Les animaux de compagnie et les zoonoses Angela Smitha, Yvonne Whitfielda Résumé • Outre les chiens et les chats, la popularité des animaux exotiques, tels que les geckos, les lézards à barbe et les grenouilles africaines naines s'accroît chez les propriétaires d'animaux. Cela est plus particulièrement significatif chez les enfants. On estime qu'environ 75 % des nouvelles maladies infectieuses sont zoonotiques1,2. Les répercussions de ces deux tendances sont une source de préoccupation pour le secteur de la santé publique. • Ce document donne un aperçu de l'incidence des zoonoses chez les animaux de compagnie, y compris : des études publiées entre 2004 et la fin mars 2011; des documents en anglais qui o incluent l'Amérique du Nord, le Royaume-Uni, la France et l'Australie; des consultations auprès d'intervenants clés tels que des experts et auteurs o canadiens, sur les zoonoses liées aux animaux de compagnie au Canada; une analyse des agences de la santé publique provinciales et territoriales du o Canada, sur les politiques et les protocoles concernant les zoonoses des animaux de compagnie; les tendances sur la propriété d'animaux de compagnie ainsi que les risques de o transmission de maladies, le développement des maladies et les pratiques actuelles de la santé publique relatives aux zoonoses chez les animaux de compagnie; les lacunes des politiques et des interventions, ainsi que les futures possibilités dans o la recherche et dans la collaboration dans les secteurs de la santé publique et vétérinaire. • Les animaux de compagnie demeurent une source principale de nombreuses maladies déclarées et non déclarées : Les éclosions incluent : salmonellose, tularémie, larva migrans cutanée et virus o humain de la chorioméningite lymphocytaire (LCMV). Les animaux de compagnie, tels que les chats, les chiens, les tortues, les poissons o d’aquarium les poussins, les gerbilles, les grenouilles et les lézards ont été associés aux éclosions de maladies zoonotiques aux États-Unis et au Canada. a Ontario Veterinary College, Université de Guelph Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale Les friandises et aliments pour animaux de compagnie, telles que les rongeurs o congelés, les friandises de cuir cru et les aliments crus ont été cités comme sources potentielles de maladies zoonotiques. Il a été constaté que les enfants de moins de cinq ans et les personnes o immunovulnérables ont le risque le plus élevé d'acquérir les zoonoses liées aux animaux de compagnie. Les environnements présentant les plus grands risques de transmission de maladies zoonotiques liées aux animaux de compagnie incluent : les garderies, les écoles primaires et secondaires, les universités, les hôpitaux de soins actifs, les camps d'été pour enfants, les hôpitaux vétérinaires et le domicile. Une mauvaise manipulation des animaux de compagnie et une hygiène des mains o inappropriée ont été identifiées comme les premiers facteurs de risque pour la plupart des infections liées aux animaux de compagnie, p. ex., l'élimination des déchets solides et liquides d'origine animale dans l'évier de la cuisine. Le manque d'examens préalables des donneurs d'organes a été cité comme étant le o facteur de risque de l'éclosion du virus humain de la chorioméningite lymphocytaire en 2005. De nombreuses lacunes en surveillance, réglementation, connaissance et recherche ont été notées au cours de cette étude. • La croissance continue de l'industrie des animaux de compagnie exigera l'intervention des autorités en matière de santé publique, de soins vétérinaires et de réglementation pour atténuer l'incidence des zoonoses des animaux de compagnie sur la population. Ces interventions doivent inclure : une amélioration des systèmes de surveillance actuels, des règlements qui adressent les lacunes existantes dans l'industrie de l'alimentation pour animaux de compagnie, le développement de politiques et de protocoles dans le cadre gouvernemental provincial et fédéral, une éducation du public concernant les risques associés au contact avec des animaux de compagnie et une plus grande collaboration dans les secteurs de la santé humaine et animale. Introduction Les zoonoses liées aux animaux de compagnie sont un problème de santé publique émergent, d'autant plus qu'on enregistre une croissance du nombre de propriétaires d'animaux de compagnie et que les types d'animaux choisis deviennent de plus en plus exotiques. Le contact humain avec les animaux de compagnie apporte la camaraderie et de nombreux avantages psychologiques; cependant, les animaux de compagnie sont connus comme des vecteurs de maladies zoonotiques. Beaucoup de propriétaires ne sont pas conscients des risques que présentent leurs animaux de compagnie et en conséquence, se lancent dans des pratiques d'élevage et d'hygiène qui augmentent la probabilité d'acquérir des maladies. Les voyages internationaux, le commerce des animaux, la croissance démographique, l'urbanisation, le changement climatique, les antibiotiques, les pesticides, les populations croissantes d'animaux de compagnie et l'usage plus fréquent des produits pour animaux ont tous été cités comme étant des facteurs favorisants l'émergence et la réapparition des zoonoses1-4. De récentes éclosions zoonotiques ont contribué à mettre en évidence des facteurs de risques additionnels liés aux animaux de compagnie, tels que de mauvaises conditions d’élevage ainsi qu’une hygiène et des précautions sanitaires déficientes. Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale 2 Ce document donne un aperçu de l'incidence des zoonoses des animaux de compagnie, y compris : la transmission, les facteurs de risque, la population à risque, les environnements à risque élevé et l'augmentation du nombre des propriétaires d'animaux de compagnie. Il fournit également une analyse des activités mises en œuvre par les agences de santé publique et leurs partenaires afin de suivre et d'atténuer l'impact des zoonoses chez les animaux de compagnie. La conclusion offre des recommandations pour améliorer ces pratiques. Les zoonoses chez les animaux de compagnie au Canada Les animaux de compagnie ont été la source de nombreuses infections humaines, telles que la salmonellose, la tularémie, le typhus murin, l'orthopoxvirose simienne, la larva migrans cutanée et le virus humain de la chorioméningite lymphocytaire (LCMV). D'autres infections zoonotiques liées aux animaux de compagnie, à déclaration obligatoire ou non, concernant les animaux de compagnie identifiées au Canada sont indiquées dans les tableaux 1, 2 et 3. Les tableaux incluent les voies de transmission et les incidences correspondantes sur la santé humaine. Actuellement, environ 75 % des nouvelles maladies infectieuses sont zoonotiques; principalement virales et probablement par transmission vectorielle1,2. Entre 2002 et 2010, plusieurs éclosions de maladies zoonotiques à déclaration obligatoire ou non ont été identifiées et associées aux animaux de compagnie (Tableau 4). Un exemple significatif est l'éclosion de l'orthopoxvirose simienne (qui a eu lieu aux États-Unis en 2004), touchant les chiens de prairie et les rats de Gambie. D'autres éclosions, qui ont eu lieu au Canada, aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie, sont présentées dans le tableau 4. Certaines de ces éclosions ont franchi les frontières internationales. Évaluation des risques Les propriétaires d'animaux de compagnie On estime que plus de 50 % des foyers américains sont propriétaires d'au moins un animal de compagnie, tandis que le nombre de commerces d'animaux exotiques ne fait qu'augmenter5. Environ 40 000 primates, 4 millions d'oiseaux, 640 000 reptiles et 350 millions de poissons tropicaux sont commercialisés vivants à travers le monde chaque année6. Aux États-Unis, il existe plus de 72 millions de chiens et presque 82 millions de chats7. L'ouvrage Pet Ownership and Demographics (Propriétaires d'animaux de compagnie et caractéristiques sociodémographiques) de l'American Veterinary Medical Association 2007 montre que les foyers américains ayant des poissons comme animaux de compagnie ont augmenté d'un tiers et que le nombre de foyers ayant des serpents, des tortues, des lézards et d'autres reptiles a aussi augmenté d'un tiers. Au Royaume-Uni, la propriété de reptiles est une tendance à la hausse; il existe plus de propriétaires de reptiles que de chiens8. Encore plus important, un sondage canadien en 2009 a estimé qu'environ 56 % des foyers canadiens sont propriétaires d'au moins un chat ou un chien; 23 % ayant des chats, 20 % des chiens, 13 % des chats et chiens, 12 % des poissons, 5 % des oiseaux, 2 % des lapins et des hamsters et 1 % ayant d'autres animaux de compagnie, tels que des lézards, des chevaux, des cochons d'Inde, des serpents, des grenouilles, des tortues, des furets ou des gerbilles9. Les résultats du recensement 2006 de Statistique Canada ont estimé que plus de 8 millions de chats et plus de 6 millions de chiens vivent dans les foyers canadiens9. De plus, un sondage Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale 3 canadien a révélé que 50 % des chats et 22 % des chiens n'ont pas été chez le vétérinaire l'année précédente9. Les examens cliniques annuels, les vaccinations pour protéger les animaux de compagnie contre la rage et la leptospirose, et les analyses annuelles des selles sont des exemples d'actes vétérinaires de routine et des tests qui permettent de détecter ou d'éviter des maladies chez les animaux de compagnie et diminuent le risque de transmission des maladies au propriétaire de l'animal. Le fardeau des maladies La plupart des éclosions de maladies zoonotiques déclarées concernent des gens qui développent la salmonellose par contact direct ou indirect avec divers animaux de compagnie, les aliments des animaux ou des matières contaminées associées (Tableau 4). Cependant, le véritable développement de maladies associées aux zoonoses est difficile à déterminer en raison de la relation dynamique complexe entre l'agent pathogène hôte et l'environnement. En général, on estime qu'il y a environ 1,4 million de cas d'infections dues aux salmonelles, y compris 400 décès aux États-Unis, annuellement pour tous les cas10. Au Canada, environ 5 500 cas de salmonelloses sont déclarés chaque année11. Un sondage sur la population, effectué par Thomas et al., a estimé qu'il se produit 13 à 37 cas d'infections dues aux salmonelles au Canada pour chaque cas déclaré12. Selon cette étude, les cas associés à des éclosions impliquant des salmonelles résistantes à plusieurs médicaments ont eu des taux d'hospitalisation plus élevés, de l'ordre de 33 à 48 % (Tableau 4). Les sources de pathogènes zoonotiques impliqués dans les éclosions incluaient : des rongeurs de compagnie, tels que les hamsters, les gerbilles et les chiens de prairie; les poussins; les reptiles, y compris les serpents, les lézards, les tortues; les amphibiens; les chats; les chiens; les poissons d’aquarium; et les aliments pour animaux, y compris l'alimentation pour les reptiles et les aliments et les friandises pour les chiens et les chats (Tableau 4). Les études pour identifier le fardeau des maladies attribuées aux animaux de compagnie et aux zoonoses, n'ont pas été identifiées dans la littérature existante. Les facteurs de risque pour la transmission Le risque d'infection chez les humains est difficile à prédire, car il est fondé uniquement sur les cas cliniques des animaux de compagnie. Il est fréquent qu'un animal de compagnie ait une maladie zoonotique mais qu'il soit asymptomatique ou qu'il ne montre aucun symptôme spécifique13-15. Par exemple, un chien qui a un résultat positif pour les salmonelles peut ne pas avoir une maladie clinique. Cependant, ces animaux peuvent contaminer les milieux environnants par l'excrétion fécale intermittente. La manipulation incorrecte des animaux de compagnie, en parallèle avec une mauvaise hygiène des mains, a été identifiée comme étant le facteur de risque principal pour la plupart des infections liées aux animaux de compagnie (Tableau 4). Dans plusieurs éclosions, l'élimination des déchets solides et liquides d’animaux de compagnies dans l'évier de la cuisine a systématiquement été identifiée comme une cause d'infection humaine (Tableau 4), constituant une source supplémentaire d'exposition bactérienne pour l'alimentation et les surfaces de cuisine. Cela a été particulièrement observé pour les éclosions chez les tortues de compagnie. Le fait de ne pas se laver les mains après avoir touché des animaux de compagnie et avant de manger a aussi été observé plusieurs fois (Tableau 4). Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale 4 Les activités telles que dormir avec les animaux de compagnie et la permission d'embrasser et de lécher augmentent le risque et la probabilité de transmission de la maladie; noté en particulier chez les enfants qui manipulaient les tortues. On estime qu'entre 14 % et 62 % des propriétaires d'animaux admettent leurs chiens et chats au lit16. Certaines éclosions concernaient des cas où les propriétaires avaient reconnu qu'ils embrassaient leurs animaux de compagnie directement et inséraient de plus petits animaux de compagnie dans leur bouche (Tableau 4). En 2005, quatre cas du virus humain de la chorioméningite lymphocytaire (LCMV) se sont produits à la suite des transplantations d'organes d'un donneur infecté, qui avait acquis la maladie d'un rongeur de compagnie; trois des receveurs d’organes sont décédés après avoir contracté le virus. En ce qui concerne les donneurs d'organes et de tissus, un dépistage inadéquat sur l'historique d'exposition aux animaux de compagnie a été identifié comme un facteur de risque pour la transmission de cette maladie17. D'autres facteurs de risque, identifiés dans la transmission des zoonoses, incluent l’alimentation des animaux de compagnie avec des aliments crus et des friandises à base de parties d'animaux18-20. Les interventions en zoothérapie pratiquées dans les centres de soins prolongés et dans d'autres centres de soins de santé ont aussi été identifiées comme des facteurs de risque où les animaux de compagnie peuvent acquérir des maladies et introduire des agents infectieux chez les patients hospitalisés18,21,22. Le clostridium difficile, est diagnostiqué comme la cause la plus fréquente de diarrhée antimicrobienne et hospitalière et le staphylococcus aureus (SARM) résistant à la méticilline est considéré comme la cause principale des infections hospitalières, les deux infections étant transmissibles par le contact avec les chiens en zoothérapie21-24. Population à risque Dans une étude cas-témoins similaire, réalisée avec des enfants du Michigan, un lien a été établi entre la salmonellose chez les enfants et leur contact avec des reptiles et des chats23. Les études cas-témoins sur la population réalisées aux États-Unis, en examinant la relation entre les reptiles, les amphibiens et la salmonellose chez les humains, ont permis d'estimer qu'environ 6 % des 1,4 million de cas de salmonellose qui se présentent aux États-Unis chaque année sont acquis auprès de reptiles de compagnie, avec 11 % de ces cas ayant moins de 21 ans25 Les enfants de moins de cinq ans, les individus immunovulnérables2,14,23,24,26-30, les personnes âgées27,28 et les femmes enceintes28 sont considérés comme présentant le risque le plus élevé d'acquisition d'une maladie zoonotique. Cela était particulièrement significatif chez les enfants exposés aux reptiles5,28 et aux poussins28. Le risque parmi ces divers groupes augmente dans les cas de manipulation et d'élevage incorrects. Ce risque peut être minimisé si des restrictions et des pratiques appropriées sont mises en œuvre31. En ce qui concerne les individus immunovulnérables, les toxoplasma gondii, cryptosporidium spp., salmonelles spp., campylobacter jejuni, bartonella henselae, giardia intestinalis, bordetella bronchiseptica et capnocytophaga spp. ont été identifiés comme d'importantes zoonoses chez les animaux de compagnie22. Les individus immunovulnérables peuvent souvent présenter un plus grand risque de contracter une maladie zoonotique, souffrir de séquelles plus sévères, endurer des symptômes à long terme ou subir des complications plus graves ou inattendues par rapport aux individus non immunovulnérables22. Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale 5 Environnements à risque La transmission des maladies zoonotiques a été signalée dans les garderies, les écoles primaires et secondaires, les universités, les hôpitaux de soins de courte durée, les camps d'été pour enfants, les hôpitaux vétérinaires et le domicile (Tableau 4). Pendant l'éclosion de l'orthopoxvirose simienne en 2003, la transmission de la maladie est survenue dans un service de garde en milieu familial et dans un hôpital vétérinaire. Deux des chiens de prairie infectés par l'orthopoxvirose simienne avaient été aussi amenés dans deux écoles primaires; toutefois, aucun cas confirmé n'a été rapporté dans cet environnement32,33. Les environnements d'écoles primaires et secondaires ont été liés à d'autres éclosions sérieuses impliquant des boulettes fécales de reptiles, de poussins et de hiboux34-36. Bien qu'aucune éclosion mettant en cause des foyers de soins de longue durée22 et des établissements de soins n'ait été relevée dans cette recension, ils ont été identifiés comme des environnements à haut risque19,21 aussi bien pour l'acquisition que la transmission de maladies zoonotiques par les animaux de compagnie à l'occasion des visites. Actuellement, il n'existe pas d'exigence de dépistage pour les animaux de thérapie qui peuvent être exposés à des foyers de soins de longue durée avant et pendant les éclosions de maladies infectieuses19. Pendant l'éclosion du syndrome respiratoire aigu grave (SRAS) de 2003 et la pandémie de la grippe A (H1N1) en 2009, des protocoles de quarantaine ont été mis en œuvre pour les cas humains, mais l'incidence des animaux de compagnie et leur rôle éventuel lors de ces éclosions, n'a pas été identifié37,38. Pratiques actuelles Pratiques réglementaires actuelles au Canada Il existe peu de documents portant sur les lignes directrices, les protocoles et les meilleures pratiques de gestion relatifs aux zoonoses des animaux de compagnie au Canada. Un état des lieux relatif aux politiques de santé publique disponibles au niveau provincial et national a été effectué. Aucun document d'orientation relatif à la gestion des animaux de compagnie n'a été trouvé au niveau des provinces. Dans certaines juridictions, il existe des lignes directrices ou des fiches d'information relatives à des maladies spécifiques, telles que les chlamydioses aviaires; toutefois, il n'existe aucune ligne directrice générale particulière sur la gestion des animaux de compagnie. Les lignes directrices sur la prévention des zoonoses dans les écoles, les jardins d'enfants, les foyers de soins de longue durée et les foyers de groupe ou d'autres environnements à haut risque où résident, travaillent ou se divertissent des groupes à risque, étaient trop générales ou contenaient des informations obsolètes et inexactes. Plusieurs références canadiennes non gouvernementales, qui fournissent des informations spécifiques sur les zoonoses des animaux de compagnie, sont résumées dans le tableau 5. Le tableau 6 reprend une compilation des documents d'orientation non canadiens. Au Canada, environ un tiers des zoonoses associées aux animaux de compagnie dans les foyers font partie d'une liste des maladies à déclaration obligatoire, alors que les deux autres tiers n'ont pas à être déclarés (Tableaux 1,2,3). La plupart des pathogènes des animaux pour lesquels un programme de surveillance existe sont en rapport avec les animaux d'élevage, avec peu ou pas de programmes relatifs à la faune1 ou les animaux de compagnie, à l'exception de la rage38. Actuellement, la plupart des zoonoses à transmission vectorielle sont considérées Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale 6 comme présentant un risque faible pour la santé, bien que beaucoup d'entre elles soient désormais considérées comme des maladies résurgentes ou émergentes4,39. Les enquêtes de santé publique de routine sur les maladies infectieuses excluent en général la recherche approfondie sur certains animaux tels que les poissons ou les gerbilles, qui sont perçus comme étant exempts de pathogènes zoonotiques. Il n'existe pas à l'heure actuelle de base de données centralisée enregistrant les cas positifs de maladies infectieuses à déclaration obligatoire ou non. Au Canada, le Réseau canadien de renseignements sur la santé publique (RCRSP) établit un lien entre le Laboratoire de santé animale et l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA), afin de faciliter le partage des données de surveillance relatives à l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) et à la grippe aviaire. Des efforts ont également été entrepris pour explorer d'autres options de partage des données sur la santé des êtres humains et des animaux40. Le Réseau canadien de renseignements sur la santé publique est en cours de développement pour améliorer la capacité à détecter et à répondre aux zoonoses émergentes et minimiser les risques pour la santé publique. Les animaux de compagnie peuvent être des « sentinelles » de surveillance importantes pour les maladies infectieuses émergentes. Au cours de l'éclosion du virus du Nil occidental (VNO) aux États-Unis en 2006, la maladie avait été détectée sur les animaux un mois avant que ne soit déclaré le premier cas chez l'être humain1. Les animaux de compagnie peuvent également être des vecteurs potentiels de maladies émergentes. Pendant l'éclosion du SRAS en 2003, le coronavirus a été identifié comme un vecteur transmissible des civettes aux humains et à d'autres espèces félines41, y compris les chats de compagnie. Malgré cela, la santé publique n'a pas mis en place de surveillance de ces animaux de compagnie relative à leur exposition de ce virus. Les souches émergentes du virus de la grippe H1N1 et H5N1, en liaison avec la pandémie mondiale du H1N1, ont eu pour résultat une reconnaissance accrue des implications des maladies zoonotiques pour la santé publique42. La non-mise en œuvre de la réglementation relative à la vente des animaux de compagnie tels que les terrapins aux oreilles rouges, s'est avérée être un facteur significatif de plusieurs éclosions de salmonellose impliquant ces animaux (Tableau 4). Les difficultés pour la mise en œuvre proviennent de la vente d'animaux par l'intermédiaire de réseaux nouveaux ou non traditionnels tels que l'Internet, les boutiques de souvenirs et les marchés aux puces (Tableau 4). Les secteurs non réglementés (pratiques actuelles) La vente de rongeurs pour l'alimentation des reptiles36, l'alimentation canine à base d'aliments crus19, les aliments pour animaux de compagnie43 et les friandises pour animaux de compagnie44, ne sont pas réglementés. Lors de l'éclosion de la salmonella typhimurium qui résiste à plusieurs médicaments au Royaume-Uni en 2008, l'enquête a été entravée par le manque de réglementation internationale relative à l'importation des rongeurs congelés en provenance des États-Unis8. L'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) réglemente l'importation des aliments pour animaux de compagnie et les produits qui s'y rattachent, afin d'empêcher l'introduction au Canada de maladies animales. Les aliments, les friandises et les os à mâcher pour les animaux de compagnie sont contrôlés dans le cadre du Règlement sur la santé des animaux. Les rappels de rongeurs utilisés comme aliments des animaux de compagnie n'entrent pas dans les compétences de l'ACIA, agence qui a la responsabilité des rappels de produits alimentaires au Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale 7 Canada. De nombreuses lacunes réglementaires existent dans la mise en vigueur de la législation relative à la vente et à la distribution des animaux de compagnie tels que les grenouilles et les tortues45,46. Il n'existe pas de réglementation concernant la fabrication et la vente d'aliments crus dans le commerce pour les animaux de compagnie18. L'ACIA n'a pas d'obligation de rappeler certains types de produits alimentaires pour les animaux de compagnie. Dans le cadre des enquêtes sur les éclosions, les aliments contaminés pour animaux de compagnie, tels que les friandises et la viande crue pour les animaux, associés à des cas confirmés de maladies humaines, ont été rappelés sur la base de ces maladies signalées et non sur le fait que ces produits étaient contaminés. La réponse aux problèmes impliquant des aliments pour animaux de compagnie se fait au cas par cas et non en fonction de politiques ou protocoles établis. Lacunes et recommandations De nombreuses lacunes en surveillance, réglementation, connaissance et recherche ont été notées au cours de cette étude. Surveillance Les zoonoses ne sont pas identifiées et gérées de façon adéquate par les agences de santé publique au niveau local, provincial ou territorial et national. En effet de nombreuses maladies importantes ne font pas l'objet d'une déclaration obligatoire et les cas ne sont pas reliés de façon appropriée aux expositions aux animaux de compagnie et à leurs aliments. Ce problème continuera d'être classé dans les priorités secondaires tant qu'il ne sera pas possible de quantifier de façon appropriée le fardeau de la maladie associé aux zoonoses des animaux de compagnie. Le Canada a une procédure de surveillance relativement solide pour les maladies à déclaration obligatoire telles que la rage et la grippe A; l'information est collectée et fusionnée. Des mécanismes similaires sont nécessaires pour les maladies à déclaration non obligatoire, car les deux tiers des zoonoses tombent dans cette catégorie. Il n'existe pas à l'heure actuelle de programme de surveillance active sur les maladies zoonotiques des animaux de compagnie ou syndromique, mis en pratique par la santé publique. L'information relative aux animaux de compagnie ou à leurs propriétaires n'est pas collectée systématiquement par les praticiens de la santé publique. Cette information, si elle était recueillie, permettrait d'établir plus rapidement un diagnostic. Tous les animaux de compagnie doivent être examinés, même s'il n'existe pas d'antécédents de transmission de maladie impliquant un animal en particulier. Même s'il n'est pas possible de relier les résultats de laboratoire à un animal spécifique dans un troupeau, il est tout à fait envisageable que des cliniques vétérinaires pour animaux de compagnie réalisent ce type d'analyse pour les animaux de compagnie. Une plus grande collaboration entre les praticiens de santé publique et les vétérinaires permettrait de créer un système de surveillance « sentinelle » pour les maladies zoonotiques47. Les médecins, les vétérinaires et les praticiens de la santé publique sont particulièrement bien placés pour collecter l'information et les résultats de laboratoire susceptibles d'être analysés et interprétés, afin d'identifier les tendances des zoonoses des animaux de compagnie. Cette information peut être utilisée pour éduquer le public sur les mesures à prendre pour éviter les Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale 8 maladies et améliorer la santé22,30. Ceci est une occasion manquée, qui est particulièrement importante pour les individus à haut risque22. Il n'est pas courant pour les vétérinaires d'évoquer ou de documenter l'état de santé du propriétaire de l'animal de compagnie et comment cela pourrait accroître le risque d'infections zoonotiques. Mesures réglementaires L'identification, la gestion et la prévention des éclosions de maladies zoonotiques, telles que celles impliquant les aliments et les friandises pour les animaux de compagnie ne rentrent pas dans le cadre réglementaire national et international. Le développement et la mise en vigueur de la législation dans ce domaine permettraient de diminuer le risque de transmission des maladies et le fardeau de maladie pour les humains. La législation provinciale sur la quarantaine devrait inclure la mise en quarantaine des animaux de compagnie lors des éclosions de maladies zoonotiques. Des politiques de santé publique sont nécessaires pour réduire les risques de zoonoses des animaux de compagnie; toutefois, elles doivent être équilibrées de façon à tenir compte des avantages des liens entre humains et animaux, qui ont prouvé être bénéfiques pour la santé19. Les liens entre humains et animaux pourraient influencer de façon importante la volonté du public d'appliquer toute nouvelle réglementation gouvernementale afin d'éviter la transmission des maladies2. Connaissances Des lacunes de connaissances ont été constatées au niveau des propriétaires et des vendeurs d'animaux de compagnie, qui ne comprennent pas quels sont les risques de maladies associés à ces animaux45,46. Le manque de prise en compte par le personnel des garderies, les enseignants et les praticiens de la santé publique du dépistage et de la gestion sécuritaire des animaux et de leur relation avec les risques de transmission de maladies est également une lacune de connaissance identifiée23,30,33,48,49. Les praticiens de la santé devraient être encouragés à fournir un niveau d'information et d'éducation plus important à leurs patients, afin de lutter contre le manque de connaissance du public sur les zoonoses associées aux animaux de compagnie. Cela doit aussi inclure une collaboration avec les vétérinaires qui ont une connaissance étendue des maladies zoonotiques et de la médecine comparative5,47. En outre, les vétérinaires doivent avoir un minimum de compréhension de la santé et du bien-être du propriétaire des animaux de compagnie et des membres de sa famille, afin d'éviter ou d'atténuer les risques futurs éventuels pour la santé. Les organismes partenaires, les intervenants clés et toutes les autres parties intéressées par les politiques relatives aux zoonoses des animaux de compagnie, doivent être invités à participer à des pratiques communes dans le domaine de la santé publique. Il s'agit d'un groupe de pairs qui partagent une préoccupation, un ensemble de problèmes ou une passion pour les questions relatives aux zoonoses des animaux de compagnie et à la santé publique. Les praticiens de la santé humaine et animale ont reconnu la nécessité de collaborer et d'adopter le concept « Une seule santé » qui identifie les liens existants entre la santé humaine, la santé animale et les domaines de la santé de l'écosystème5,47. Le concept « Une seule santé » est une démarche d'équipe qui peut mener à une meilleure compréhension des infections associées aux animaux de compagnie et être un cadre de travail effectif et efficace pour la santé, afin d'améliorer les efforts cliniques pour détecter et éviter les maladies chez l'homme5. Cette amélioration des communications pourrait susciter une évolution des politiques vers le Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale 9 concept « Une seule santé » et aider à combler certaines des lacunes de communication identifiée au niveau de la surveillance, des secteurs réglementaires et de la recherche, ainsi que les lacunes relatives à la connaissance. La recherche Il existe peu de publications sur les enquêtes concernant les éclosions de zoonoses des animaux de compagnie au Canada. Un certain nombre de facteurs peuvent permettre d'expliquer ce fait : les problèmes juridiques, la rotation du personnel, les problèmes au niveau des ressources humaines, ainsi que d'autres problèmes de bureaucratie dans un certain nombre d'agences gouvernementales. La communauté canadienne de la santé publique canadienne devrait être encouragée à documenter et soumettre un plus grand nombre d'articles de journaux, à partager le savoir acquis et à informer chacun d'entre nous de ses expériences. Les problèmes émergents, tels que la vente d'animaux de compagnie sur l'Internet, le commerce international, l'efficacité des rappels et l'incidence sur la santé des aliments crus pour les animaux de compagnie, requièrent plus de recherche. L'information fondée sur les éléments probants relatifs aux tendances des zoonoses des animaux de compagnie et les risques doit susciter un changement de la politique dans le domaine de la santé publique. Une base de données centralisée à l'échelle nationale, la collecte et le partage des données sur toutes les zoonoses, permettrait d'avoir une meilleure compréhension de leur incidence et de leur prévalence. Ce savoir permettrait de développer des stratégies de gestion des risques pour la prévention des maladies zoonotiques. Des procédures de gestion des risques doivent être développées au niveau des centres et institutions de soins de santé, des écoles et des garderies, et du public en général. Les autres groupes avec lesquels cette information devrait être partagée incluent les organisations de protection des animaux, les centres d'abris pour les animaux, les maisons de toilettage et tous les autres centres susceptibles de servir d'interface entre les animaux de compagnie et leurs propriétaires. Ce savoir doit également être converti en politiques et procédures aux divers niveaux gouvernementaux. Conclusion Le nombre de propriétaires d’animaux de compagnie continuant de croître, les propriétaires et les responsables de la santé publique continueront d'être confrontés au développement des problèmes liés aux zoonoses des animaux de compagnie. Des stratégies préventives doivent être mises en place, afin de garantir la réduction des risques issus de ces maladies et de l'incidence de celles-ci sur la santé publique. Il faut envisager d'améliorer la surveillance des maladies à déclaration non obligatoire, ainsi que la surveillance active des animaux de compagnie liés à des cas de maladies confirmés. Les autorités réglementaires doivent s'intéresser aux lacunes actuelles relatives à l'industrie des aliments crus pour animaux de compagnie. De nouvelles stratégies doivent être développées pour contrôler la vente et la distribution des animaux de compagnie par des réseaux non traditionnels, tels que les marchés aux puces et l'Internet. Les agences de santé publique, ainsi que l'industrie des animaux de compagnie, doit informer le public sur leur manipulation et les risques d'acquisition de maladies, particulièrement parmi les enfants de moins de cinq ans, les personnes âgées, femmes enceintes et les personnes immunovulnérables. Des politiques de santé publique sont également nécessaires dans un certain nombre d'environnements à haut risque, pour diminuer les risques de transmission de maladies associées aux animaux de compagnie. Ces environnements incluent, sans s'y limiter, les garderies, les écoles et les centres de rééducation Janvier 2012 Centre de collaboration nationale en santé environnementale 10
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