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Le communisme et la décolonisation PDF

103 Pages·19.699 MB·French
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Institut Royal Colonial Belge Koninklijk Belgisch Koloniaal Instituut SECTION DES SCIENCES MORALES SECTIE VOOR MORELE EN ET POLITIQUES POLITIEKE WETENSCHAPPEN Mémoires. — Collection in-8“. Verhandelingen.—Verzameling in-8°. Tome XXVIII, fasc. 1. Boek XXVIII, afl. 1. LE COMMUNISME ET LA DÉCOLONISATION PAR Arthur WAUTERS PROFESSEUR A L'UNIVERSITÉ DE BRUXELLES * Avenue M a r n i x, 25 Marnixlaan, 25 BRUXELLES BRUSSEL 1952 PRIX Fr. 100 PRIJS : LE COMMUNISME ET LA DÉCOLONISATION PAR Arthur WAUTERS PROFESSEUR A L'UNI VERSITÉ DE BRUXELLES MÉM. INST. ROYAL COLONIAL BELGE. Mémoire présenté à la séance du 18 février 1952. LE COMMUNISME ET LA DÉCOLONISATION I. Introduction. L’année 1951 a été marquée par une vive recru­ descence du nationalisme des peuples dépendants ou pseudo-indépendants. Les mouvements autonomistes ont gagné en nombre, en profondeur et en violence. Les succès extraordinairement rapides remportés par certains d’entre eux ont encouragé les voisins. En Asie, dans lel Moyen-Orient et en Afrique du Nord, on a assisté à une véritable réaction en chaîne. Ces mouvements ne présentent pas tous les mêmes caractères. Des formations politiques, à tendance auto­ nomiste, qui, jusque là, n’avaient manifesté aucune vigueur et qui en étaient encore au stade des manifes­ tations académiques et verbales, sont passées à l’action directe. L’octroi de l’indépendance, dont furent dotés un grand nombre de territoires, soumis jusque là aux métropoles, n’a pas ralenti les aspirations de ceux qui veulent non seulement conquérir la liberté politique, mais aussi s’affranchir de la sujétion économique. Dans bien des endroits, elle est toujours maintenue. Il y a d’ailleurs des nuances dans l’autonomie politique. C’est le cas notamment pour la Rhodésie du Sud qui, dispo­ sant politiquement d’elle-même, a dû cependant accepter que les droits des indigènes soient sauvegardés par le gouvernement impérial. On a même vu apparaître un cas extrêmement curieux 4 LE COMMUNISME ET LA DÉCOLONISATION dans le développement des événements dont nous nous occupons ici. L’Afrique du Sud, après la victoire électorale du parti nationaliste du Dr M alan aux élections du 26 mai 1948, a contesté le droit de contrôle (Trusteeship) de la Commission de Tutelle des Nations Unies sur l’Ouest Africain Allemand. A l’Assemblée Générale des Nations Unies de décembre 1948, le délé­ gué de l’Afrique du Sud a réaffirmé que les populations de l’Ouest Africain ont, à plusieurs reprises, demandé leur rattachement à l’Union. Dans les pages qui suivent cependant, nous n’avons l’intention d’étudier ce phénomène que dans les terri­ toires coloniaux ou dans ceux qui furent affranchis récemment du statut colonial. Cet activisme soudain et virulent a déconcerté l’Occi- dent, au point de l’obliger à modifier sa stratégie mili­ taire. Il y a lieu d’observer tout de suite que les métropoles s’opposent de moins en moins par la force aux revendi­ cations qui se dressent devant elles, bien qu’elles aient dû essuyer bien des brimades et des humiliations et qu’elles aient dû subir un grand nombre d’impertinences spectaculaires. Peut-être après l’échec, des Hollandais en Indonésie, qui ont voulu s’opposer militairement à la constitution de l’État Indépendant d’Indonésie, ont-elles tiré la conclusion que cette méthode ne paye plus. Peut-être aussi sont-elles à ce point affaiblies qu’elles n’ont plus le loisir d’y recourir. Des esprits pusillanimes et un peu irréfléchis, suc­ combant à la tentation des généralisations hâtives, ont voulu voir dans tous ces mouvements autonomistes la main des communistes. On ne peut nier qu’ils ont une longue expérience de ce genre d’action. Il faut se garder de conclusions précipitées. En le faisant, on tombe dans une mythomanie politique qui ne peut que les réjouir. On grandit leur prestige et on leur accorde gratuitement une sorte de pouvoir magique. LE COMMUNISME ET LA DÉCOLONISATION 5 Il est extrêmement difficile d’identifier les forces obscures agissant sur ce développement, qui est en train de modifier toute la physionomie du globe. On ne peut sûrement pas soutenir que le mouvement de libération économique poursuivi avec tant d’énergie passionnelle par le Dr M ossadegh, premier ministre de l’Iran, soit d’inspiration communiste. Il n’est pas douteux cependant, que son impétuosité même est due, en partie, à la pression politique du parti Tudeh, d’obé­ dience communiste. Le Dr Mossadegh, comme son collège égyptien, Nahas Pasha, appartient aux classes privilégiées et il n’a nullement l’intention de se faire exproprier par une révolution du type moscovite. Peut-être escompte-t-il l’appui momentané de ces nationalistes particulièrement turbulents pour l’aider à s’affranchir de l’hégémonie économique anglaise, en caressant l’espoir de liquider les communistes quand il aura remporté ce premier succès. La menace communiste intérieure fut d’ailleurs abon­ damment utilisée par le Dr Mossadegh dans ses négo­ ciations avec l’Amérique, au mois d’octobre 1951. Il a fait valoir, non sans habileté, que l’expropriation de l’Anglo-Iranian Petroleum Cy permettrait à l’Iran d’exploiter elle-même les richesses pétrolifères du pays et que les bénéfices en seraient consacrés à l’améliora­ tion du standard de vie des masses iranaises, amélio­ ration qui est la meilleure assurance contre les aventures extrémistes. Dans leur lutte contre l’Angleterre, ni le Dr Mossa­ degh, ni Nahas Pasha ne dédaignent de recourir à une stratégie qui a si bien réussi aux communistes du monde entier, en pratiquant la méthode du front com­ mun, à titre passager et précaire. C’est pourquoi, on voit l’Iran et l’Égvpte mélanger leur voix à celles des puissances du bloc soviétique dans les votes qui ont lieu aux Nations Unies. C’est dans le même but, et 6 LE COMMUNISME ET LA DÉCOLONISATION aussi pour trouver une compensation aux marchés qui leur échappent, qu’il signent des accords commerciaux avec la Russie des Soviets. A côté du désir passionné d’indépendance et de liberté, il y a des causes universelles et permanentes qui expliquent cette explosion de nationalisme. La première est le violent contraste qui existe entre la misérable situation des masses et l’opulence d’une minuscule minorité sociale souvent corrompue. Le développement de la presse et l’usage de plus en plus répandu de la radio ont familiarisé les populations avec les données qui permettent de comparer le standard de vie des pays non développés à celui de l’Occident. La large diffusion des statistiques de l’Organisation mondiale de la Santé a popularisé les taux de morbidité, de mortalité et de longévité. Les rapports publiés au sujet de la réalisation du point IV du Président Trum an pour le développement des pays arriérés contiennent des données sur les revenus moyens comparés, sur la capacité d’achat, sur les conditions de logement, sur l’équipement. Elles ont pénétré dans la conscience des plus déshérités. Pendant la seconde guerre mondiale, de nombreux indigènes embrigadés dans les armées alliées furent soumis à de gigantesques migrations. Elles leur ont permis de faire des rapprochements édifiants et de vérifier sur place la médiocrité de leur niveau de vie, comparé à celui des populations avec lesquelles ils prenaient un contact forcé. Ces comparaisons provoquent une indignation d’au­ tant plus vive que, jusqu’à présent, l’exploitation des richesses nationales s’est faite par des étrangers, au profit des étrangers. La littérature de propagande communiste abonde en détails circonstanciés sur les investissements des capitaux métropolitains dans les territoires coloniaux ou semi-coloniaux, sur le volume LE COMMUNISME ET LA DÉCOLONISATION 7 des dividendes distribués, qui sont confrontés avec l’indigence des dépenses pour l’enseignement et la santé publique. Dans beaucoup de pays soumis au bouleversement que nous analysons existe également un régime agraire périmé. Et nous verrons avec quelle habileté les com­ munistes s’en sont servis pour élargir d’une façon durable la base sociale de leur action. En Asie, l’occupation japonaise a eu des conséquences considérables sur le comportement politique des au­ tochtones. Les Japonais ont constitué, partout où ils sont passés, des gouvernements Ouisling qui ont initié les indigènes à la technique de l’administration autonome. Des gouvernements collaborationnistes de ce genre furent constitués aux Philippines, en Annam, au Cam­ bodge, au Louang-Prabang et en Birmanie. D’autre part, dans les régions occupées par les Japo­ nais, des maquis, armés par les Anglais, auxquels collaboraient activement les communistes, ont lutté à main armée au côté des troupes alliées contre l’envahis­ seur. Puis avec ces mêmes armes anglaises, ils se sont retournés contre les Anglais pour conquérir leur propre indépendance. On se trouve ici en présence d’une opération en deux temps. Le conflit entre les deux idéologies qui se partagent le monde a également contribué à exaspérer les popu­ lations désireuses de conquérir leur autonomie. Alors qu’elles n’y étaient pas directement mêlées, elles en subirent indirectement le contrecoup par la hausse des prix, l’aggravation du coût de la vie, l’impossibilité de se procurer des matières premières et l’accroissement des charges militaires. Les autonomistes furent prompts également à exploiter les controverses entre les Occidentaux. Ce fut surtout le cas en Iran. Et ces conflits se déroulent parfois sur le plan technologique. Le mouvement en Malaisie fut 8 LE COMMUNISME ET LA DÉCOLONISATION influencé par la concurrence que le caoutchouc synthé­ tique fait au caoutchouc naturel. Les débats qui eurent lieu le 29 décembre 1951 à l’Assemblée nationale française sur les crédits militaires pour l’Indochine, ont illustré le parti que les mouvements autonomistes pouvaient tirer des difficultés rencontrées par lesjgrandes puissances. Elles ne pouvaient faire face en même temps à leur obligations dans les terri­ toires Jd’outre-mer et aux exigences du réarmement en Europe occidentale. En 1951, la France avait consacré 283 milliards de francs français aux opérations militaires dans le Tonkin. Cette somme était passée à 326 milliards pour 1952. En résumé, la situation se présentait de la façon suivante. Ces 326 milliards, ne représentaient que les dépenses des forces terrestres. Il fallait y ajouter celles du budget de l’Air et de la Marine. Ce qui portait le total à 400 milliards, soit le tiers du total du budget militaire français, ou le huitième de l’ensemble des dépenses publiques de la quatrième République. Au même moment, la France s’était engagée à mettre sur pied dans le cadre du Pacte Atlantique dix divisions, alors que l’Indochine absorbait en personnel un quart des officiers de l’armée française et 40% de l’ensemble de ses sous-officiers. Les effectifs s’élevaient à 144.000 hommes en 1951, portés à 170.000 au cours de l’année. Et ils seraient fixés à 173.000 en 1952. Il fallait y ajouter les 100.000 hommes de l’armée du Vietnam, dont l’équipement et l’entraînement étaient dérisoires. Placée devant ce dilemme, la France devait faire un choix entre la reconquête de l’Indochine, l’abandon complet ou un repli partiel. L’interrogation qui se plaçait devant elle était d’au­ tant plus dramatique que l’hypothèse d’une trêve en LE COMMUNISME ET LA DÉCOLONISATION 9 Corée pouvait compliquer encore davantage le problème. En effet, le Général de Lattre de Tassigny, qui com­ mandait les forces armées françaises en Indochine et dont les hautes vertus militaires avaient soulevé tant d’espérance, pensait qu’il pourrait liquider la situation en 15 ou 18 mois, à condition que la Chine n’intervint pas sur le théâtre des opérations où les Français se battaient seuls depuis 1945. De plus, les Etats-Unis, à la fin de 1951, refusaient toujours de prendre le moindre engagement en cas d’invasion chinoise. Plusieurs ora­ teurs envisageaient le repli. Il invoquaient l’opinion des experts militaires les plus illustres de la France. Les uns, comme M. Daladier, invoquaient l’opinion du Maréchal Lyautey, qui croyait jadis que l’on pouvait sans danger abandonner le Laos et le Cambodge sans protection, alors que le ministre de la France d’Outre-Mer, M. Letourneau, invoquait l’opinion du Général Galliéni, qui était opposé à celle du construc­ teur du Maroc. De toute façon, l’idée qu’il fallait négocier une trêve paraissait être envisagée par l’unani­ mité du parlement français. Le coût accablant de cette interminable guerre du Vietnam explique, en grande partie, le comportement de la France à l’égard du problème de l’armée européenne. On comprend que la France insiste pour que 12 divisions allemandes y soient incorporées. Il suffit de rapprocher ce chiffre des effectifs engagés en Indo­ chine pour saisir la signification de la revendication française. La perspective était d’autant plus inquiétante que la Chine communiste fournissait déjà des équipements abondants au mouvement nationaliste du Vietnam, et qu’elle procédait à l’entraînement des troupes com­ munistes indochinoises au-delà de la frontière du Kwang- Si. D’autre part, si, après d’interminables négociations, l’armistice était signé en Corée, cela ne signifierait pas que

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