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L'assassinat de Trotsky: 1940 PDF

194 Pages·1980·4.142 MB·French
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1 0/1 A LA MEMOIRE 1:74U DU SIECLE L’ASSASSINAT DE TROTSKY PIERRE BROUE EDITIONS ICOMPLEXE»? Du même auteur La Révolution Espagnole, 1931-1939, 1978, Flamarion (Coll. Champs). La Révolution Espagnole, 1936-1939, (suivi de documents exclusifs de L. Trotsky et A. Nin extraits du livre de F. Morrow: Révolution et contre-révolution en Espagne). Sté. Ed. Lib. Info. Ouvrières. La Révolution et la guerre d'Espagne, (en collaboration avec Emile Temime), 1961, Minuit (Arguments). Les Procès de Moscou, Gallimard (Archives). Le Parti Bolchevique, (Histoire du P.C. de l’U.R.S.S.), 1972, Minuit (Arguments). La Révolution Allemande, Sté. Ed. Lib. Info. Ouvrières. Révolution en Allemagne, 1917-1923, 1971, Minuit (Argu- ments). La Question chinoise dans l'internationale Communiste, E.D.I. Le Printemps des Peuples commence à Prague, Sté. Ed. Lib. Info. Ouvrières. Léon Trotsky, 1979, E.D.I. «Les procès de Moscou dans le monde» in Cahier Léon Trotsky n° 3, 1979, E.D.I. Ecrits de Léon Trotsky (sous la direction de Pierre Broué). Le Mouvement communiste en France, Minuit. Léon Trotsky: Oeuvres, 8 vol. parus, E.D.I. SOMMAIRE Avertissement ..................................... 5 C’était mardi dans la soirée ............... 7 Les tueurs sur les traces...................... 19 Les espions dans la maison ............... 36 La presse et le meurtre....................... 53 L’h allali. .............................................. 72 Les tueurs en action ........................... 91 Le pèlerin du néant ou l’histoire d’un crime........................................... 109 La suite ou la fin ? ............................... 123 Documents .......................................... 144 La signification du Trotskysme par Oscar Creydt Abelenda — La «lettre-confession» de l’assassin — Commentaires de Goldman, avocat de Trot- sky, sur la «lettre-confession» de l’assassin — La Prauda sur la mort de Trotsky (24 août 1940) — L’assassinat comme révélateur par Francisco Zamora — Une mort opportune par German E. Uscanga Chronologie ....................................... 171 Notes................................................... 180 Orientation bibliographique .............. 184 Index .................................................. 186 AVERTISSEMENT Le sujet abordé dans ce travail à l’occasion du 40e anni- versaire d’un des plus célèbres assassinats politiques de l’his- toire de l’humanité n’est pas un sujet neuf et il a déjà fait l’objet d’un certain nombre de travaux fort estimables. Je n’ai accepté la proposition des Editions Complexe de délaisser pendant quelques semaines la présentation et l’an- notation des Œuvres de Trotsky dont je suis responsable en tant que directeur scientifique de l’institut Léon Trotsky, au bénéfice du présent ouvrage, que parce que j’avais eu la possibilité d’accéder à une documentation jusqu’alors inac- cessible : les archives du secrétariat d’Etat aux relations extérieures du Mexique, une reproduction photographique des interrogatoires de l’accusé et des différents témoins par le Juge d’instruction, qui m’a été confiée par l’avocat de Trotsky, la possibilité enfin de travailler à la Houghton Library de l’Université de Harvard dans les «papiers d’exil» de Trotsky, récemment ouverts au public, ainsi que dans la collection-satellite Octavio Femândez de la même bi- bliothèque. En outre, l’occasion d’une invitation à un enseignement de maîtrise à la Faculté de Science politique de l’Université nationale autonome du Mexique (U.N.A.M.) m’a offert la possibilité de consacrer mes loisirs dans ce pays à un dépouillement attentif de la presse mexicaine sur l’affaire Trotsky, une tâche qui semble bien n’avoir pas été systéma- tiquement menée jusqu’à présent. Je remercie ici tous ceux qui m’ont aidé. Esteban Volkov 5 et les siennes dont la maison est pour moi à Mexico celle de l’amitié, Javier Wimer, qui sait ouvrir toutes les portes, le Dr Octavio Rodriguez Araujo, de Science politique, Adolfo Zamora, avocat et ami de Trotsky, le personnel de la Houghton Library, du Musée Léon Trotsky, de la Bibliothè- que Lerdo de Tejada et de la Bibliothèque Lombardo Tole- dano. Et je n’oublie pas Olivia Gall, mon assistante de l’U. N.A.M. et mes amis étudiants du séminaire de maîtrise. Pierre Broué Trotsky à Mexico 6 C’ETAIT MARDI DANS LA SOIREE On le chante dans les rues de Mexico, sur l’air, toujours le même, des corridos, ce poème anonyme qui exprime le bouleversement de tout un peuple devant l’événement his- torique. Un homme vient d’être assassiné : l’étranger que l’on avait reçu, à qui l’on avait offert asile et protection. Offense, affront, blessure. Un premier corrido, le 24 août 1940, immortalise cette cicatrice : Le gouvernement mexicain dans un geste qu'on n’oublie pas accordait l’asile au proscrit et le protégeait de son bras Staline avec l’assassin Coopérant ouvertement Ont tranché avec précision leur crime et son destin Personne ne peut juger Car c’est l’affaire de l’Histoire Pourtant moi, et pour sa mémoire J’ai pu dans ces vers retracer Un crime si grand peut-il se contenter d’un unique cor- rido? Dès le 26, dans les rues de la capitale mexicaine, on 7 vend à cinq centavos cet autre qui est intitulé Gran Corrido a Leon Trotsky (Grand Corrido à Léon Trotsky) : Trotsky est mort assassiné du jour à son lendemain car ils avaient prémédité tôt ou tard de se venger Il avait cru qu'au Mexique dans ce pays hospitalier il pourrait enfin vivre en paix sous le toit de son vaste ciel II est vaincu par son destin tué dans sa propre maison c'est là que le lâche assassin a mis fin à son existence C'est un piolet d'alpiniste que cet assassin a brandi quand resté seul avec Trotsky il l'a tué sans prendre aucun risque C'était mardi dans la soirée cette fatale tragédie qui secoue tout notre pays et toute notre capitale. Léon Trotsky, dont la mort bouleverse ainsi la conscience des hommes les plus humbles de la population mexicaine, ces «pauvres» qui l’accompagneront par centaines de mil- liers lors de sa crémation, était né en 1879 dans l’empire des tsars de Russie. Etudiant révolutionnaire, il était devenu révolutionnaire professionnel, journaliste, publiciste, écrivain et orateur étincelant. En 1905, il avait été pendant quelques jours président du soviet de Saint-Pétersbourg, avant d’être de nouveau condamné et déporté. S’étant encore une fois évadé, il avait vécu en exil, en Allemagne, Autriche, France, Espagne et aux Etats-Unis. Revenu en Russie en mai 1917, il avait rapidement rejoint le parti bolchevique et Lénine avec qui il avait longtemps polémiqué. Il avait dirigé l’insurrection 8 d’Octobre. Il avait été l’un des symboles vivants de la Révo- lution russe de 1917, bras droit de Lénine, fondateur et chef de l’Armée rouge en 1918, rédacteur du Manifeste de l’in- ternationale communiste en 1919, il avait été écarté de la direction du parti et de l’Etat après la mort de Lénine pour avoir dénoncé la force grandissante de la bureaucratie et la confiscation des droits et prérogatives du parti par son appareil de permanents. Sa lutte comme chef de F Opposi- tion de gauche à l’intérieur du parti bolchevique et de l’inter- nationale lui avait valu d’abord l’exil à l’intérieur du terri- toire, à Alma-Ata en 1928, puis au début de 1929 l’expul- sion du territoire soviétique. Il avait vécu en Turquie de 1929 à 1933, date à laquelle, renonçant à tout espoir de réformer et redresser la IIIe Internationale, il s’était prononcé pour la construction de nouveaux partis communistes et d’une nou- velle Internationale, la IVe . Autorisé à s’installer en France en juillet 1933, il en avait été expulsé en droit en avril 1934, y était resté, faute de pays qui consente à l’accueillir, dans des conditions de surveillance spéciale jusqu’en juin 1935, où il avait pu s’installer en Norvège. Là, devenu, à partir d’août 1936 et du premier procès de Moscou contre les compa- gnons de Lénine, la cible de féroces attaques conjointes des hitlériens et des staliniens, il avait été interné en septembre 1936, et finalement autorisé en décembre à rejoindre le Mexique où il avait débarqué à Tampico le 9 janvier 1937. Depuis, il avait résidé pratiquement sans interruption à Coyoacân, près de Mexico, d’abord dans la maison bleue du grand peintre Diego Rivera, avenue de Londres, puis, après sa brouille retentissante avec lui, dans la petite maison toute proche qu’il avait réussi à acheter avec l’aide de ses amis, avenue de Vienne. C’était mardi dans la soirée. Mardi 20 août 1940. Les bombardiers de la Luftwaffe commençaient à pilonner en Grande-Bretagne ce que les communiqués baptisaient «objectifs stratégiques». La bataille d’Angleterre venait de commencer. Ce n’était pas la première. Après le spectacu- laire renversement des alliances qu’avait constitué, en août 1939, la conclusion du pacte de «non-agression» entre 9

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