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Les nouvelles théories de la croissance PDF

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Dominique Guellec Pierre Ralle LES NOUVELLES THÉORIES DE LA CROISSANCE cinquième édition ÉDITIONS LA DÉCOUVERTE 9 bis, rue Abel-Hovelacque 75013 Paris CatalogageÉlectre-Bibliographie GUELLEC,Dominique*RALLE,Pierre Lesnouvellesthéoriesdelacroissance.–5eéd.–Paris:LaDécouverte,2003. –(Repères;161) ISBN2-7071-4092-9 Rameau: développementéconomique Dewey: 330.1:Économiegénérale.Théoriegénéraledel’éco- nomie Publicconcerné: Niveauuniversitaire.Publicmotivé Lelogoquifigureaudosdelacouverturedecelivremériteuneexplication. Sonobjetestd’alerterlelecteursurlamenacequereprésentepourl’avenirde l’écrit,toutparticulièrementdansledomainedesscienceshumainesetsociales, ledéveloppementmassifduphotocopillage. LeCodedelapropriétéintellectuelledu1erjuillet1992interditeneffetexpres- sémentlaphotocopieàusagecollectifsansautorisationdesayantsdroit.Or,cette pratiques’estgénéraliséedanslesétablissementsd’enseignementsupérieur,pro- voquantunebaissebrutaledesachatsdelivres,aupointquelapossibilitémême pourlesauteursdecréerdesœuvresnouvellesetdelesfaireéditercorrectement estaujourd’huimenacée. Nousrappelonsdoncqu’enapplicationdesarticlesL.122-10àL.122-12du Codedelapropriétéintellectuelle,toutereproductionàusagecollectifparphoto- copie,intégralementoupartiellement,duprésentouvrageestinterditesansauto- risationduCentrefrançaisd’exploitationdudroitdecopie(CFC,20,ruedes Grands-Augustins,75006Paris).Touteautreformedereproduction,intégraleou partielle,estégalementinterditesansautorisationdel’éditeur. Sivousdésirezêtretenurégulièrementinformédenosparutions,ilvoussuffit d’envoyer vos nom et adresse aux Éditions La Découverte, 9 bis, rue Abel- Hovelacque,75013Paris.Vousrecevrezgratuitementnotrebulletintrimestriel ÀlaDécouverte.Vouspouvezégalementretrouverl’ensembledenotrecatalo- gueetnouscontactersurnotresitewww.editionsladecouverte.fr.  ÉditionsLaDécouverte,Paris,1995,1996,1997,2001,2003. Introduction Pourquoi la richesse produite dans les pays les plus déve- loppésa-t-elle étémultipliéeparquatorzedepuis1820?Pour- quoi, depuis la Seconde Guerre mondiale, le Japon a-t-il une croissancebeaucoupplusrapidequelespaysoccidentaux?Les théoriesdelacroissancecherchentlesréponsesàcesquestions. Elles ont été profondément renouvelées à la fin du XXe siècle, àtelpointqu’ilestassezlégitimedeconsidérerqu’ilexisteun ensemblede«nouvellesthéories»,généralementqualifiéesde «théories de la croissance endogène». Ces nouvelles théories utilisent largement les développe- ments des autres branches de la théorie économique et, en particulier, de l’économie industrielle: concurrence impar- faite, différenciation de produits, économies d’échelle. Elles s’attaquentaussiàlacompréhensiondephénomènesnouveaux. Comprendre le ralentissement de la productivité survenu dans les pays développés depuis le milieu des années soixante-dix nécessite de modéliser les relations entre progrès technique et croissance.Comprendrepourquoicertainspayssedéveloppent rapidement alors que d’autres restent dans le sous-développe- mentnécessitedemodéliserlesrelationsentreaccumulationdu capital humain et croissance. «Robinsonvenaitd’arriversurl’îledéserte.Desonnaufrage iln’avaitsauvéqu’unsacdeblé.Robinsonleconsidéra:voilà de quoi vivre, mais pendant combien de temps? «Ilregardal’île.Elleétaitcomposéed’unebonneterredont la quantité était telle qu’un homme seul ne pourrait jamais la 3 cultiver tout entière. Ce constat soulagea Robinson. Toute sa vieilavaitvécudesontravail.Surcetteterre,ceseraitcomme ailleurs. Cette année il sèmerait. L’an prochain, la récolte lui permettrait de vivre et de semer de nouveau. «Ilavaitcependantunsouci:quellequantitédeblédevait-il semer? Et combien pouvait-il en garder pour sa consomma- tion?» C’est une première question posée aux théories de la crois- sance. L’analyse de la croissance traite donc du long terme. Cette définition mérite d’être explicitée. On peut tout d’abord considérerque,lelongterme,c’est«cequiseproduitaubout d’uncertaintemps».Ainsi,parexemple,l’effetd’uninvestis- sement après cinq années serait du domaine du long terme. Maiscetteapprochetemporelleencacheuneautre,aucontenu pluséconomique.Cequidistinguelecourttermedulongterme n’est pas la longueur de la période au cours de laquelle sont étudiés un certain nombre de phénomènes. C’est le rôle que joue l’accumulation des diverses formes de capital. A court terme,pardéfinition,leseffetsdel’accumulationsontignorés. L’investissement est considéré comme un élément de la demandequinemodifiepasl’offre.Alongterme,aucontraire, ons’intéresseauxeffetsdel’accumulationducapital.L’inves- tissement n’est donc plus simplement un élément de la demande, mais aussi (et surtout) un facteur d’offre. Sursonîledéserte,Robinsondisposededeuxressources:le travail qu’il peut fournir et la quantité de blé existant initia- lement (son capital). A l’aide de ce blé et de son travail, il produitdublé(celarevientàsupposerquelecapitaletlebien produitsonthomogènes).Ilpeutconsommer,cequiaccroîtson bien-êtreaujourd’hui.Ilpeutinvestir,doncproduiredemain,ce qui lui permettra d’accroître son bien-être demain. Il y a un arbitrage économique à réaliser entre ces deux objectifs. «Robinsondécidadeplanterunecertaineproportiondeson stock de blé. Les premières années celui-ci augmenta rapide- ment. En maintenant constante la proportion du stock qu’il plantait, Robinson consommait, plantait et récoltait toujours plus. «Il se rendit cependant compte que son stock de blé s’accroissaitdemoinsenmoinsvite.C’estquepluslaquantité de grain semé était élevée, plus le rendement de chaque grain était faible. Un jour il s’aperçut qu’il n’avait plus d’intérêt à 4 accroîtrelaquantitédegrainsemé:laquantitésupplémentaire de blé qu’il semait devenant supérieure à la quantité qu’elle permettaitderécolter.Ilarrêtadoncsonexpansion.Laquantité de grain semé se stabilisa ainsi que les quantités produites et consommées.» La situation dans laquelle se trouve Robinson semble para- doxale. A long terme, il n’y a pas de croissance économique. Cela provient du fait que le rendement marginal du processus qui transforme les facteurs de production (travail et blé) en produit (le blé) est décroissant. On retrouve là une crainte des économistes classiques des XVIIIe et XIXe siècles: au fur et à mesure du développement économique, on utilise des res- sources (selon eux, la terre) dont la productivité marginale est décroissante. La croissance économique doit donc naturelle- ment s’arrêter un jour. «Un matin Robinson rencontra le perroquet. Ce qu’il avait d’abordconsidérécommeunsimplecompagnondejeus’avéra d’une aide précieuse. Ce perroquet avait manifestement été en contact avec les plus grands savants et les cultivateurs les plusexperts.ChaquejouriltransmettaitàRobinsonunpeudu savoirapprisauprèsd’eux.EtRobinsonpouvaitainsiaméliorer l’efficacité de son travail. La production se mit alors à croître et rien ne semblait pouvoir l’arrêter.» LemodèledeSolow[1956]*étudielasituationdanslaquelle se trouve Robinson. En présence d’un facteur qui améliore régulièrement l’efficacité du processus de production (le pro- grèstechnique),ilestpossibled’avoirunecroissanceillimitée. Cette croissance peut être qualifiée d’exogène, car le progrès technique est défini en dehors du modèle (le savoir du perro- quet a été acquis en dehors de l’île, et Robinson en bénéficie gratuitement). Une propriété importante et sans doute surpre- nante d’une telle représentation est que le taux d’épargne n’a pas d’influence sur le rythme de croissance de long terme. Celui-ci ne dépend que de la vitesse du progrès technique (la croissance provient du perroquet, pas du choix que réalise Robinson entre consommer et investir). «Unjourleperroquetdisparut.Auboutdequelquesannées, la production se stabilisa de nouveau. Robinson comprit alors *Lesréférencesentrecrochetsrenvoientàlabibliographieenfind’ouvrage. 5 qu’en étudiant ses expériences passées et en procédant à de nouvelles expérimentations il pourrait de nouveau améliorer l’efficacité de son travail. Mais une telle étude prendrait du temps qu’il ne pourrait pas utiliser à produire du blé. Cela lui donna un second souci: quelle part de son temps allait-il consacrer à accroître son savoir-faire? Et combien pouvait-il en consacrer à produire?» Cette seconde question s’apparente à la première (choisir entre consommation et investissement). Cette fois, il y a aussi un arbitrage à réaliser entre le temps consacré à produire et celui consacré à améliorer l’efficacité du système de produc- tion.Lapartdutempsdisponibleconsacréàl’accumulationde «savoir» est en quelque sorte un taux d’épargne (ce ne l’est pasàstrictementparlerpuisque,danslepremiercas,lecapital etlebiensonthomogènesetque,danslesecond,ilsnelesont pas: le blé n’est pas homogène au «savoir»). Cette seconde question est posée directement par les nouvelles théories de la croissance. Ce qui ne veut pas dire qu’elle était ignorée aupa- ravant.Lechoixd’accroîtresoncapitalhumainenseformanta de longue date été considéré comme un arbitrage à réaliser entre travailler (donc produire pour pouvoir consommer aujourd’hui) et se former (donc accroître son efficacité pour produire et pouvoir consommer plus demain). Les analyses empiriques de la croissance (par exemple Carré, Dubois et Malinvaud [1972]) ont d’ailleurs tenu compte de l’effet de la formationetdelatechnologie.Cependant,lathéorietradition- nelle de la croissance ne prenait pas en compte le coût du progrès technique. Elle considérait l’accumulation du capital immatérielcommeexogèneetenignoraitlesmotivationséco- nomiques.L’originalitédesnouvellesthéoriesestdeconsidérer que le choix d’accumuler du capital immatériel est endogène (Robinson doit faire lui-même un effort pour acquérir de nou- veaux savoirs). «PuisVendrediapparut.Commel’îleétaitgrande,lesdeux hommes se la partagèrent, chacun cultivant sur sa partie la quantitédeblénécessaireàsaconsommationetàsoninvestis- sement, chacun partageant son temps entre production du blé et étude. «Robinson surveillait attentivement les modifications que Vendrediapportaitàsafaçond’organiserlaproduction:enles appliquantàsontour,ilpouvaitaccroîtrelaproductivitédeson travail. Quand Vendredi consacrait une grande partie de son 6 temps à étudier, les progrès de Robinson étaient considéra- bles...Avraidire,celui-ciauraitsouhaitéqueVendrediconsa- creunepartplusimportantedesontempsàétudieretunepart plus faible à produire. «Vendredi était d’un naturel égoïste. Quand il comprit que soncompagnonprofitaitainsidesestravauxd’étude,ildécida de construire une palissade pour se protéger de l’espionnage. Ainsi, au bout de quelque temps, les méthodes de production des deux hommes devinrent différentes. Le blé de Robinson fournissait de hauts rendements, mais était d’une qualité médiocre, utile pour les usages courants. Celui de Vendredi était meilleur et pouvait servir dans les occasions exception- nelles, mais ses rendements étaient faibles. Les deux hommes semirentàéchanger.Vendrediserenditcomptequelesquan- tités de son blé que Robinson souhaitait se procurer étaient d’autant plus importantes que le prix fixé était bas. Ce dont il tint compte pour fixer le prix de son blé...» L’apparition de Vendredi pose un nouveau problème à Robinson. Seul, il gère dans son intérêt les ressources dont il dispose.Cefaisant,illefaitefficacement(puisqu’ilestration- nel). A partir du moment où un autre individu est présent, l’environnement de Robinson est modifié, ce dont il doit tenir compte.Decefait,ilfautquecertainesconditionssoientvéri- fiées pour que la recherche par chacun de ses intérêts propres aboutisse à une gestion efficace des ressources disponibles par l’ensemble des agents privés (c’est-à-dire pour que la poursuite de l’intérêt individuel concoure à l’intérêt général). Dans le domaine de l’analyse de la croissance, c’est rarement lecas.Laraisonprincipaleenestquelacroissanceestrendue possible par l’innovation. Celle-ci a souvent des effets directs nonseulementsurlesagentsquilaréalisent,maisaussisurleur environnement, c’est-à-dire sur les autres agents. Ainsi Robinson espionne Vendredi et profite de ses décou- vertes.SiVendredin’arrivepasàseprotéger,ilyauneexter- nalité: Robinson préférerait que Vendredi travaille moins et étudie plus car il bénéficierait alors des effets des investisse- mentsintellectuelssupplémentairesdesoncompagnon.Maisle comportementspontanédeVendredin’aboutitpasàcela:ilne prendpasencomptelesconséquencesdesesactessurRobin- son. Dans un tel cas d’existence d’une externalité, une forme de coopération entre agents est justifiée, puisque les compor- tements individuels spontanés ne sont pas optimaux. 7 Si Vendredi arrive à protéger ses découvertes (en construi- santunepalissadeou...enlesbrevetant),iln’yaplusd’exter- nalité. Mais, dans ce cas, les nouveaux biens vont se différencierdesbiensantérieurementdisponibles.Decefaitla concurrencevadevenirimparfaite[Gabszewicz,1994],cequi, làencore,vaconduirelescomportementsspontanésdesagents ànepasêtresocialementefficaces(chacunsetrouveensitua- tiondemonopoleetn’estdoncsoumisqu’àunefaiblepression concurrentielle). Celivreestcomposédecinqchapitres.Lepremierestconsa- cré aux «faits stylisés de la croissance»: les évolutions des principauxagrégatsmacroéconomiquesenlonguepériodesont présentées. Le deuxième chapitre analyse les principales théo- ries de la croissance développées aux XIXe et XXe siècles. Les thèsesdesclassiquespuisdeHarrodetdeDomarsontprésen- tées brièvement. Le modèle de Solow, fondateur de la théorie néo-classique de la croissance, est ensuite exposé. Le troisième chapitre présente des généralités sur les modèlesdecroissanceendogène.Lechapitresuivantestconsa- cré aux modèles fondés sur l’accumulation de capital techno- logique et au progrès technique. Enfin, le dernier chapitre est consacréauxconséquencesdesnouvellesthéoriespourlapoli- tique économique. Si les nouvelles théories s’attaquent à la compréhension de phénomènesréels,ellestraitentdifficilementd’unsujetmajeur des vingt dernières années: les déséquilibres. Cela peut sem- bler surprenant. En effet, le chômage et l’inflation ont affecté de manière durable les économies des principaux pays déve- loppés.Or,traditionnellement,lesthéoriesdelacroissancepor- tent peu d’attention à ces deux phénomènes. Pour la plupart d’entre elles, les déséquilibres de court terme engendrent des fluctuationsdel’activitééconomiquequin’ontpasd’influence sur le rythme de croissance de long terme (inversement, la plus ou moins grande rapidité de la croissance n’a pas d’influencesurlesévolutionsconjoncturelles).Aujourd’hui,ce schéma dichotomique (qui a toujours été débattu) est remis en cause. Ainsi, d’un côté, des théories censées représenter les fluctuations (les cycles réels) montrent que celles-ci peuvent avoiruneinfluenceàlongterme.Del’autre,lesnouvellesthéo- ries de la croissance considèrent que les conditions initiales d’une économie (donc affectées par les déséquilibres) peuvent influencer le rythme de la croissance. Il reste que si la place 8 accordéeauxdéséquilibresdanslesnouvellesthéoriesestplus importantequecequ’elleétaitauparavant,ceux-cisontcepen- dant rarement au centre de l’analyse. Une remarque finale permet de situer la place des théories économiques de la croissance dans un champ plus large. Aucune modélisation ne prétend rendre compte de la multi- plicité des mécanismes (interdépendants et pour certains non élucidés) qui expliquent la croissance: la croissance «réelle» estmodeléepardenombreuxfacteursextra-économiques(poli- tiques,culturels,institutionnels).Toutceladoitrendrelethéo- ricien modeste, et le lecteur prudent.

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