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Les enseignements secrets de Martines de Pasqualis PDF

106 Pages·2007·0.6 MB·French
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LA VOCATION DE L’ARBRE D’OR est de partager ses admirations avec les lecteurs, son admiration pour les grands textes nourrissants du passé et celle aussi pour l’œuvre de contem- porains majeurs qui seront probablement davantage appréciés demain qu’aujourd’hui. Trop d’ouvrages essentiels à la culture de l’âme ou de l’identité de cha- cun sont aujourd’hui indisponibles dans un marché du livre transformé en industrie lourde. Et quand par chance ils sont disponibles, c’est finan- cièrement que trop souvent ils deviennent inaccessibles. La belle littérature, les outils de développement personnel, d’identité et de progrès, on les trouvera donc au catalogue de l’Arbre d’Or à des prix résolument bas pour la qualité offerte. LES DROITS DES AUTEURS Cet e-book est sous la protection de la loi fédérale suisse sur le droit d’auteur et les droits voisins (art. 2, al. 2 tit. a, LDA). Il est également pro- tégé par les traités internationaux sur la propriété industrielle. 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Franz von Baader Les enseignements secrets de Martinez Pasqualis Suivi de Nouvelle notice historique sur le martinésisme et le martinisme par un Chevalier de la Rose Croissante © Arbre d’Or, Genève, février 2007 http://www.arbredor.com Tous droits réservés pour tous pays LES ENSEIGNEMENTS SECRETS DE MARTINEZ PASQUALIS Vous me demandez, honoré ami, de vous communiquer quelque chose tou- chant les enseignements de Martinez Pasqualis, auxquels vous vous êtes intéressé à travers les écrits de deux de ses disciples, feu Saint-Martin et l’abbé Fournié  qui vit encore à Londres ; je vais donc, selon mes forces et autant qu’il m’est per- mis, accéder à votre désir. Si, en tout temps, il y eut et il y aura des hommes qui, en tant que représenta- teurs du futur, tels les prophètes, nous ont montré que le futur est déjà là, il doit également y en avoir eu en tout temps d’autres qui, en tant que représentateurs du passé, nous montrent, par le souvenir, que le passé est encore là 2, et un tel représentateur du passé (du Judaïsme) est assurément Pasqualis qui, à la fois juif et chrétien, — il confessait la religion catholique romaine —, a fait revivre pour nous l’Ancienne Alliance, non seulement dans ses formes, mais encore avec ses pouvoirs magiques. Et si l’on peut avec raison considérer cette nouvelle époque, à laquelle vivait Pasqualis, comme le commencement d’une éclipse générale, d’un affaiblissement de la lumière du Christianisme, on ne doit pas s’étonner de voir, durant cet obscurcissement de l’unique soleil, survenu par notre faute, réapparaître certains astres qui, pour parler le langage de Saint-Martin, se mon- trent comme des revenants, simplement parce qu’ils sont non allant. Si donc le Christianisme, dans la force de sa prime manifestation, a rendu muette la ma- gie du Paganisme et du Judaïsme, la réapparition de cette magie, même si elle ne s’est fait que peu remarquer, ne peut être attribuée qu’à l’affaiblissement du Christianisme, et être considérée comme le réactif nécessaire à une nouvelle et plus puissante manifestation. En effet, le Judaïsme est au Christianisme ce que ce dernier est à un troisième  Il a publié à Londres, en 80, la première partie d’un ouvrage intitulé : Ce que nous avons été, ce que nous sommes, et ce que nous deviendrons, dont nous pouvons nous attendre à avoir prochainement la suite, d’après ce que l’auteur m’a dit l’année dernière. Cf. l’excellente revue Der Lichtbote, vol. I, p. 478. 2 C’est dans ce sens, honoré ami, que vous appelez l’historien un prophète regardant en arrière, et vous rejetez ainsi de l’étude de l’histoire tous ceux auxquels ce don de vision n’a pas été accor- dé. Du reste, comme ce n’est que le point central de vision, qui a été une fois obtenu ou atteint, qui permet de contempler l’ensemble, on conçoit comment ce regard du voyant en arrière ou en avant, cette pré- ou post-résonnance dans l’histoire est surtout indivisible, bien que ce même don se manifeste davantage dans un sens chez tel individu, et davantage dans un autre sens chez tel autre individu. C’est ce que j’ai pu constater moi-même chez des sujets magnétiques.  LES ENSEIGNEMENTS SECRETS DE MARTINEZ PASQUALIS terme supérieur, dans lequel chacun des deux doit être transfiguré. Si l’on inter- prète la parole de S. Paul : « Par, avec et en Dieu, » dans son véritable sens, alors, comme il est vrai que la parfaite habitation de l’Esprit divin dans l’homme-esprit est le but et le sabbat, il devient évident que ce troisième moment a dans les deux antécédents — per-habitation et cohabitation —, à la fois ses prédécesseurs et ses coopérateurs, dont la présence dans le temps, ainsi que la disparition, sont purement phénoménales . Dans cette première ère, régime du Père ou premier degré d’Apprenti de l’homme-esprit, l’Absolu se tient encore comme Seigneur absolu, supérieur seu- lement à l’Unique, habitant seulement par celui-ci, — « il déplace les montagnes et ils ne savent pas 4 » — tandis que, dans la seconde ère, régime du Fils ou degré de Compagnon, le Premier, S’unifiant en lui et Se dépouillant de l’Unité de Sa Gloire dans la figure de ce Serviteur , descend vers le particulier, — l’Aigle qui, auprès du Prophète, volète pendant un temps sur la terre devant ses petits —, se rendant pareil à lui, c’est-à-dire demeurant auprès de lui ou avec lui, jusqu’à ce que et pour qu’enfin, à la dernière ère, régime de l’esprit ou degré de Maître, l’Universel, soulevant  l’Unique en soi, habite en même temps par lui, auprès  Ainsi, dans la Transfiguration, Élie et Moïse n’agissent que comme coopérateurs. 4 Merveilleuse est l’échelle que Pasqualis nous présente sur les différentes manières d’être d’un agent supérieur auprès d’un inférieur et de celui-ci envers celui-là dans son action et sa condui- te, en nous disant : « L’esprit agit dans, avec, par, sans et contre l’homme. » En effet, je ne connais pas de gradation plus complète pour désigner ma manière d’être ou celle de tout chrétien envers Dieu. Par là, l’homme peut chaque fois se rendre compte s’il agit en, avec, par, sans ou contre Dieu.  On peut consulter le Judas Iscariot de Daub sur ce libre renoncement ou suspension de l’uni- versel jusqu’à l’unité — le Fils de Marie — ; et l’opposé de cette concentration, qui a pour but l’expansion universelle en amour, est cette compression tout à fait forcée du Mauvais esprit, qui a pour but l’explosion universelle dans la haine accompagnée des tourments de Tantale. Saint- Martin, un disciple de Pasqualis, s’exprime ainsi : « Qui atteindra la sublimité de l’œuvre de la renaissance de l’homme ? Ne lui comparons pas la création de l’univers. Ne lui comparons pas même l’émanation de tous les êtres pensants » — émanation que Pasqualis distingue toujours de l’émanation suivante ou création — . « Pour opérer toutes ces merveilles, il a suffi que la sa- gesse développât ses puissances, et ce développement est la véritable loi qui lui est propre. Pour régénérer l’homme, il a fallu qu’elle se concentrât, qu’elle s’anéantît et qu’elle se suspendît, pour ainsi dire, elle-même. » D’ailleurs les trois moments dont il est question dans le texte peuvent nous donner une théorie suffisante de ces différents états, dont nous parlent plusieurs mysti- ques, par exemple, Mme Guyon ; car le triple nom du Seigneur : Jésus, Christ et Fils de Marie, indique déjà une triple manifestation dans l’homme extérieur (Être naturel) ; dans l’homme esprit intérieur (Être spirituel) ; et dans l’homme central (Centre divin).  Ici nous voyons une nouvelle signification du mot soulever, dont Hegel, le premier, a déjà fait remarquer le grand nombre de sens. Le Médiateur, dont le soulèvement ou l’intercession a pour but le mouvement de l’esprit, peut lui-même être ce qui soulève ou ce qui est soulevé, et, ainsi, l’intercession ou le soulèvement peut se faire de trois façons. Je ne dois me laisser relever que par  LES ENSEIGNEMENTS SECRETS DE MARTINEZ PASQUALIS de Lui et en Lui. Mais à l’orgueil des émigrants de l’homme-esprit, ce discours semble dur, et ils se tournent alors plus volontiers vers ceux qui leur offrent ce grade de Maître à meilleur compte, c’est-à-dire sans qu’ils aient besoin de passer par le travail de l’Apprenti et l’école du Compagnon, et qui leur promettent par conséquent, non seulement de les faire parvenir à la compréhension du Chris- tianisme sans avoir besoin de comprendre le Judaïsme, mais qui se font forts de les rendre complets (sapients, illuminés), par une voie plus facile qu’en passant par le Judaïsme et le Christianisme. Or à de tels Sages ignorants, on pourrait dire avec raison : Si tu déifies seulement l’intelligence et la science, Pouvoirs suprêmes du moi hautain, Tu t’es déjà donné au diable, Et avec lui tu périras. ce qui est plus élevé que moi, c’est-à-dire soulever, dresser, enlever, ou rendre vrai, de même que je dois relever et redresser ce qui est au-dessous de moi. Mais si une chose inférieure cherche à me soulever, c’est-à-dire veut m’entraîner, alors on conçoit aisément que mon action médiatrice s’y oppose et prenne un autre caractère. Mais ici aussi, en conflit avec le mal et le mauvais, cette action se manifeste d’une façon quand elle doit être dirigée contre le mal, qui inhabite et coha- bite déjà en moi, et d’une autre manière contre le mal, qui seulement perhabite en moi, ou qui m’emplit ou qui est déjà hors de moi ; c’est-à-dire que, de même que je puis encore faire le mal, quoique mon cœur et ma tête n’y participent pas, de même je puis et je dois faire le bien, quoi- que mon cœur et ma tête n’y acquiescent point. Et, de même que, pour parler de l’inhabitation de la puissance soulevante, chaque action bonne occasionne et fixe la disposition, le caractère, la nature, etc., de même, chaque action destructive ne produit que la négation de soi-même, détruit, soulève de nouveau, et ce soulèvement de soi-même — tuer — , la volupté est à la factio continui ce que la douleur est à la solutio continui — cette sui-nocence consiste précisément dans ce processus de soulèvement sans lequel aucune opération du malin et aucune occasion de bonne disposition ou de bonne nature ne sont possibles. Car, dans le bien comme dans le mal, l’action de l’esprit commence par un acte immédiat et s’y termine, et le pouvoir du bien comme du mal doit nécessairement me posséder avant que je puisse en être maître. Si, du reste, on considère la nature comme l’universel non-médiat, on ne peut se dispenser d’établir une distinction entre ce non-médiat (la nature) qui se trouve d’une part supérieur, et le non-médiat inférieur à l’homme-esprit, ce qui justifie le ternaire de Pasqualis relatif aux modes de l’être : le divin, le spirituel dans un sens plus restreint, et le naturel également dans un sens plus restreint. Le premier mode pense seulement et n’est pas compris, veut seulement et n’est pas incite, agit seulement et ne reçoit aucune impulsion ; le deuxième mode pense et est compris, veut et est incité, agit et reçoit des impulsions ; et le troisième n’est que conçu, ne pense jamais, qu’incité et ne veut jamais, et reçoit des impulsions sans jamais agir. Ce ternaire rappelle dans une certaine mesure la « natura creans et non creata, natura quae creatur et creat, et natura quae creatur et non creat » de Scot Erigène, natures auxquelles il ajoute une quatrième, « natura neque creans nec creata », ou plutôt laquelle il subordonne les trois autres. 7 LES ENSEIGNEMENTS SECRETS DE MARTINEZ PASQUALIS Un des principes de Pasqualis est que chaque homme est né prophète et, par conséquent, obligé de cultiver en lui ce don de vision, culture à laquelle devait précisément servir l’école de ce maître. Dans ce même sens et dans un sens en- core plus hardi, son disciple appelait chaque homme un Christ-né, c’est-à-dire Christ et non Chrétien. A notre époque, ce « réchauffé de notions vieux-testa- ment » doit paraître à beaucoup de gens dépourvu de saveur. L’auteur 7 de la Phénoménologie de l’Esprit n’appelle-t-il pas même — ironiquement — « le don de prophétie » le « don d’exprimer les choses saintes et éternelles d’une manière inintelligible ». Bon mot, il est vrai, mais qui, réfute aussi peu la véritable inter- prétation des choses sacrées de cette façon, qu’il ne donne une explication sensée de ce phénomène. Semblablement, nous voyons nombre de nos magnétiseurs considérer leurs voyants comme des ventriloques stupides, quand ils racontent avec le ventre, comme ils se l’imaginent, des choses trop hautes et trop subtiles pour leur intellect de magnétiseurs 8. A mon avis, il est également mauvais de faire l’apothéose de ces manifestations spirites, de décider dans le trouble, de sui- vre tout igni fatuus, comme une clarté éternelle, et de ne prendre aucune lumière pour la lumière qui n’est point froide, qui ne laisse pas de froid et qui ne donne pas froid. Est-il donc si difficile de discerner, à travers la lueur phosphorescente de cette trouble manifestation spirituelle, les ténèbres radicales intérieures, com- me aussi, à travers cette ardeur passionnée extérieure, l’interne froid de la mort, impression hivernale de Méphistophélès dans le rayonnement d’un soleil d’été ? On ne doit pas, dit Claudius, cesser de respecter le vrai roi sous prétexte qu’il y a aussi les rois de pique et de cœur ; et tu n’es même pas capable d’ôter le pouvoir de te pénétrer à ce Dieu qui inhabite ou cohabite en toi, non parce que tu l’as 7 Il est notoire que ce penseur, dont la dialectique, aussi coupante qu’une lame à deux tran- chants, blesse souvent à la fois l’adversaire et celui qui la manie, fut le premier qui, d’une main audacieuse, alluma le processus de l’auto-incinération de la philosophie moderne — son auto- dafé — et que c’est à lui que nous devons l’intelligence claire de cette angoisse dialectique de l’esprit, dont Kant, à la vérité, a méconnu d’une part l’indestructibilité, mais qu’il a d’autre part reconnue comme un désir curieux de la raison, contre lequel il n’y a d’autre remède que de s’en tenir opiniâtrement à la réalité sensible et de se lancer hardiment, un peu comme ceux qui fuient devant la dialectique qui les poursuit de la mort terrestre, et qui prennent leur crainte de la vie pour la crainte de leur véritable mort. Si cependant il existe une dialectique immanente, au sens le plus strict, c’est-à-dire se dirigeant vers l’intérieur ou vers le supérieur, il y a aussi une dialectique, une action spirituelle, non moins intrinsèque, qui mène vers le bas. C’est aussi la raison pour laquelle les anciens nous représentaient le diable comme un subtil dialecticien. 8 Il est fâcheux, pourrait-on crier à ces prophètes qui se sont eux-mêmes rendus muets, que les prophètes ventriloques soient obligés, comme l’ânesse de Balaam, de témoigner contre vous. Néanmoins, le magnétisme animal se maintient toujours malgré tous ses adversaires, c’est-à- dire malgré les risées, la condamnation et les mépris, qui sont certes plus faciles que la com- préhension. 8 LES ENSEIGNEMENTS SECRETS DE MARTINEZ PASQUALIS fait descendre vers toi, ni parce que tu t’es haussé ou enflé jusqu’à Lui, mais parce qu’Il est librement descendu vers toi . Un des principaux enseignements de Pasqualis est celui-ci : « L’homme a à remplir, dans la région spirituelle, la même fonction corporisatrice, produisant la troisième dimension, que la terre dans la région matérielle, et en ceci on peut trouver la clé du secret de son mélange, de sa complexité et de l’union indissoluble qui en résulte avec la Terre principe. » J’ai exposé ces données dans mes « Principes des Enseignements fondamentaux de la Vie », et, dernièrement encore, j’ai démon- tré aux initiés la corrélation du vieil adage chimique : Vis ejus integra, si conversus fuerit in terram — et du dogme christiano-théologique : Vis ejus integra, si conver- sus fuerit in hominem. Pasqualis fait précéder la fonction médiatrice terrestre de l’homme de deux autres actions élémento-spirituelles, celle du Feu et celle de l’Eau, et il base là-dessus, comme nous le verrons dans la suite, sa théorie et sa pratique théurgiques 0, mais où il faut encore remarquer que, de même que son  De même que l’action mauvaise ne peut pénétrer dans l’élément actif — le feu, l’homme — qu’en passant par l’élément passif — l’eau, la femme — de même l’action bonne ne pouvait prendre que le même chemin. C’est pourquoi la femme, en tant que médium inconscient, ne fait que propager, pour ainsi dire, la bonne et la mauvaise action. Et tous les philosophes mo- dernes confondent l’agent et le médium, lorsqu’ils étendent l’infériorité du médium ou instru- ment, à l’action bonne ou mauvaise qui l’emploie. De cette manière, l’action divine elle-même semblerait en quelque sorte subordonnée à l’action humaine ; tandis que c’est, au contraire, l’instrument ou véhicule de cette action divine qui lui est soumise. Du reste, d’après ce qu’on vient de dire, on peut indiquer le véritable point de vue, d’après lequel la femme, comme le corps, doivent être aussi respectés que redoutés dans nos relations actuelles avec eux. Ne la gâte pas (la femme), car il y a en elle une bénédiction, mais crains-la toutefois, car il y a sur elle une malédiction ! 0 Si la philosophie moderne ignore maintes sciences et maints pouvoirs, qui semblaient im- portants à la philosophie ancienne, on peut aussi considérer, avec Hegel, cette privation comme une preuve de ce qu’a perdu l’esprit humain. Sans doute, cette propagande, comme celle de ses congénères politiques de notre époque, ne se fit-elle si facilement que parce que les unes et les autres ne reposent réellement que sur l’ignorance et le manque de savoir. Ainsi, par exemple, le mépris grossier et révolutionnaire qu’un peuple ou un homme ressent à l’égard d’une institu- tion politique quelconque qu’il ne comprend plus, est-il tout à fait facile, et, pour cet homme ou ce peuple, il advient parfois qu’il prend son interne vacuité d’idée et cette absolue impuis- sance de s’élever de nouveau jusqu’à elle — cette alacrity dans la chute, comme dit Falstaff — pour l’affranchissement qui l’élève au-dessus d’elle. Je dis idée, car ce qu’on nomme esprit de corporation, dans un bon sens, par exemple l’esprit de corps dans la carrière militaire, n’est pourtant que l’idée unique génératrice de substance, dont « le mutisme et l’inefficacité récents », par la faute des hommes, d’abord en haut, puis en bas, amènent partout le désordre inhérent à la décadence asthénique de notre époque. Mais, de même que la religion nous reporte à l’idée de toutes les idées, de même l’Église, en tant que corporation de toutes les corporations, doit leur servir de base et les consolider toutes. C’est aussi pourquoi, depuis sa décadence, toutes ces corporations voient venir leur décomposition, contre laquelle ne pourraient rien toutes les artifices des momies et des régimes. La science financière elle-même a, de nos jours, fait cette  LES ENSEIGNEMENTS SECRETS DE MARTINEZ PASQUALIS disciple Saint-Martin, il attribue à l’élément Air une fonction relativement supé- rieure dans toutes les régions, n’entrant jamais comme élément constitutif dans la formation ; et ainsi, nous verrons dans la suite comment Pasqualis ramène ce ternaire du Feu, de l’Eau et de la Terre, le premier étant le principe et la fin de l’élément, le second le principe de la matière ou corporisation, et le troisième celui de la forme ou corporisation achevée, au ternaire du nombre ou action primordiale, de la mesure ou réaction, et du poids de l’énergie accomplissant et achevant l’action . Si d’ailleurs Pasqualis, aussi bien dans la théorie que dans la pratique, s’attache fortement à ce principe, savoir : « Aucune opération physique ne se produit sans une action spirituelle correspondante », on aurait pourtant tort de penser que sa phy- sique se réduit aux spectres et aux esprits. Mais, par contre, il se montre tout à fait exempt de cette superstition ou croyance moderne en l’abstrait intelligible et en ce misérable « spectre » d’une nature absolument dépourvue d’esprit, de cette croyance en la matière, intelligence limitée, dont on voudrait couvrir la pauvreté de cœur avec une feuille de figuier. Il est du reste utile de remarquer combien l’étude approfondie et la culture plus soigneuse de la matière en elle-même a affaibli à notre époque la superstition ou croyance en cette même matière. Ainsi, par exemple, Kant a déjà rouvert la porte à ces anciens esprits de la nature, connus des alchimistes, en introduisant de nouveau dans la physique l’idée de expérience que seule la richesse de la corporation assure la fortune individuelle, et que, sans celle-là, il n’y en a point de fixe ni de durable. Par conséquent, le principe atomique de la des- truction et du morcellement, expression omineuse des opérations financières modernes, mène ici aussi à la mort.  Cette doctrine se retrouve également dans la doctrine des manifestations. Saint-Martin, par exemple, dit que, de même que la nature nous montre ses substances en germe, en végétation et en production et de même que les hommes correspondent par lettres quand ils sont séparés, se parlent quand ils peuvent s’entendre, gesticulent quand ils se voient, de même les manifes- tations des êtres supérieurs parcourent des degrés analogues : « Tout est tableau dans les œuvres de la pensée. Elle ne se présente jamais à nous que sous une forme sensible, parce que tout est complet dans la source qui la produit. « Cette forme sensible est son écriture. Mais on ne s’écrit que quand on est séparé ! ce sont là les substances en germe… Ne pouvons-nous pas entendre la voix des hommes au milieu des ténèbres et sans les voir ? Ce, sont là les substances en vé- gétation. Mais il y a un troisième degré : nous voyons agir les hommes quand ils sont près de nous et que la lumière les éclaire! Voilà les substances en production… » C’est-ce qui explique en outre comment et pourquoi personne n’a jamais vu Dieu, et c’est la raison pour laquelle le Verbe seul nous le fait connaître, bien que ces paroles : Vous l’avez entendu, mais vous ne l’avez pas vu, aient eu une signification sur l’Horeb, et une autre sur le Thabor. En d’autres termes, Dieu n’est visible et reconnaissable pour la créature qu’en tant que cohabitant en elle, et non en tant que la perhabitant ou l’inhabitant, et, si la crainte de Dieu est le commencement de la science et de la sagesse, l’amour en est la fin. Par conséquent, la science sans l’amour est fausse et imparfaite. 0

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