebàntur, diis aluît quotidianis. Horum djlm qui­ ec tandem mors finiret fupplicia ; dam vellent ad propria redire, extin&o quorum quîdem nonnulli Sanûorum ifta referrefeunt incendio, regreflîque acÊ poternes evasêre tormenta. plures tamen eccleCam iiberantur. ( Frodoard. Chronir Paiifin! in ecclffià fanûæ Del genitricis cou ad unit. ). ' ' Àdfi M émoirêV dë ïa: S ociété R oyale l’églife de Notre-Dame de Paris , par laquelle on établit qu’on allumeroit fix lampes toutes les nuits devant l’autel de la Vierge, en mémoire de cet événement [£]. Ce paffage de Félibièn joint au premier, prouve qu’on appellâ d’abord ce mal ignisplaga} ignis facer. ■ Rodolphe [c] dit ( dans Ton livre de inceriÉiis) qu’en 993 il régnoit une mortalité parmi les hommes : cétoit, dit-il, un feu caché, ignis occultas, qui, dès qu’il avoit atteint quelque membre, le détachoit du corps après l’avoir brûlé. Plufieurs éprouvèrent l’effet de ce feu dans l’elpace d’une huit. ' ............' ' ' J En 994 on obferva une maladie qui emporta en peu de jours dans l’Aquitaine, le Périgord, l’AngoumoisôcleLi- moufin, plus de quarante mille perfonnes. Mézeray., qui rapporte le fait (dans fon Abrégé chronologique), dit que « c’étoit le feu facré, ou mal des ardens, qui avoit fait » une autre fois de grands ravages; qu’il prenoit tout à » coup Ôc brûloit les entraillés, ou quelque partie du corps » qui tomboit par pièces ; bienheureux qui en étoit quitte » pour un bras ou une jambe ! que ce fléau donna lieu à des » fondations d’hôpitaux pour recevoir ceux qui en étoient >> atteints ». Il y à lieu de croire que ce rapport de Mézeray n’eft pas fait avec toute la fidélité Ôc l exa&itude ordinaires à Cet hiftorien, ôc que c’eft ce paffage qui a le plus embarraffé fur la diftinûion à faire entre le mal des ardens & le feu Saint-Antoine, ou feu facré, auxquels on a donné, le même nom. Nous reviendrons fur cet objet important; il nous fuffit de dire qu’Adémar , moine-d’un monaftère d?Arigou* lême & qui vivoit dans le même temps ôc fur les lieux, (iJ’Statututn quod fex lampades -fin- pefGma in hominibus, ignis {cilicet oc­ guliS noftibus, 111 perpetuum in ecclefiâ cultus, qui. qùpdvis rnembrorum arri- Pari'Genfi aidèrent in loco. in quo con- puiflèt, exurcndo tnmcabat à corpore: fueverunc reponl infiïmi morbo qui vo- plèrolque etiam in foatie unius noâis catur ignis facer. ( Chronic. Felib. ann. hujus ignis confumput exuftio. ( Rodul- 94S') phihiflorU , üi. », cap.4 , de incendiis, [ c ]DeCeviebat eodem tempore clades PaS- SS.) DE Al É D E .0:1 N rapporte le même événement dans fa chronique, mais d’une manière différente. ... Il dit que dans ce temps (pp4) le feu de la pefte fe fit pp.^. fentir dans tout le Limoufin ; qu’il y eut un nombre infini de perfonnes de tout fexe. frappées de ce feu quileur bruloit le corps, & que cette pefte ne cèflà qu’aprèsjque; tous .les ivêques d’Aquitaine, affemblés à Limçges, eurent-montré æu peuple le corps de S, Martial Cd]. . On ne peut déterminer fi c’eft la même maladie, ou une dyffenterie que.Lépidànus, moine de Saint-Gai, a voulu oaoj "expliquerd.ans fes poéfies, lorfqu’il dit:; ■ ■ ■ : ;u,qqru d •l : tfutià fe pofl'gelidos ocçulùêré polos f ' ' ';J . rj P;'i: Cdnfèfùïiürqùe lufs fine nomim , çorporçi perdcns, r ' ^ . ,. y^ceribu.sffrvens3inièJîuorçfluens. On trouve un paffage beaucoup plus clair fur la maladie qui fait le lu jet de ce mémoire, dans le même Rodolphe dont il viént;d’être fait mention.' Ce paffage eft cité dans un manufcrit tiré des archives de l’abbaye S. Antoine, qui nous a été communiqué ; mais il y eft attribué à Glaber dans l’année 104.1, au lieu que Rodolphe rapporte la maladie 103p. à l’année 103p. Quoiqu’il en foit, ce dernier auteur dit 1041, qu’une ardeur morcelle fit périr beaucoup de monde parmi les hommes de toutes les claffes, & que quelques uns refi- tèrent privés d’une partie de leurs membres, pour fervir d’exemple à ceux qui viendroient après eux [ e Il attribue tous ces effets à la vengeance divine. ~ Sigebert eft un des auteurs qui ont parlé de la manière là 1 o8p 1^] His temporibus peftilendae ignis favît. ( Ademar Chrori. ann. 994. ) . f CiperLemovicinos exaruc : corpota enim {«] Deindè ccepit defævire divina ultioi *iiornm & mulierum fupri numerum in- Confumplït enim quidera mortifer ardor ▼ ifibili igné depafcebantur..........Lues multos cam de magnatibus qiiàm de me- graviflimabis diebus Lemovicos devora- dioctibusatqueinnraispopuli; quofdam vit, inceudens corpora & exarcendo de- verô truncatis raembrorumparcibus refer- •orans, donec omnes Aquitaniæ epifeo- vavit ad futurum exemplvuâ. ( RodulpfJ pi • Lèmovicx congregati corpus, lânâi C/ironie, ann. 1034. ) Martialis oftenderunt, & mox peftis cef- M émoires de la S ociété R oyaie . moins équivoque de cette maladie. Le paffage de fa chrtv nique où il en fait mention, a été copié par un grand nombre d’hiftoriens. Cet auteur' parle d’une attaque de feu Saint- Antoine qu’on obferva dans la Baffe-Lorraine. Il dit claire­ ment que beaucoup de gens furent frappées de cette ma­ ladie; que les membres, noirs comme du charbon, fe dé- iachoient du:corps, & que les fujets mouroient misérable­ ment, ou traînoient une vie encore plus malheureufe, pff. :vés des pieds ou des mains [/*]. topo. :, Mézeray, qui fans doute a puifé dans d’autres fources; rapporte le même fait, mais à 1 année i opo, & avec quel­ ques circonftances qu’on ne trou ve point dans Sigebert. H dit que «le feu facré, qu’ils nommoient le feu Saint-Antoine, » fe ralluma plus furieufçment que jamais dans la Haute & » Baffe-Lorraine ; qu’on y voyoit par-tout dans les chemins j » les foffés & aux portes des églifçs, des perfonnes ou mou- » rantes, pu'pouffant des çris affreux; d’autres à qui cette r» pefte ardente avoit dévoré les pieds, pu les bras, ou une ;» partie du. vifage ». {Voy. Abrégé' chronoi, ami, 1 opo. ) ' Il y a plufieurs chofes à remarquer dans ce paffage de Mézeray, qui du refte nous paroît avoir utypeu chargé ce tableau. i°. La dénomination àt feu Saint-Antoine donnéç pour la première fois à la maladie : 20. la circonftance de la .mutilation du vifage, dont il n eft pas fait mention dans Si­ gebert, auteur contemporain & fur le rapport duquel pn doit le plus compter ni dans les-autres auteurs de notre connoif- fance : 30. la dénomination depejie que Mézeray donne à la maladie : 40. enfin }a circonftance de la noirceur des. mem­ bres , dont Sigebert à fait mention & que Mézeray n’auroit pas du oublier; ce qui fait préfumer que fon rapport neft point exa£b danstous fes points. j ; >opo. Ce fut à là fin du xie fiècle, c’eft-à-dire, depuis 10fô {/] Annus peftilens. Maxime in.occir I nigre{centibus,autmiferabiliter morimi* dcjicali pacte Lothari»giæ, ubi muiti fa- I tur, aut manibus & pedibus putrefàûis crô igqe interiora comfumewe çompu- j truncati miferabiliori vitac refervantur. juefcentes, exefismembrisinftarcarbonis | .. ..v: jufqu au - • • : d e M é d e c i n e . : ' z6ç jufqu’au commencement du XIIe, qu’oni obferva en France les plus fortes attaques de cette maladie. On fait que c’étoit le temps de la plus grande ferveur pour les croifades ; qu’on abandonnoit tout pour aller fe fignaler dans la Terre-Sainte ; que les guerres civiles continuelles & les courfes des Nor­ mands rendoient la partie feptentrionale & la partie moyenne de la France le théâtre d’une infinité de misères de toute ef- pèce, parmi lefquelles le mal dont il eft queftion étoit peut- être un des moindres. La France fedépéuploit fenfiblement, les champs, l’agriculture étoient abandonnés. L’hiftoire porte qu’en 1096 le pain qu’on avoit fait dans le comté de Namur, & qui étoit cuit, dit-on, fous les cendres, parut d’un rouge, de fang; ce qui poüvoit provenir, ajoute l’hiftorien [g], d’une lotte de faux bled qui rend le pain de cette couleur {ji]. ' Prefque toute la France, le Dauphiné principalement, fe refi fentit de la maladie dont on parle : c’eft ce qui détermina le K Urbain 11 à fonder l’ordre religieux de S. Antoine, dans ie de fecourir ceux qui en étoient atteints, & de choifir Vienne en Dauphiné pour le chef-lieude cet ordre. Cette fon­ dation eut lieu l’an 1 09 3 : vingt- trois ans avant, le corps du 1053. faint de ce nom avoit été tranfporté de Conftantinople en Dauphiné par Joflelin, feigneur de la Mothe-Saint-Didier. Les maifons de cet ordre fervoient d’hofpices ou d’hôpi­ taux aux . pauvres malheureux qui étoient attaqués de cette maladie. Il y en eut. plufieurs en France : l’hiftoire fait men­ tion d’une à Lyon, qu’on appelloit domus contraBoriaf_i\; on trouve dans Rabelais [A] & dans la fatyre Menippée £ / ] qu’on teignoit en rouge, ou couleur de feu, la porte des maifons où étoient renfermés ces malades. .-----^ Un manufcrit tiré des archives de l’abbaye de S. Antoine 1099. de Viennois, porte que fuivant l’abbé Ufpergue ( fur l’an p] Voy. Me^eray fur tan 1096. .[/] Voy.Gallia‘chriftiana,t.4,p. 182. A] On fait qu’il y a une efp'ece le [A] Lir. 2, ch. 30 Pantagruel. meUrnpyrum, qu’on appelle rougeole [/] Art. 8 & les notes de la fatyre dans les campagnes , qui donne une cou­ Menippée. leur rouge au pain. Tome I. L 1 i66 M émoires de la S ociété R oyale 1099)) cette maladie, qui commença en iopp aux envi­ rons de l’églife de Stc Gertrude, étoit telle que lorfqu une partie en étoit atteinte, il y avoit une ardeur & un tourment incomparables, qui ne finiffoient qu’avec la vie,,laquelle étoit quelquefois accompagnée de la perte du membre qui en étoit attaqué Era]. Jufqu ici on n’a vu que des récits vagues fur ce mal : nous avons cru devoir paffer fous filence tous les miracles auxquels il donna lieu, pour nous borner aux faits phy tiques, lesfeuls de notre retfort. On va voir quelques détails plus circonf- tanciés fur une maladie dont les auteurs déjà cités n’avoient ' fait qu’indiquer les ravages, & toujours d’une manière hy­ perbolique. Il exifte un monument qui paffe pour exact, & qui contient une defcription plus détaillée de fes effets. C’eft la chronique d’Hugues de Fleury, une des plus efliméesfur les événemens du xie fiècle[rc]. ' xie Siècle. Cet auteur dit que, dans ce temps, il y eut beaucoup de Ïierfônnes atteintes de ce-mal, qui brûloir les membres ou e corps avec des douleurs intolérables. L’effet de cette ma­ ladie de langueur eft tel, dit-il, que fous une peau livide ellé confume les chairs en les féparant des os , & prenant plus de force avec le temps, caufe une augmentation:de douleur d’ardeur qui font, pour ainfi dire, mourir les malades à chaque inflant. Mais cette mort qu’ils défirent, narrive que [m] Plaga ilia quæ drca excellentem feparans & confümens, & ex morâ tern- fanftæ Gertrudis ecclefiam ortaeft, uf- poris augmentum dolorum & ardoris ca- quc ad vit* delperationem tenuerat.Erat piens, per fingula momenta cogit mife- autem hujuGnodi : taftus quifpiam igné ros mori; fed'defiderantibus mortem ilia învifibili quâcumque corporis parte, non venir, donec. départis artubus ignis tamdiil fenfibili, imô incomparabili tor- ille celer & peftifer invadit membra vi- mento irremediabiliter ardebat, quoufi talia, & quod valdemirum eft, ignis ille qaevel fpiritum cum cruciatu, vel fpiri- fine calore validus, confùmeodos tanto tum cum ipfo tafto membro amitcerct. frigore veîut glaciafi perfiindit mifera- fn] Adverfari* poteftari.concéflum biles, ut nullisremediis poffint calefieri ; erat percuttere multos plagâ invifibili, i ta quod. non min ils eft mirabile, ex quo ità ut femel fuccenfa eorum membra feu divinâ gratiâ. reftinftus fuerit, fùgat» eorporacum intolerabili cruciaw arde- roortali frigore, tantus calor in eiflem- rent. Eft autem morbus hic tabificus fiib partibus «gros invadir, m morbus canctL extensâ liyenti pelle carnem ab offibus. eidem fêrvori perfarpè fefocict. de M é d e c i n e . 267 lorfque ce feu , après avoir ravagé les extrémités , attaque les organes de la vie. Ce qu’il y a de furprenant, c’eft qu’il agit fans chaleur êc qu’il pénètre d’un froid glacial ' ceux qui en font atteints , au point que rien ne peut les > f 'Vùl richauffer : & ce qui eft encore plus étonnant, c’eft qu’à es froid mortel fuccède une fi grande chaleur dans les mômes parties, que les malades y éprouvent de plus tous les accidens d’un cancer. , L’abbaye de Fleury en Normandie conferve encore des preuves des ravages dé cette maladie dans le XIe fiècle. On les trouve dans les a&es de. S. Genulphe, évêque de Cahors. Il èft encore fait mention dans les archives de l’ab­ baye S. Antoine de Viennois, d’un manufcrit tiré d’Utrecht, qui attelle fes effets dans le même fiècle, ainfi que plufieurs miracles opérés en Dauphiné. Mais tous ces récits n’offrent rien de bien fatisfaifant pour, les phyGciens. Il n’en eft pas de même des rapports fuivans. Robert du Mont {Robertus de monte) dans fon Appendix xne Siècle à la chronique de Sigebert, dit qu’en 1 top plufieurs per- nop. founes furent atteintes du feu facré ; que les membres deve- * noient noirs comme du charbon : il ajoute que cette maladie ^ fe faifoit fentir en France depuis cent ans [o]. Nous croyons que cet auteur fe trompe, & qu’il n’a pas eu connoiffance de la première attaque rapportée par tous les auteurs à l’époque de P45.r On trouve dans le recueil de Vincent ( Vîncentius G allas), fur les événemens du x 1 Ie fiècle, un récit de cette maladie qui contient quelques particularités qu’on ne lit point dans les autres auteurs. Celui-ci dit que du temps de Lothaire II, empereur d’Allemagne, il y eut un grand nombre de per- ’ fonnes atteintes du feu facré ; que les extrémités en étoient confumées & tomboient en pourriture, de façon que plu- [o] Multos facto igné accenfos fuiffe-, I affli&abat. ( Appendix Robert, dé monte membrisinftatcarbonum nigtefcentibus, I ad Sigeberlum. ) qui morbus jam à centum annis Galliam J L ia 258 M émoires de la.Société R oyale fleurs en moururent, d’autres en réchappèrent, mais aux dé­ pens de quelque partie, comme des pieds ou des mains, qui furent bridés par l’effet de la maladie; ôc que d’autres éprou­ vèrent de violentes contractions de nerfs \_p ]. . On croyoit généralement dans le xie ôc le xii* fiècles que les malades qu’on conduifoit à l’abbaye S. Antoine, où repofencles cendres de ce faint, étoient guéris dans l’efpace de fept ou neuf jours. Ce bruit généralement répandu en Europe , attiroit à Vienne un grand nombre de malades, dont la plupart y laiffoient quelque membre. On trouve dans l’hiftoire des ordres monaftiques qu’en 1702 on voyoit en­ core dans 'bette abbaye des membres defféchés ôc noirs, qu’on confervoit depuis ce temps [ q~], xne Siècle. La preuve la plus pofitive ôc la plus détaillée que nous connoiffions de 1 exiftence de cette maladie dans ces temps ténébreux, eft celle que nous fournit un auteur delà vie d’Hugues, évêque de Lincoln ( MJ}', de P abbaye S. Antoine). Cet écrivain dit qu’il vit de fon temps.au Mont-Saint-An­ toine en Dauphiné, plufleurs perfonnes de l’un ôc l’autre fexe, de jeunes ôc de vieux, guéris du feu facré ôc qui paroifloient jouir de la meilleure fanté , quoique leurs chairs euffent été en partie brûlées ôc leurs os confumés ; qu’il ac- couroit de toutes parts à cet endroit des malades de cette efpèce, qui fe trou voient tous guéris dansl’efpace de fept jours; que fi au bout de ce temps ils né l’étoientpas, ils mouroient; que la peau, la chair ôc les os des membres . qui avoient été atteints de ce mal, ne fe rétablîffoient ja- x mais, mais que les parties qui avoient été épargnées, ref- toient parfaitement faines avec des cicatrices, fi bien.cônfo- \p1 Vincemius Gallus affirmât Lo- morboperuftismutilareqtur, truncatique • tbarii II‘ temporibus quirn plurimos miferabili vjtæ refeivarentur ; multi quo- mortales dirâ facri ignis tabe fuiflë vexa- que nervorum contraélione diftorti tor- «os : ipfa fiquidem îaero igné hominum querentur, infinitaque multiçudo hâc roembra & artus corriplebantur, açcen- horrendâ per£ècutîone labocarets ( Libr. debantur, nec-non computrefcebant, ità 25 Commcntar. c. 84, ?o, & lib. Ht eâ lue plures.jniferabiliter moreren- [?} Hiftoire des ordres monajiiquts^ tur ; alii veto xoanibus aut pedîbus è toni. 1, pag. J.J7« d e M é d e c i n ë. 269 lidées, qu’on voyoit des gens de tout âge & de tout fexe, les uns privés de l’avant-bras jufquau coude, d’autres de tout le bras jufqu’à l’épaule, enfin d’autres privés d’une jambe, ou de.la jambe & de la cuifle jufqu’à l’aine, jouir de lafanté & de la gaité de ceux qui fe portent le mieux : de làçon qu’il fembloit que les fujets ainfi mutilés étoient dé­ dommagés des pertes qu’ils avoient faites, par la fermeté ôc la vigueur des parties qui reftoient & qui étoient très-propres à retenir les vifcères en place [r]. En 1128 il y eut encore une maladie qui, par fes ra- 1128; vages, fixa l’attention des hiftoriens. Elle fut obfervée dans | le Soiflonnois : les auteurs l’ont défignée fous lè nom de mal / \ des ardens, ou feufacré ,* Dubreuil l’a rapportée fous ce nom à l’année 1130. Lejnartyrologe porte qu’en .1140, fous Louis V 11, « il j 1 » s’éleva à Paris une maladie que les médecins appelaient 1140* » feu facré, prenant les perfonnes aux parties honteufes » ; ^ [/] Vidimus ad montera Antonii ju- depalcerido exederit , rainimè quidera : venes & virgines, fenes cum junioribus reftaurantur, verùm quod mirabihus eft , per fanÛum De» Antonium falvatos ab nudatis oftibus qura truci incendio fuper- igné liera, femiuftis camibus, çonfump- ftierunt, lànitas & lôliditas cicatricibus tifquè oflîbus, variis mutilatos artuum iplis refidui corporis tanta confertur, ut compagibus f ità in dimidiis viventes cor- videas plurimos in omni ratàte & lexu poribus, uc quali viderentur integrâ gau- utroque, brachiis jam ufque ad cubitos, dentes incolumicacc. Concurritur liqui­ aut lacertis ufque ad humeras alTumpcis y dera à totis mundi finibus, â quibufeum- limiliter & tibiis ufque ad genua, vel que laborantibus hoc malo, quo nullum cruribus ulque ad renes aut inguina cxuP deterius, ad hunclocum quô B. Antonii tis fimditùs & abralis, tanquàm fanilîimos. cineres lacratilEmi, tunicl S.Pauliprirni multâ aiactitate pollere. Adeô virtus S- heremitæ adhuc obvotut'i fervantur, qui Antonii perditarum in eis partium dam- . oranes ferè incrà diem feptimum curan- na retentarum firmitate crfmpenût, ' ut • tur. Nam li quis'fub hoc dierum fpatio nec vifeerum tenèritudo intima cum iplis ûnicatem non recipit, corporis colluvio- intcrdùm coftarum obicibus cute Ipolia- ne falubriùs, ut pie prælumitur, morte ta & carnibus, frigoris aut aiterius mo-. intercedente confeftim excedit ,'tantique leftirn injuria de facili pulfctur. Perraa-. patroni fuf&agio quem fide- non fiftâ ex- nentia nimirdm plagarum veftigia prrater petiit, ad perennis vitra folpitatem attin- dolorem venerat veneràtî ad honorera git. Eft autera in iplis miraeufis hocinfig- raedici, & teftimonium morbi cunftis nius miraculura. Igné namque extiuÛo prætendunt infpicientîbus materiam ti­ inmembris patientium,caro & cutis, vel mons nec-non & incitamentum devotio- inus quique quos morbus vorax fenfim nis.(Vk. Hugon. ep-. Lincoln, e. iî>L

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