BANQUE DES MEMOIRES Master de Droit européen des affaires Dirigé par Louis Vogel 2011 Faut-il introduire des class-actions en droit de la concurrence ? Alexandra Sieffert-Xuriguera Sous la direction de Louis Vogel Année Universitaire 2010/2011 Master 2 Droit européen des affaires FAUT-‐IL INTRODUIRE DES CLASS ACTIONS EN DROIT DE LA CONCURRENCE ? Mémoire sous la direction du Professeur Louis Vogel Alexandra Sieffert-‐Xuriguera Faut-‐il introduire des class actions en droit de la concurrence ? RÉSUMÉ La question de l’opportunité de l’introduction des class actions en droit de la concurrence est débattue depuis plusieurs décennies en France. Elle suscite de vifs débats, à la fois quant à sa légitimité et ses modalités de mise en œuvre. Les partisans (associations de consommateurs, avocats, médias, hommes politiques) et les opposants (entreprises, représentants des entreprises) se fondent sur des arguments juridiques, économiques et sociaux. Les arguments des deux camps sont justes, si bien que la situation semble paralysée, tabou. Ainsi, depuis vingt-‐cinq ans, de nombreux projets visant à l’introduction de l’action de groupe ont vu le jour, mais aucun n’a aboutit. Des actions visant à protéger l’intérêt collectif et pouvant être exercées par les associations de consommateurs ont été introduites pour pallier la non existence de la class action, tel l’action en représentation conjointe. Mais ces actions apparaissent comme inefficaces et ne respectant pas le droit au procès équitable protégé par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH). La class action, née en Angleterre, a été développée par le droit des Etats-‐Unis. Il apparaît nécessaire d’étudier le fonctionnement de la class action dans les pays de tradition de droit romain ou autrement dit de civil law où elle est déjà implantée. Cela permet de mieux identifier les limites et les intérêts d’une telle action et ainsi l’intérêt qu’il y aurait à l’introduire en droit de la concurrence, tant en France qu’au niveau du droit de l’Union européenne. Dans les pays de common law les pratiques anti-‐concurrentielles peuvent donner lieu à des actions civiles en réparation, soit des private enforcement, par opposition à l’action des autorités de concurrence ou juridictions désignées par le public enforcement. La question de l'opportunité d'actions civiles, qui fait aujourd’hui débat, est marquée par l’insuffisance des sanctions administratives au regard de l’objectif de dissuasion. L’introduction d’une action de groupe permettrait de pallier cette insuffisance. Pourtant ce modèle américain connaît des dérives importantes (quota litis, contingency fees…), mais toute action de groupe ne semble pas condamnée à ces dérives. Les garanties procédurales et autres garde-‐fous pourraient permettre d’éviter ces problèmes connus. Il s’agit en effet d’introduire une action de groupe qui redonne confiance aux consommateurs tout en protégeant les entreprises d’éventuels abus. Il se pourrait que l’année 2012 marque une rupture en la matière, du fait d’un contexte politique renouvelé, suite aux élections présidentielles et législatives, et du fait de l’investissement de la Commission européenne qui s’interroge depuis le livre vert de 2005 sur l’opportunité d’une telle action. Alexandra Sieffert-‐Xuriguera 2 Faut-‐il introduire des class actions en droit de la concurrence ? SOMMAIRE Partie I : Le régime de l’action de groupe : un débat aux enjeux mondiaux ....... 8 Titre 1 : Le droit positif français visant à protéger l’intéret collectif ................................................... 8 Chapitre 1 : Les conditions d’action des associations ..................................................................... 8 Chapitre 2 : Quelles sont les actions et les sanctions possibles .................................................... 12 Titre 2 : les autres systèmes de droit existants possedant la class action ........................................ 19 Chapitre 1 : La class action aux Etats-‐Unis .................................................................................... 19 Chapitre 2 : La class action dans les etats de civil law ................................................................... 23 Partie II : Les limites et les intérêts de l’introduction de l’action de groupe ..... 28 Titre 1 : Les groupes d’intérêts s’opposant a l’introduction de l’action de groupe .......................... 29 Chapitre 1 : Les opposants ............................................................................................................ 29 Chapitre 2 : Les partisans .............................................................................................................. 38 Titre 2 : Qui pourrait impulser l’introduction de l’action de groupe en France ? ............................. 45 Chapitre 1 : Les propositions ......................................................................................................... 45 Chapitre 2 : Enjeux et Écueils de l’introduction de l’action de groupe ......................................... 50 Alexandra Sieffert-‐Xuriguera 3 Faut-‐il introduire des class actions en droit de la concurrence ? INTRODUCTION « Faut-‐il vraiment que rien ne change ? Je ne le pense pas. Le droit est mouvement et la vie n’est dogme figé. Les juristes doivent savoir accompagner les nécessaires évolutions, répondre aux demandes nouvelles, la mondialisation est l’occasion de nous remettre en cause1. » En effet, la mondialisation apporte de nouvelles problématiques, la mondialisation des échanges économiques entraîne celle des infractions anticoncurrentielles et des préjudices de masse pour les victimes. Si bien que l’on se demande comment sanctionner, indemniser, ce que font les pays voisins pour y remédier. Dès lors est né un débat à grande échelle sur la nécessité de l’introduction de class actions en droit de la concurrence. En France un grand débat est né qui touche tous les citoyens. De mi-‐décembre et mi-‐avril, l'association UFC Que Choisir a interrogé par courrier ou internet 56 437 personnes de tous âges, de toutes conditions et repartis sur l'ensemble du territoire. 95% des sondés se sont prononcés en faveur de la mise en place de l'action de groupe2. En effet l’action de groupe répond à des problématiques modernes, politiques, économiques et sociales au cœur des préoccupations des citoyens et que les autorités publiques mettent en avant depuis 20033. Mais elles sont aussi populaires car elles sont spectaculaires. Elles sont mises en avant dans les médias. Les sommes en jeu sont impressionnantes4, ces actions sont reprises par les journaux, un film est même sorti en 1991 s’intitulant « class action »5 dans lequel une fille et un père s’opposent, l’une intentant la class action et l’autre défendant l’industriel et un autre film s’intitulant « Erin Brockovich »6 inspirée de faits réels, soit de la class action menée contre société Pacific Gas and Electric Company. Elles sont juridiquement efficaces en ce qui concerne l’indemnisation et peu contraignantes pour le justiciable. Avec le système de l’opt out, les membres de la « class » sont informés de la procédure et surveillent de loin son déroulement. En outre sur le plan économique, les membres de la dite « class » n’engagent pas d’argent, seuls ceux qui se sont exclus de l’action et qui après constatation du gain 1 Serge Guinchard, Les recours collectifs : études comparée, journée d’études du 27 janvier 2006, société de législation comparée, colloques, volume 5, p. 139. 2 Dépêche AFP, Le Figaro, Les français pour l’action de groupe, publié le 25 mai 2011, Site Internet du Figaro, trouvé le 25 août 2011, http://www.lefigaro.fr/flash-‐eco/2011/05/25/97002-‐20110525FILWWW00398-‐les-‐ francais-‐pour-‐l-‐action-‐de-‐groupe-‐etude.php. 3 En 2003 un projet d’action de groupe a été présenté par le Député Luc Chatel au Premier Ministre. 4 Binyamin Appelbaum, Investors Put Money on Lawsuits to Get Payouts, The New-‐York Times, 14 novembre 2010. 5 Film de Michael Apted de 1991, « Class action », dont les acteurs principaux sont Gene Hackman et Mary Elizabeth Mastrantonio. 6 Film de Steven Soderbergh de 2000, « Erin Brockovich », dont les acteurs principaux sont Julia Roberts et Albert Finney. Alexandra Sieffert-‐Xuriguera 4 Faut-‐il introduire des class actions en droit de la concurrence ? veulent obtenir réparation de leur préjudice devront avancer des frais. Ce sont des raisons évidentes de l’attrait que représente une telle action pour le grand public. Les préjudices menant à la possibilité d’une class action résultent très souvent d’une infraction au droit de la concurrence. Le droit de la concurrence est un droit basé sur une logique et des considérations économiques relativement étrangères au raisonnement juridique classique. Il tend à la protection de l´équilibre naturel des marchés qui nait d´une concurrence loyale entre leurs différents acteurs et de leurs rapports avec leurs cocontractants, mais aussi à la protection des intérêts subjectifs qu´il créé. Cette dualité de but, doit se traduire, dans les voies de droit national créées pour son application, qu´il soit communautaire ou national, dans une dualité de moyens permettant d´en assurer l´application effective. Sont ainsi recherchés par le législateur, l´établissement par l´action subjective, d´une concurrence citoyenne7 mais surtout un renforcement de l´effectivité du droit, devenu un enjeu majeur en droit de la concurrence. C’est dans ce contexte qu’il convient de se demander si l’introduction de class actions en droit de la concurrence est opportune ? Le mot anglais « class » correspond en français à une classe, soit un ensemble de personne ayant des caractères communs. Le terme « action » quant à lui indique la possibilité de poursuivre en justice. Plusieurs traductions ont été proposées : action de masse, action de class8, action de groupe, action populaire9, recours collectif10. Il conviendra d’utiliser dans ce mémoire le terme d’action de groupe et le terme de class action, sans autre précision, sera utilisé pour désigner l’action utilisée aux Etats-‐Unis. Jean Calay-‐Auloy partisan de l’introduction de la class action en droit français depuis la première heure définit l’action de groupe comme : « L’action qui consiste à réunir dans une seule instance, donnant lieu à un seul jugement, la réparation de préjudices individuels multiples ayant une origine commune »11. Il convient de distinguer entre deux types de dommages possibles : il y a des dommages sériels, soit un même dommage causant des préjudices différents d’une victime à une autre ; puis il y a des dommages collectifs, soit un dommage à l’intérêt général. Ces deux types de dommage peuvent aboutir à une action collective. Cette procédure permet à un grand nombre de 7 Danièle Briand-‐Mélédo, Droit de la concurrence, droit constitutionnel substantiel de l'Union européenne, RTD Com. 2004 p. 205. 8 Francis Caballero, Plaidons par procureur ! De l’archaïsme procédural à l’action de groupe, Revue trimestrielle de droit civil 1985, p. 247. 9 Olivier Razemon, Class action : le modèle portugais. Site Internet : Novethic, trouvé le 25 août 2011, http://www.novethic.fr/novethic/entreprise/pratiques_commerciales/relations_clients/class_action_modele_ portugais/102068.jsp. L’action populaire désigne la « class action » portugaise, l’ « acção popular » est inscrite dans la Constitution portugaise depuis 1981. 10 Luc Alarie, Le recours collectif, 2 novembre 2010, Site Internet : Le réseau juridique du Québec , trouvé le 25 août 2011, http://www.avocat.qc.ca/public/iirecourscoll.htm. Le recours collectif désigne la « class action » québécoise. 11 Jean Calay-‐Auloy, Pour mieux réparer les préjudices collectifs, une class action à la française ?, La Gazette du Palais, 28-‐29 septembre 2001, p. 13. Alexandra Sieffert-‐Xuriguera 5 Faut-‐il introduire des class actions en droit de la concurrence ? personnes, souvent des consommateurs, de poursuivre une personne, une entreprise ou une institution publique afin d’obtenir une indemnisation morale ou financière ou la réparation d’un préjudice. Le mécanisme des class actions s’ajoute à une demande de réparation d’un préjudice de masse. En pratique lorsque ce préjudice est diffus, soit de faible voire très faibles préjudices, mais qu’il est souffert par un très grand nombre de victimes, la class actions n’influence qu’indirectement, l’action au fond et le procès en responsabilité12. Le but de l’introduction de l’action de groupe en droit français a été défini par Daniel Mainguy comme étant de : « stimuler le dynamisme commercial sans le paralyser »13. L’intérêt du sujet réside dans son caractère polémiste, mêlant des intérêts de marchés, d’entreprises et ceux des consommateurs sur le fondement du droit de la concurrence tout en ayant pour objectif de protéger le marché et le consommateur. La class action permet de simplifier l’accès au droit des justiciables lésés, un des principaux buts du droit de la consommation et de réguler le marché, un des principaux buts du droit de la concurrence. Ainsi des groupes très importants de personnes ayant subit des préjudices peuvent bénéficier d’un accès simplifié à la justice ayant pour conséquence la réparation d’un préjudice lourd de masse ou bien d’un préjudice diffus parce que très faible mais largement répandu14. Cela permet au consommateur victime d’un préjudice personnel peu élevé, qui hésiterait pour ce motif à demander réparation, d’actionner l’auteur du dommage15. Mais cette action est elle capable de respecter la dualité d’objectifs du droit de la concurrence, visant à la protection des intérêts du marché et du consommateur ? Beaucoup d’auteurs sont d’avis qu’il faut particulièrement protéger la partie dite faible, soit le consommateur en bien d’hypothèses, comme Stéphane Piedelièvre qui énonce que : « Le consommateur est une victime, isolée et impuissante, qu’il faut mobiliser et défendre par des actions collectives »16. Le législateur a crée à cet effet un corps de règles spécifique pour les consommateurs, ce qui a eu pour effet de créer une sorte de droit processuel de la consommation17, ainsi un droit spécifique de la consommation matériel et processuel à vocation à s’appliquer lorsqu’une pratique anticoncurrentielle est commise. Si le droit de la consommation et de la concurrence sont liés, le 12 Daniel Mainguy, L’introduction en droit français des class actions, Petites affiches, 22 décembre 2005, n°254, p. 6. 13 Daniel Mainguy, MM Perben et Jocob, L’introduction en droit français des class actions, Petites affiches, 22 décembre 2005, n°254, p. 6. 14 Daniel Mainguy, Anaïs Giraud, L’introduction en droit français des class actions, Petites affiches, 22 décembre 2005, n°254, p. 8. 15 Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010. 16 Jean Beauchard, Droit de la distribution et de la consommation, Thémis, PUF, Paris, novembre 1998, p. 34. 17 Stéphane Piedelièvre, Droit de la consommation, Corpus droit privé dirigé par Nicolas Molfessis, Economica, Paris, 2008, p. 567. Alexandra Sieffert-‐Xuriguera 6 Faut-‐il introduire des class actions en droit de la concurrence ? droit de la concurrence est plus vaste car il embrasse aussi le droit de l’environnement ou de la santé par exemple. La question qui peut alors sembler légitime est celle de l’impact de l’introduction d’une action de groupe en droit de la concurrence. Si les consommateurs peuvent agir sur le terrain du droit de la consommation, par exemple dans le cas d’un médicament produit en grande quantité et dommageable pour la santé ; une action n’est pas dans tous les cas possible. Dès lors il pourrait paraître opportun introduire une action en droit de la concurrence pouvant produire ses effets sur d’autres branches du droit dont le droit de la consommation. Le débat quant à l’opportunité d’introduire des class actions en droit de la concurrence est un débat national qui existe depuis 25 ans en France, un premier rapport a été rédigé en 1983 sur le règlement des litiges de la consommation contenant un projet d’action de groupe18. Ce débat reste toujours d’actualité comme nous l’ont montré les deux derniers Présidents de la République19 mentionnant la nécessité de l’introduction d’une telle action. C’est aussi un débat sur le plan de l’Union européenne. La Commission travaille depuis plusieurs années à la conception d’une législation européenne en ce qui concerne l’introduction de recours collectifs dans le domaine du droit de la consommation et du droit de la concurrence. Elle a adopté en 2005 un livre vert20 sur les actions en dommages et intérêts pour infraction aux règles sur les ententes et les abus de position dominante, suivi d’un livre blanc en 200821, tous deux comportant un chapitre consacré aux recours collectifs. En 2008, la Commission a aussi publié un livre vert sur les recours collectifs pour les consommateurs. Les vice-‐présidents Viviane Reding et Joaquín Almunia ainsi que le commissaire John Dalli ont examiné les défis en matière de recours collectifs, dans le cadre d’un débat d’orientation qui s’est déroulé durant la réunion de la Commission du 12 octobre 2010. La consultation publique lancée le 4 février 2011 sur le 18 Jean Calay-‐Auloy, Le règlement des litiges de la consommation, Roneo 1983, p. 16. 19 Nicolas Lagrange, A quand des class actions à la française ?, Site Internet : BFM Radio, Trouvé le 20 août 2011, http://www.radiobfm.com/edito/home/101013/a-‐quand-‐des-‐class-‐actions-‐a-‐la-‐francaise-‐/ 20 Livre vert, du 19 décembre 2005, intitulé : Actions en dommages et intérêts pour infraction aux règles communautaires sur les ententes et les abus de position dominante [COM(2005) 672 final -‐ Non publié au Journal officiel] ; Trouvé le 20 août 2011 : http://eur-‐ lex.europa.eu/smartapi/cgi/sga_doc?smartapi!celexplus!prod!DocNumber&lg=fr&type_doc=COMfinal&an_do c=2005&nu_doc=672. 21 Livre blanc sur les actions en dommages et intérêts pour infraction aux règles communautaires sur les ententes et les abus de position dominante, Bruxelles, le 2 avril 2008, site de la commission européenne : trouvé le 26 juillet 2011 : http://ec.europa.eu/competition/antitrust/actionsdamages/files_white_paper/whitepaper_fr.pdf. Alexandra Sieffert-‐Xuriguera 7 Faut-‐il introduire des class actions en droit de la concurrence ? renforcement de l’approche européenne en matière de recours collectif22 est le fruit de ce débat. Le débat sur l’introduction d’une action de groupe en droit de la concurrence recouvre désormais un enjeu politique de premier ordre pour l’Union européenne. Il y a près de cinq cent millions de citoyens européens soit autant de consommateurs. Une action de groupe européenne permettrait de donner aux consommateurs et aux petites et moyennes entreprises (PME) la possibilité de faire entendre leur voix et, en tant que contre pouvoir à part entière de s’ériger en interlocuteur des principaux acteurs économiques parties à des ententes, à des concentrations, sujets à l’attribution d’aides d’Etat ou en abus de position dominante23. Afin d’analyser s’il est opportun d’introduire une class action en droit de la concurrence, les apports, effets ou dangers d’une telle modification du droit, l’impact sur les acteurs de la concurrence : il convient d’étudier le régime de l’action de groupe, un débat aux enjeux mondiaux (Partie I), puis les limites et les intérêts d’une telle action (Partie II). PARTIE I : LE RÉGIME DE L’ACTION DE GROUPE : UN DÉBAT AUX ENJEUX MONDIAUX Afin d’apprécier le régime de l’action de groupe il faut étudier l’action introduite en droit positif français visant à protéger l’intérêt collectif (Titre 1) qui apparaît peut convaincant, puis les autres systèmes de droits existants ayant introduit la class action dans leurs ordres juridiques (Titre 2). TITRE 1 : LE DROIT POSITIF FRANÇAIS VISANT À PROTÉGER L’INTÉRET COLLECTIF Des actions visant à protéger l’intérêt collectif ont été introduites en droit français, afin appréhender si elles apparaissent satisfaisantes et pouvoir pallier à la non introduction de la class action, il faut envisager : les conditions d’action des associations (chapitre 1), puis les actions et sanctions possibles (chapitre 2). CHAPITRE 1 : LES CONDITIONS D’ACTION DES ASSOCIATIONS Afin d’apprécier les conditions d’action des associations, il faut analyser les atteintes ouvrant le droit à l’action des associations (section 1) et se demander quelles sont les associations qui peuvent agir (section 2) ? 22 Document de travail des services de la Commission consultation publique : Renforcer la cohérence de l'approche européenne en matière de recours collectifs trouvé le 20 août 2011 : http://ec.europa.eu/justice/news/consulting_public/news_consulting_0054_en.htm. 23 Réponse à la consultation de la Commission européenne sur le recours collectif / Consultation on Collective Redress (avril 2011), p.1, Site internet de la Commission européenne, http://ec.europa.eu/competition/consultations/2011_collective_redress/biard_fr.pdf, trouvé le 26 juillet 2011. Alexandra Sieffert-‐Xuriguera 8 Faut-‐il introduire des class actions en droit de la concurrence ? Section 1 : Les atteintes ouvrant droit à l’action des associations De ces difficultés l’introduction d’une class action dans le droit positif français revêt pour le législateur un caractère éminemment polémiste. Deux actions ont été créées tentant de pallier la non existence de la class action. Cet éclatement d’actions provoque une impression d’obscurité de la règle pour les justiciables qui ne savent pas vers qui se tourner lorsqu’ils sont victimes d’un petit préjudice causé par une grande entreprise. Ces actions : l’action des associations, l’action en représentation conjointe24, visent pourtant à les protéger. Ainsi le mécanisme d’action de groupe introduit en droit français est-‐il un palliatif à la class action ? Le mécanisme de class actions a été introduit en France sous l’appellation d’action de groupe. Il permet à un individu ou à un groupement d’agir au nom d’un ensemble d’individus inorganisés et inconnus au moment où l’action est engagée. Cette action se distingue de l’action d’intérêt collectif ayant pour but d’assurer en justice la représentation d’un intérêt catégoriel, celui des consommateurs, des contribuables, des patients etc., intérêt qui ne se confond ni avec l’intérêt général ni avec la somme des intérêts particuliers des personnes intégrant cette catégorie25. L’action des associations en droit français résulte d’une évolution du droit positif, mais quelle est-‐ elle ? L’article 46 de la loi Royer du 27 décembre 1973 avait autorisé les associations, ayant reçu un agrément administratif « à exercer devant toutes les juridictions l’action en réparation d’un dommage causé par une infraction ». Puis la loi du 5 janvier 1988 a étendu la possibilité aux associations à travers les articles L. 421-‐1 et suivants du Code de la consommation d’étendre cette possibilité d’action aux associations de défense de l’intérêt collectif des consommateurs26. A l’heure actuelle c’est toujours ce régime qui est en vigueur en droit positif. Les actions proches de l’action de groupe en droit français sont des actions existant en droit de la consommation ayant pour but de protéger le consommateur à travers des associations de consommateurs. Mais quelles sont ces actions, qui peut les exercer et dans quelles conditions ? 24 Cette action a été créé par la loi n°92-‐60 du 18 janvier 1992. 25 Daniel Mainguy, MM Perben et Jocob, L’introduction en droit français des class actions, Petites affiches, 22 décembre 2005, n°254, p. 6. 26 Guy Raymond, Droit de la consommation, Litec, 2ème édition, Lexis Nexis, Paris, 2011, p. 460. Alexandra Sieffert-‐Xuriguera 9
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