~ 1 ~ Le Dao de Philippe Sollers : Profession de Moi Tapages et Dérapages J’ai fait la magique étude J’ai fait la sinologique étude Du bonheur, qu’aucun n’élude De Sollers, qu’aucun ne dénude (Rimbaud, en exergue de Studio) Damien Taelman©, mai 2017 Dans un article récent (Le Mouvement Sollers ou L’Art de dérober les joyaux de la poésie chinoise, suivi du Système Sollers et ses satellites), j’ai pileface démontré que, dans Nombres (Éd. du Seuil, 1966), Philippe Sollers a allégrement plagié le Daodejing, 道德經, Livre de la Voie et de la Vertu, de Lao zi, 老子 (604-531), traduit par Lodewijk Duyvendak (1889-1954). Et j’ai mis au jour que, dans Mouvement (Éd. Gallimard, 2016), Il a trafiqué sans vergogne de nombreux extraits de l’Anthologie de la Poésie Chinoise, parue en 2015 dans la Bibliothèque de la Pléiade sous la direction du réputé sinologue Rémi Mathieu — dans les deux cas, ce Gentleman Braqueur s’est abstenu de toute référence aux œuvres-sources pillées et Il n’a pas eu non plus la décence de mentionner les noms des nombreux traducteurs dévalisés. Dans un autre article (À France moisie écrivains rancis), j’ai recensé quelques numéros de L’Infini dans lesquels des enfants de chœur subjugués portent leur Saint Patron aux nues. Le n°116 Lui consacre 50 pages de louanges sirupeuses sur les 125 qu’il compte ; les n° 114, 115 et 134 insistent et tournent encore plus en rond autour de Ses Dires ; et le n°114 nous impose un entretien spontané-sic de 17 pages truffées d’éloges ubuesques à faire pâlir le Fils du Firmament. La tradition se perpétue dans le dernier opuscule de Sa Revue fétiche (n°138, hiver 2017) — flagorneurs et adulateurs, tel coqs et chiens du roi Huai An, y font moult courbettes, s’age- nouillent en bêlant béatement leurs bigotes oraisons et se prosternent en frappant le sol du front devant l’autel du Céleste Diamant. Une multitude de sentences parfumeuses tirées de Ses Œuvres y sont disséminées dans divers manifestes Le glorifiant, et plusieurs pages dithy- rambiques frelatées par un disciple désireux d’assurer son salut en plaidant Sa béatification sont dédiées à l’Éveilleur, le Roi-Sollers régnant sur nos temps fallacieux, le Druide qui à l’écoute du Confuciel nous la baille belle à répétition, l’Élu facétieux à la Langue de Feu bien fourchue par qui la vérité descend jusqu’à nous. Et puisque Sa dive tronche mérite elle aussi d’être encensée et partout affichée, Il s’admire dans la posture dévote du Roi Image en extase devant Sa Copie (p. 79, voir ci-dessous), puis Il prend la pose du Parnassien grippé en train de peaufiner Son manuscrit (pp. 75,84,93), avant de jouer au Marabout déchiffrant la Musique des sphères en fat dièse majeur (p. 98). Bref, me murmure un modeste idéogramme d’outre- tombe, notre Prophète en égoguette s’adonne à l’autolâtrie et ne sait plus trop quelles épiphanies invoquer quand vient le temps de faire adorer Son Effigie à gogo et de lécher la buée de Son Souffle sacré sur Ses Miroirs Sollers. « Il est mal vu, bas et vulgaire de s’exhiber » (Henri Michaux, Idéogrammes en Chine (1975), in Affrontements, Éd. Gallimard, 1986, p.105) ~ 2 ~ La démesure n’étant pas comble, ce Boucanier à la pige n’hésite pas non plus à emprunter le masque du Critique à gage et nous propose un inédit apocryphe — Son Ego mal bridé s’y réincarne en effet dans un impérial Valet de cœur surnommé Yuning Liu, servile de pied en cap et occidenté au point d’écrire son nom à l’envers, appelé à la manœuvre pour brandir l’étendard de Son Verbe et célébrer, dans une épître de 41 pages baptisée La Chine chez Sollers, les fulgurantes affinités de Sa Psyché avec la pensée chinoise. À grand renfort de publicitations extirpées de Ses Romans Drame et Passion Fixe, notre valeureux Perce- Muraille y va de Son credo et brame à tous vents qu’Il nourrit l’ambition de « faire rentrer le chinois dans le français, le français dans le chinois, l’Occident dans l’Orient, l’Orient dans l’Occident. » (p.11) Nothing less darling-a-ling ! Cette grand-messe solennelle fleure la tambouille du Chef et se révèle un cancan du même acabit que Contre-Attaque de Philippe Sollers fait pschitt… Afin de mieux nous vendre Ses salades, notre Tonton Enfumeur embrigade le Goethe du Divan en lui suçant la cervelle à profusion : « L’Orient et l’Occident ne sauraient désormais être tenus séparés ». Mais par quels manèges et machinations, avec combien de ritournelles farfelues et de galipettes kungfucéennes pourrait-Il marier ces deux cultures et leurs langues aux antipodes, alors qu’Il connaît à peine le chinois ? Certes, notre Girouette à clochers variables n’hésite pas à pirater les traductions des grands classiques pour enjoliver et gonfler Ses Écrits, mais les justifications étymologiques à la noix avancées ici dans le but d’établir formellement Sa Sainte Sinité nous rappellent Ses fourvoiements d’antan — dans une feuille de chou chinois intitulée De la Contradiction (Tel Quel, 1971), ce Gourou ès pirouettes n’est- Il pas allé jusqu’à inventer une « roue qui tourne », 轮, dans le caractère 论, « lun », « traité » (cf. Le Mouvement Sollers) ! Or voici que dans La Chine chez Sollers, p. 36, Solliu récidive et commente Passion Fixe (Éd. Gallimard, 2000) comme suit : Une autre grossière fourberie de Solliu est ici saisie sur le vif — le caractère 兑, « touei » (ou « dui » dans la transcription officielle), n’est pas la clé du caractère 悦, « joyeux », ni celle de 说, « parler ». Une clé (部首, « bu shou ») est littéralement la « partie-tête », ou si l’on veut le « radical », donc le monème qui renferme souvent le champ sémantique du vocable con- cerné. La clé de 悦, « joyeux », est 心, « xin », « cœur », et s’écrit忄lorsqu’elle a cette fonction, comme par exemple dans le caractère 愧, « honte »/« confus ». Quant à 说, « parler », sa clé est bien entendu le monème 言, « yan », « parole », qui s’écrit 讠 quand il est dans cette position en chinois simplifié, comme dans 训, « xun », « instruire »/« enseigner», ou dans 论, « lun », « traité ». Tout cela est d’une logique enfantine : ne dit-on pas « avoir le cœur joyeux », ou « en avoir le cœur net » ? En outre, lorsqu’on est honteux, le cœur se tait… comme devrait le faire plus souvent notre Polichinelle à froufrous ! Quant à « expliquer » ou « instruire », il va de soi que le respect et le discernement des signes de la langue écrite est de mise dans la transmission du savoir et de la culture ; et il saute aux yeux qu’un traité, 论, consigne une parole donnée et non pas « une roue du tourne » ! Bref, le cœur (忄) et la parole (讠), sont bien les clés respectives de 悦 et de 说, et non pas, comme le prétend Solliu, 兑, « touei ». Dans quel but notre Laudauteur bicéphale maraude-t-Il calame en main dans les rizières d’un idiome qu’Il ne maîtrise pas ? La réponse est d’une affligeante banalité : le rôle de l’Écrivant papillonnant dans les bocages et plates-bandes de l’art ne suffit plus à Son Âme-Avide-d’une- Nobelle-Apothéose et Il aspire depuis des lunes au titre de Très-Zunique-et-Zailé-Écrivain naguère engendré par le Vénérable-Saint-Chrême-de-Charlequin inondant l’Ineffable-Dame- ~ 3 ~ de-Jade-Pourvoyeuse-de-Fils, laquelle dès Sa na issance dansa la sarabande, Lui fit de Son cordon ombilical une couronne de nénuphars et Lui remplit le nombril d’une pincée d’irizibles granules de compétence en la matière. En effet, selon Ses aveux sériels, notre Apparatchik n’a fait que deux ans de chinois et décrypte cette écriture en Se laissant guider par la nervure des caractères et la modulation des tons ! Son violon d’Ingres manque de résonance et Il joue souvent faux de tout cœur (心, « xin ») et avec une ferveur émouvantarde — dans Mouvement (cf. Le Mouvement Sollers), ce Maotamore des grands Boulevards de la Rive Gauche va même jusqu’à relancer la propagande de Son analyse dévoyée du terme « contradiction » ! Remâcher les âneries de Mao en Se basant sur des traductions antérieures ou sur le mot-à- mot d’un complaisant camarade vaut son pesant de cacahuètes et semble repaître l’Han brayant en Lui, mais repérer les clés enfouies sous roche de termes ancestraux exige une solide érudition, laquelle Lui fait défaut quand il faut corriger les épreuves de Son Sosie Solliu. Au début du siècle, le n° 90 de L’Infini (Printemps 2005) fut entièrement consacré à la Chine et obtint les contributions de sinologues reconnus : Rémi Mathieu, Charles Le Blanc, Anna Ghiglione, Stéphane Feuillas, Romain Graziani et Rainier Lanselle. Jim et Julia y allèrent de Leur grain de sel impérieux, question d’accrocher Leur nom au Milieu de l’affiche et d’affirmer que le Comité Central de Lecture ne saurait se passer de Leurs aveuglantes lumières. Les dommages furent circonscrits, puisqu’on y recyclait à la bonne franquette des textes déjà publiés, une pratique des plus courantes dans cette Revue confidentielle. Chose certaine, il aurait été sage que ce Sérénissime Ponte de Collection toutes saisons soumette Le déroulement du Dao (2003, repris in extenso en 2005) à l’un des maîtres ci-haut mentionnés, lorsqu’Il avance (p. 59) : Et en effet nous retrouvons, imprimé en très gros sur la couverture de Son Livre, le carac- tère 法, « fa », « loi ». Mais un signe cacardant sous un titre ne fait pas de ce Libertintin en Chine un sinologue himalayen ! La clé de l’idéogramme de «France» n’est pas « fa », mais «eau », 氵, (法). La clé de « fa » est constituée des trois petits traits verticaux qui ressemblent à une éclaboussure sur la partie gauche du caractère ; elle est composée de deux petits traits descendants appelés « ce », 侧, « incliné », ou « dian », 点, « point », et d’un trait oblique montant vers la droite qui se prononce également « ce », mais s’écrit différemment, 策 (on dit aussi « tiao », 挑, « trait droit incliné montant vers la droite »). Le caractère « eau », par ailleurs, lorsqu’il est écrit isolément, se prononce « shui », 水 ; cependant, lorsqu’il sert de clé dans un agrégat, il s’écrit 氵et n’a point d’autre sens. Dans le cas de « fa », 法, « loi », la clé signifiant « eau » est accompagnée à sa droite d’un autre caractère simple, 去, « qu » et se traduit par « aller »/« se déplacer d’un lieu à un autre ». Ce dernier caractère est à son tour un agrégat composé de deux parties ; au-dessus il y a « tu », « terre », 土, et en dessous « si », «privé »/«secret», 厶. Donc, 氵+ (土+厶) 去 = 法, « fa » — d’un point de vue sémiologique, ce caractère a de quoi faire courir et discourir lin- guistes et avocats, car il lance un avertissement à tous les Fa-Monnayeurs : « la loi protège l’eau traversant cette terre privée » ! ~ 4 ~ La polysémie et l’étymologie idéographique des ca ractères concourent à la richesse inouïe de la langue chinoise. Ce sont d’ailleurs ces particularités qui ont conduit notre Malin Imaginaire à faire un rapprochement de mauvais aloi : « fa guo », 法国, « France », « le pays de la (des) loi(s) ». Or « fa » (loi) n’en étant pas la clé, ce contresens se veut-il un pied de nez ou une révérence à Montesquieu ? Comme nous l’avons vu, la clé de « fa » est « eau », alors que celle de « guo », 国, « pays », est 囗, « wei », qui signifie « entourer »/« encercler » le « jade », 玉, « yu », un attribut du « roi », 王, « wang » — les trois traits représentent le Ciel, la Terre et l’Homme, le trait vertical qui les unit et les fait communiquer étant le Roi. Il faut savoir que « France », « fa guo », 法国, a d’abord été traduit par « fa lan xi », 法蘭西, où nous avons affaire à un emprunt sonore à trois caractères sonnant comme « France » … prononcé à l’anglaise ! Bref, le « fa » du caractère « loi », 法, n’a absolument rien à voir avec le fa 法, de fa guo : ce « fa » bien spécifique sert de préfixe phonétique pour indiquer la pronon- « », ciation approximative de ombreux mots étrangers (grecs, latins, italiens, anglais, arabes, « » français, etc.) importés en chinois. Je me permets de fournir quelques exemples. La transcription phonétique de « alpha » est « a er fa » (阿尔法), celle des papes Boniface « bo ni fa si » (博尼法斯), celle de la ville Buffalo « bu fa luo » (布法罗), celle de Lafayette « la fa yi te » (拉法夷特) et celle de l’ex-leader pales- tinien Arafat « a la fa te » (阿拉法特). Notons ici la superbe traduction de ce nom de famille : le chinois étant dépourvu du son « R » (comme dans « arabe »), le son « L » s’y est substitué, de sorte que « Ara » a été rendu avec les caractères « a la », 阿拉, qui signifient justement Allah… bonne vôtre culturelle ou humour au second degré ? Dans toutes les transcriptions des noms propres susmentionnés, « fa », 法, est un simple préfixe sonore et n’a pas le sens de « loi », pas plus que dans le mot « France », « fa guo », 法国. Admettons par ailleurs que la polysémie et la polyphonie de la langue chinoise ne font pas toujours rire, notamment en Afrique, qui se dit « fei zhou », 非洲. L’étymologie de « fei », 非, renvoie à « ailes d’un oiseau » ; mais depuis l’antiquité et encore de nos jours, le caractère « fei » exprime aussi la négation/ne pas être et correspond alors à nos préfixes privatifs « non- » et « in- ». Or « zhou » (洲) signifie continent ; « fei zhou » pourrait donc se traduire par le « continent qui n’est pas »/« qui n’existe pas », le « non-continent »/« l’incontinent »… Deux définitions de « clef ou clé » dans le Grand Robert nous confirment que Solliu, s’Il avait pris la peine de bien Se renseigner, ne Se serait pas enfoncé dans les marais de la fa-cilité : « Dans l'écriture chinoise, Élément d'un caractère complexe, corres- pondant à une classe à l'origine sémantique, à une « rubrique destinée à faciliter (…) une recherche pratique dans les lexiques et, sans doute, un apprentissage plus aisé de l'écriture. » (Marcel Granet, La Pensée chinoise, p. 47). « (Les caractères chinois sont) formés d'un élément pris phonétiquement et d'un autre élément indiquant en gros l'ordre d'idées auquel le mot se rapporte. Le premier élément est la « phonétique » et le second la «clef». Ainsi sǎng « gosier » est formé de sāng « mûrier » pris phonétiquement avec addition de la clef kǒu « bouche ». » (P. Pelliot, in Notices sur les caractères étrangers anciens et modernes, 1927, cité par Viviane Alleton, l'Écriture chinoise, p. 34.) Pour améliorer l’indicateur clé de Sa performance, notre Passe-Partout élimé aurait aussi pu feuilleter Clefs pour la Chine de Claude Roy, dont la couverture et l’endos arborent les clés des caractères. Pourquoi n’a-t-Il pas consulté ce livre paru dans Sa propre maison en 1953 ? Plutôt que de S’envoyer en l’air avec Sa profe dans l’espoir de S’abreuver à la source du mandarin en reniflant son abricot ou sa fleur de peau, Il aurait dû S’initier au maniement de ces clés qui en sont le sésame ! L’on peut vérifier ci-dessous que le verdict de l’Académie Royale est sans appel : « fa », 法, n’y apparaît pas, pas plus que « touei », 兑. ~ 5 ~ La langue chinoise cache de nombreux pièges, faux amis, attrape-nigauds et nids-de-poule, et ce Sinéchotier à Temps Perdu n’en a qu’une vague connaissance, malgré Son acharnement à nous convaincre du contraire. Depuis Nombres (1966) jusqu’à L’Infini n°138 en passant par Lois (1972), Passion Fixe (2000) et Mouvement (2016), sans oublire — « Vous êtes un néolo- gisme ? », Lui susurra le nez retroussé et la bouche en cœur (心) Josiane Lagneau lors d’un entretien-sic dans Le Monde du 4 avril 2016, ce à quoi ce Cajoleur de sornettes répondit : “ Oublire ”, puisque plus personne ne sait ce qu’il lit. » — sans oublire donc ce grotesque éditorial de Tel Quel (n°59, Automne 1974) où Il miaule que « L’étude de Mao est d’ailleurs ici l’impératif numéro un », notre Tigre en papier, lassé du Petit Livre Rouge, picore les classiques en S’emmêlant souvent les pinceaux, mais Il a fini par admettre une évidence aussi vieille que Ses premiers pillages de traductions et concéder que la Fosse Interdite du Grand Timonier abrite au moins autant de cadavres que les charniers creusés par la démence combinée de Hitler et Staline. Côté politique Il est un Trublion Échaudé et côté linguistique Il demeure réfractaire à tout enseignement (训), comme l’atteste Son malencontreux Déroulement du Dao ci-haut cité — Il n’a toujours pas consulté un psynologue de renom et ignore que la clé de l’idéogramme ornant le titre fanfaron de Lois, constitutive du caractère qui désigne Son propre pays, est « eau » ( 氵), comme dans Bordeaux, 波尔多, « bo er duo », « vagues nombreuses », où l’eau monte à ras-bord ! Ce Marco Porigolo nous mène en bateau de par des lagunes embourbées et pérore sur le Dao en dissimulant Ses sources avec force louvoiements et entourloupettes, Il larmoie流泪 à l’envi bien calé dans Sa gondole allant à vau-l’eau et avec Sa gueule de bois laqué des lendemains de fête en queue de poisson fustige avec suffisance les intellos bouchés qui ne perçoivent pas Son « ouverture chinoise » par où s’immiscent des déchets et débris à tire-larigot. Le toc et Ses tics se croisent dans ce carnaval d’incongruités, démêlez-les si le temps qui file toutes voiles dehors ne vous a saignés à blanc, rongés à l’os ou rendus dingos ! « Dans tous mes livres, il y a cette ouverture chinoise, et ce qui m’amuse le plus, c’est qu’en général ce n’est jamais repéré dans aucun article. …Quelques érudits ont pourtant déjà repéré dans mes livres cette insistance depuis fort longtemps sur la Chine, probablement très étrange chez un écrivain occidental. (L’infini n° 90, 2005, p. 164, Déroulement du Dao, 2003) ~ 6 ~ Une fois de plus, Jim l’Éponge étaie Son Mythe menaçant ruines à coups de contrevérités tonitruantes. Est-il vraiment si « étrange chez un écrivain occidental » de s’intéresser à la Chine ? Question de Lui rafraîchir la mémoire et de n’oublire personne, écrivons sur les bancs publics et sur tous les toits que de nombreux écrivains (non sinologues comme Lui !) ont bien avant Son fabuleux Avènement traité de la Chine, sans ressentir le besoin de crier haut et fort leur sinocompatibilité afin de nous convaincre de la qualité de leurs écrits inspirés par elle. Chacun à sa manière, ces auteurs sinophiles ont cherché à comprendre ce lointain pays en évitant la grandiloquence, les expédients éditoriaux, les stratagèmes mimétiques et autres grignotages sinologiques déployés par notre Gardien du Temple Sollers. La liste est longue et non exhaustive : Charles-Augustin de Bassompierre Sewrin, Les Deux magots de la Chine, 1813 ; Honoré de Balzac, La Chine et les Chinois, 1842 ; Jules Vernes, Les Tribulations d'un Chinois en Chine, 1879 ; Paul Claudel, Connaissance de l'Est, 1900, Partage de Midi, 1906, Petits poèmes d'après le chinois, etc.; Pierre Loti, Les Derniers jours de Péking, 1901 ; Léon Byram, Mon ami Fou-Than, 1910 ; Abel Bonnard, En Chine, 1920-21 ; Saint-John Perse, Anabase, 1924, et ses Lettres d’Asie de la même époque ; Albert Londres, La Chine en folie, 1925 ; Roland Dorgelès, Sur la route mandarine, 1929 ; André Malraux, Les Conquérants, 1928, La Condition humaine, 1933 (ô maître Goncourt sur son arbre perché, qui depuis la nuit des temps n’a de cesse de Le titiller !) ; Marguerite Yourcenar, Comment Wang- Fô fut sauvé, 1938 ; Henri Michaux, Un barbare en Asie, 1933, Un barbare en Chine, 1937, Idéogrammes en Chine, 1975 ; Claude Roy, La Chine dans un miroir, 1953, Sur la Chine, 1979 ; Teilhard de Chardin, Le Phénomène humain, 1955 ; Simone de Beauvoir, La Longue Marche : Essai sur la Chine, 1957 ; Alain Peyrefitte, Quand la Chine s’éveillera…, 1973 ; Lucien Bodard, La Chine de la douceur, 1957, La Chine du cauchemar, 1961, Le Plus Grand Drame du monde : La Chine de Tseu Hi à Mao, 1968, Monsieur le Consul et Le Fils du Consul, 1973-75, Le Chien de Mao, 1998. Je voudrais mettre en pleine lumière Mouvements (Éd. Gallimard, 1951, non paginé), d’Henri Michaux, un long poème accompagné de 64 planches, comprenant chacune entre 3 et 24 dessins à l’encre de Chine. Des graphies archaïques y surgissent d’un très lointain passé : « ren » (人, 亻, homme), « nü » (女, femme), « da » (大, grand), « tian » (天, ciel), « mu » (木, arbre), « shui » (水, 氵, eau) etc. Ces calligraphies de l’auteur renvoient aux 64 hexagrammes du Livre des Changements (Yi King ou Yi Jing) — curieusement, notre Sinollers n’y fait aucune allusion dans Son banal Mouvement au singulier ; et lorsque, dans Passion Fixe, Il introduit en contrebande de longs passages du Yi King-Kong, envieux de l’aura de ce poète Il reste muet sur cette œuvre capitale. Ci-dessous deux des 64 planches (réduites) : ~ 7 ~ « Michaux connaissait bien la Chine — il y avait voyagé — et connaissait sa culture. A-t-il pensé au lien qui unit, pour un Chinois, peinture et poésie ? Sur le moment, je n’y ai pas songé et je n’ai jamais osé, plus tard, lui poser la question. Je crois qu’il avait perçu, très tôt, ce lien : sa peinture ressemble souvent à des idéogrammes, une espèce d’écriture qui évoque aussi le mouvement de la vie qui va naître. » (Zao Wu-Ki, Autoportrait, avec la coll. de Françoise Marquet, Fayard, 1988, p. 80) Gide s’en remet au jugement de Louis Cheronnet qui, dans sa préface à l’un des recueils de poèmes et de reproductions de dessins de Michaux, affirme : « [Michaux]… invente des « ectoplasmes », des formes, animaux, végétaux, qui offrent un rapport encore plus lointain avec la réalité que les lithographies ou les pastels d’Odilon Redon, moins viables encore. » (André Gide, Découvrons Henri Michaux, Éd. Gallimard, 1941, p. 44) Le poète Norge, camarade de Michaux au collège Saint-Michel à Bruxelles en 1911, témoigne qu’à douze ans déjà il était fasciné par les caractères. Cet attrait était si intense que, en 1938, il conçut un projet avancé de « Rudiments d’une langue universelle idéographique contenant neuf cents idéogrammes et une grammaire. » (Henri Michaux, Œuvres Complètes, tome 3, Éd. Gallimard, Bibl. de la Pléiade, 2004, p.1656, note 3). Et il est explicite à ce sujet dans sa postface de Mouvements : « Mais les signes ? Voilà : l’on me poussait à reprendre mes compositions d’idéogrammes, quantité de fois repris déjà depuis vingt ans et abandonnés faute de vraie réussite, objectif qui me semble en effet dans ma destinée, mais seulement pour le leurre et la fascination. » Bref, il ne fait aucun doute que plusieurs des dessins de Mouvements sont directement inspirés d’idéogrammes archaïques. Enfin, bon sang et sens ne sachant mentir, le Roy sinophile possède les bonnes clés d’analyse : « Ces signes semblent faire allusion aux idéogrammes chinois, mais [Zao] Wou-Ki a recours en fait à d’autres écritures, aujourd’hui illisibles pour la plupart, les caractères pictogrammes et signes de la préhistoire chinoise, les « écritures » que les fouilles ont exhumées, datant du néolithique ou de l’âge de bronze. Davantage que la calligraphie chinoise, dans ces ruis- sellements de signes dont le torrent semble balayer Zao Wou-Ki qui traçait des « bonhommes », ces jeux d’écritures s’apparentent aux re- cherches que poursuivent en Europe des peintres que connaît bien Wou- Ki. Michaux est à la même époque [1952] en train de rêver — désespé- rément — chinois, d’inventer son propre alphabet d’idéogrammes, Atlan, Arp poursuivent une recherche analogue. » (Zao Wou-Ki, Texte de Claude Roy, Coll. Les Grands Peintres, Éd. Cercle d’Art, 1988, p. 47) Revenons à notre Karaktère surdimensionné martelant en 2005 que « Quelques érudits ont pourtant déjà repéré dans mes livres cette insistance depuis fort longtemps sur la Chine, probablement très étrange chez un écrivain occidental. » Il serait encore plus 奇怪 étrange de ne pas ajouter trois autres écrivains à la longue liste de la page 6 ! L’on ne peut passer sous silence L’Amant de Marguerite Duras, (1984, ah ce Goncourt qu’Il espère encore décrocher grâce au piston pivotant du préfet du jury ! cf. Le Système Sollers et ses satellites), réécrit en 1991 sous le titre L'amant de la Chine du Nord. Mister S. s’est moqué à l’envi du pseudonyme, du penchant pour l’alcool et du physique de l’auteur de Moderato cantabile. Or Il est Lui-même passé de Joyaux à Diamant puis Sollers et il est difficile de trouver un coffret à bijoux en pacotille à ce point tambourré de Soi ; ce Pierrot claudiquant et boursouflé serait donc bien avisé de se saouler la gueule de temps à autre et de moins plagier/copier/pasticher. Tout en poussant un soupir de crocodile repu, pointons aussi du doigt que Marguerite Donnadieu envoie au diable notre Flibustier de la Gironde, qui pour elle n’est qu’un paon singeant l’écriture : ~ 8 ~ « Sollers est trop limité : quelqu’un comm e lui, qui fait tout pour amener à lui le grand public et faire parler de lui en scandalisant la bourgeoisie par des sujets qui ne choquent en réalité plus personne, ne doit pas avoir grande confiance en lui-même. » (Marguerite Duras, La passion Suspen- due, Entretiens avec Leopoldina Pallotta della Torre, Traduit de l’italien et annoté par René de Ceccatty, Éd. du Seuil, 2013, p.71) Et puis donnons l’accolade à Hergé — Le Lotus bleu parut en feuilleton en 1934 et sa version en couleurs en 1946. À droite ci-dessous figure la traduction de 1984 de mon ami Li Binggang (李秉刚), avec les dessins de He Li (何力). Cette bande dessinée se déroule en Chine et relate assez fidèlement, entre autres, un attentat qui se déroula à Moukden (dans le nord-est, aujourd’hui Shenyang, mais Hergé situe l’action à Shanghai), incident qui servit de prétexte à l’occupation japonaise et déboucha sur la seconde guerre sino-japonaise de 1937. Bien qu’il soit « très étrange » de s’intéresser à la Chine, Le Lotus bleu fut classé en 1999 au 18e rang des cent meilleurs livres du XXe siècle, d’après un sondage réalisé par la FNAC/Le Monde. Guidés par l’esprit du deuxième plus ancien livre de la Chine après le Yi Jing, en l’occurrence le Livre des générations antérieures (Shang Shu 尚書, aussi appelé Shu Jing, 書經, Classique des documents historiques), un recueil de prescriptions et conseils de gouvernants et de sages compilé continûment entre la fin des Shang 商(-XIIe) et la fin des Zhou 周 (-256), cité par Confucius (孔夫子, 551-479) et datant dans sa forme actuelle du -IIIe, où il est dit : 滿招損謙受 益 ; « La suffisance 滿 appelle 招 la perte/moquerie/critique 損 [tandis que] l’humilié 謙 recueille 受 les avantages/profits 益», les lecteurs français ont préféré inciter notre Mandarin de Salon à la modestie et L’exclure de ce tableau ! Fasciné par la Chine, Hergé en profite pour insérer de nombreux idéogrammes dans le texte du Lotus Bleu. Il fut en cela conseillé par Zhang Chongren (張充仁, 1907-1998), un étudiant chinois à l’Académie des beaux-arts de Bruxelles avec qui il noua une longue amitié, au point de l’incarner sous les bienveillants traits de Tchang Tchong-Ren dans les aventures du jeune reporter belge, notamment dans Le Lotus Bleu et Tintin au Tibet. L’étymologie du caractère « voie », 道, « dao, ou tao », permet ci-dessous à Hergé de s’en donner à cœur joie (悦). En effet, sa clé est 辵 ; elle se prononce « chuo », signifie « marcher » et s’écrit 辶 lorsqu’en position de clé. L’autre partie du caractère, à droite, 首, se prononce « shou » et signifie « tête », celle-là même que veut couper l’agresseur de Tintin sous l’emprise de la drogue ! Pour un occidental, cet épisode n’est qu’anecdotique, mais il possède une résonance philoso- phique pour tout lecteur chinois : si la tête de Tintin tombe, il ne restera que le caractère « marcher », 辶. Or le taoïsme enseigne que pour trouver la Voie, marcher 辶sur la bonne Voie, il faut se départir de son moi et de son amour-propre, faire preuve d’humilité, abandonner l’intellectualisation superflue afin de ne faire qu’un avec le Dao, 道, le Grand Tout, la Nature — sans tête, Tintin cheminera donc d’un pas plus léger et s’approchera du Dao plus aisément ! Ainsi la traduction chinoise est plus symbolique et drolatique que le texte original. ~ 9 ~ Sur la colonne de gauche, 吉慶如意 indique Bonne fortune et félicité selon vos désirs, et sur celle de droite, 福壽雙全, signifie Que bonheur et longévité forment une paire complète — l’utilisation de « bonheur et longévité » n’est pas fortuite, car le terme 福壽膏 , « pâte de bonheur et de longévité », est un euphémisme pour « boulette d'opium ». Sur la lanterne au centre, 一路連陞 est à double sens : Puissiez-vous enchaîner les promotions / monter en grade, ou Puisse votre chemin/voyage vous amener continuellement plus haut. Sacré Hergé va, il semble bien vouloir contredire son compatriote Magritte : ceci est une pipe…rouge ! Le poème ci-contre, dans la fumerie, est une référence évidente à l’illumination de Bouddha sous un figuier et exprime le détachement des choses matérielles : 蓮清靜為藉(藕)心空 ; 萍自在因根解脫, « Le lotus est en paix car le cœur de ses racines est vide ; la spirodèle est libre car ses racines sont sans attaches. » À gauche, les deuxième et troisième caractères du distique (自在, « soi-même être là »), ici traduits par libre, renvoient à l’expression bouddhiste « indépendant » / « qui maîtrise sa destinée » ; et les deux derniers caractères (解 et脫, « se détacher/se défaire », et « se décharner/se dépouiller ») font référence à la doctrine bouddhiste enjoignant l’homme à se libérer de l’illusion du moi et du monde qui est souffrance afin d’atteindre le nirvâna au moyen de la méditation. Pour planer loin des vicissitudes, l’opium est parfois d’une aide précieuse ! Je m’en voudrais aussi de ne pas saluer Pascal Quignard, qui a souvent pratiqué la Chine, notamment dans « La dernière leçon de musique de Tch’eng Lien » (in La leçon de musique, Éd. Hachette, 1987), dans Petits Traités I (« Vie de Lu »,1981) et Petits Traités II (« L’Oreiller de Sei », 1983), ou encore dans sa translittération du chapitre « Sur le doigt qui montre cela » (Éd. Michel Chandeigne, 1990), tiré du seul recueil de textes philosophiques de Kong Sunlong, 公孫龍 — un logicien sophiste de « L’École des lois [ou formes] et des noms », 刑[形]名家, du IIIe siècle avant notre ère. Quignard a sagement intégré la Chine dans plusieurs de ses écrits et obtenu le fameux prix dont rêve notre Han…neton bordaquatique (波尔多) aux antennes rognées ! D’où peut-être la tornade Sollers qui vient de s’abattre sur lui dans Beauté (Éd. Gallimard, 2017) ? Ce Rossignol (sans clef mais enroué) n’aime pas les artistes qui Lui font de l’ombre. Sa pratique démontre que « écrire » signifie pour Lui batifoler autour de mirages et d’ilots exquis, polir les facettes de Son personnage, faire campagne pour la propagation de Son Nom et muser dans les jardins d’autrui pour remplir Sa besace de fruits agréables à Son palais. Dans cette attaque, on se rend compte qu’Il a une Obsession Fixe : Quignard est « … un écrivain (qui) lit ses textes, et, de temps en temps, joue un peu de piano. […] Il a eu le prix Goncourt, c’est une sorte de Houellebecq en beaucoup plus chic. » (p. 96). Il est indéniable que l’auteur d’Ombres errantes explore d’autres sphères que l’auteur-hipster de Rester Vivant qui, par soumission à l’appel de la sirène marchande et spectaculaire, nous a infligé en 2016, au Palais de Tokyo, une expo de photos, jouets et accessoires de… son toutou trépassé ! Une métaphore, non pas de l’amour absolu comme voudrait nous le faire croire le slogan de cette surexposition affairiste, mais plutôt de l’indécrottable sottise humaine et de la récupération commerciale tous azimuts — à l’heure du crépuscule Sollers, l’abandon du domaine de la lutte se fait au profit du label et de la bête. ~ 10 ~ Quignard préfère se tenir loin des tourbillons et de l’agitation du Cirque du Sollers et il ne court pas après les honneurs à coups de postures médiatiques, d’impostures éditoriales et de rafis- tolages de traductions chinoises non référencées. Au demeurant, ce n’est pas un hasard si le scénario étriqué de Beauté tourne autour d’une pianiste et que notre Chroniqueur non tempéré, dans le dernier numéro de Sa Revue, plaque Ses doigts boudinés sur une partition de Bach (p. 98) — Il semble jalouser follement tout musicien qui peut jouer cette pièce au lieu de se la jouer pour la galerie. De plus, Quignard a eu la décence de dire franchement : « Le texte chinois du Kong-souen Long-Tseu [Kong Sunlong] que j’ai uti- lisé est celui retranscrit par Ignace Kou Pao-koh (Ignace Kou Pao-koh, Deux sophistes chinois, Houei Che et Kong-souen Long, Bibliothèque de l’Institut des Hautes Études Chinoises, Vol. III, Paris, 1953, pp. 37-43). J’en ai adopté la plupart des leçons. Le texte procuré sous forme d’entre- tien en évoque d’autres, soit qu’elles ont paru possibles au traducteur, soit que d’autres les ont proposés. Je ne sais pas parler le chinois. » (Pascal Quignard, Sur le doigt qui montre cela, op. cit. p.15) « J’amplifie une vieille légende. Je l’ai lue dans une note savante due à Tchang Fou-jouei à la page 432 du second tome de la Chronique des mandarins. La traduction française du livre de Wou King-tseu est parue en 1976. Je brode rêves et réflexions autour de la légende de Yo Pa. J’invente les dialogues, les souvenirs. Mais la scène finale est celle de la légende. » (La leçon de musique, op. cit., p.99) Les sources de Quignard sont translucides ! Et puis il ne faut pas non plus oublire des auteurs plus anciens comme Montaigne, Pascal, Montesquieu ; ou encore Malebranche (Entretien d'un philosophe chrétien et d'un philosophe chinois,1688) ; Jean-François Regnard (Les Chinois, comédie en quatre actes, 1692), Fénelon (Dialogues des morts, 1712, comprenant une longue discussion entre Socrate et Confucius, sous-titrée « Sur la prééminence tant vantée des Chinois ») ; Alain-René Lesage (Arlequin Barbet, Pagode et Mandarin,1723 ; La Princesse de la Chine, 1729) ; Voltaire (L’Orphelin de la Chine, 1755 : une histoire ancestrale maintes fois adaptée en Occident) ; et aussi Diderot, Chateaubriand, Hugo, Gauthier, Renan, Mallarmé, Mirbeau, etc., qui abordèrent la Chine sous divers angles… avec plus ou moins de bonheur selon leur degré de connaissance du monde chinois et leur ouverture d’esprit. Attardons-nous sur Victor Segalen (1878-1919) qui séjourna longtemps en Chine en tant que médecin militaire et archéologue amateur averti. Sa maîtrise du chinois était assez bonne pour lui permettre de s’entretenir avec les autochtones, mais non de lire la poésie classique dans le texte. Pourtant, il sut capter l’essence de cette culture, comme le prouvent le recueil de poésie Stèles (1912), la prose poétique Peintures (1916), les romans Le Fils du ciel (1917) et René Leys (posth., 1921) — lequel prêta son nom à Simon Leys (Pierre Rickmans, 1935- 2014), l’un des plus grands sinologues polymathes contemporains. Nous sommes ici à des années-lumière des Frimeurs et Hâbleurs qui pour faire des yeux doux à la comète s’affublent d’un alias cristallin et scintillant ! Et ce n’est pas tout, je me dois aussi d’évoquer rapidement ces hommes de lettres et penseurs étrangers qui depuis des lustres se sont penchés sur la Chine. Citons Leibniz (1646-1716) qui a beaucoup écrit sur ce pays, notamment sur le supposé « système binaire » du Yi Jing (ou Yi King ; Livre des Changements/Transformations/Mutations). Mon but n’est pas ici d’épiloguer sur la découverte « retrouvée » ou non du calcul binaire dans le Yi Jing où les lignes brisées — — seraient remplacées par 0, et les lignes pleines ––– par 1. Nous savons aujourd’hui que ce n’est pas le cas : il s’agit « uniquement » d’un livre de divination. Je veux simplement établir que depuis belle lurette de nombreux intellectuels non sinologues se sont brillamment penchés sur le Yi Jing et la Chine.
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