Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 1994,13 (4), 1227-1247 Gales des animaux domestiques et méthodes de lutte L.J. PANGUI * Résumé : L'auteur présente une synthèse sur la lutte contre les gales essentiellement axée sur les animaux de rente (bovins, petits ruminants, chameaux, dromadaires, Equidés, porcs, lapins et volailles). Après une revue des parasites sur le plan taxonomique, morphologique et biologique, les données épidémiologiques et la pathologie des gales sont étudiées. L'auteur traite ensuite de la lutte contre les gales, qui sont des parasitoses cutanées très contagieuses entraînant des pertes importantes en production animale. Les différentes méthodes de lutte sont décrites : les acaricides peuvent être employés en bain, douche, pulvérisation, ou encore en application topique dorsale (pour on) et par voie parentérale. Les principaux acaricides sont passés en revue. Enfin, l'auteur évoque les problèmes de résistance aux acaricides et les mesures d'accompagnement dans la thérapeutique, ainsi que la prophylaxie médicale et sanitaire. MOTS-CLÉS : Acaricides - Animaux domestiques - Ectoparasitoses - Gales - Lutte. INTRODUCTION En dehors des tiques, les acariens les plus répandus dans le monde, attaquant l'homme ainsi que les mammifères terrestres et les oiseaux, sont les acariens sarcoptiformes et trombidiformes, qui provoquent des dermatoses appelées communément des gales. Les premiers sont des parasites dermotropes, vivant dans l'épaisseur ou à la surface de l'épiderme, et qui déterminent une dermatose très prurigineuse et contagieuse, la gale stricto sensu, tandis que les Demodex, acariens trombidiformes, se localisent dans les follicules pilo-sébacés, provoquant une dermatose généralement non prurigineuse appelée démodicose, démodécie ou encore gale démodécique. Aussi le terme de gale désignera-t-il dans cet exposé aussi bien les dermatoses provoquées par les acariens sarcoptiformes que celles provoquées par les acariens trombidiformes. Les gales sont des affections qui étaient déjà signalées dans la Bible, ainsi que dans les textes de la Grèce et la Rome antiques. L'importance des gales n'est plus à démontrer ; elle se situe à plusieurs niveaux. Sur le plan médical, les gales sont très contagieuses ; sous la forme généralisée, elles provoquent le délabrement de l'état général des animaux, et peuvent entraîner la mort. Ce fut le cas au Lesotho, où en 1975 la gale psoroptique décima entre 25 % et 30 % des moutons dans les régions infestées (22). * Service de Parasitologie, Maladies parasitaires et Zoologie, Département de Santé Publique et Environnement, Ecole lnter-Etats des Sciences et Médecine Vétérinaire, B.P. 5077, Dakar, Sénégal. 1228 L'importance économique des gales est marquée principalement par les baisses de production qu'elles entraînent. En effet, toutes les gales stricto sensu, en raison du prurit, entraînent une forte agitation des animaux qui fait baisser la consommation et la conversion alimentaires, ce qui a pour conséquence une perte de gain pondéral chez les animaux infestés (51). Des études faites aux Etats-Unis d'Amérique (19) ont montré que la réduction de consommation alimentaire était de 21,5 % chez les bovins atteints de gales psoroptiques, tandis que les pertes de gain pondéral pouvaient atteindre 68,2 kg par animal. La gale psoroptique peut entraîner une chute brutale de l'engraissement avec des pertes de poids allant de 100 kg à 150 kg par animal, chez les bovins (37,62). Des observations faites en production porcine, ont montré que les animaux sains ont un gain de poids de 8 % supérieur et un indice de conversion alimentaire de 10 % plus élevé que les porcs infestés par la gale sarcoptique (62). Les gales ont aussi une incidence défavorable sur la production laitière (51). Des chutes brutales pouvant atteindre jusqu'à 15 % de la production journalière sont observées tant chez les bovins que chez les ovins atteints de gales (62). Un autre préjudice causé par les gales et particulièrement par la gale psoroptique est la chute spectaculaire de la production de laine (22). Les pertes en quantité de laine peuvent aussi s'élever jusqu'à 30 % lors d'infestation par Psorergates ovis (62). De même, les lésions de gales endommagent la peau des animaux, provoquant de graves préjudices pour l'industrie du cuir (20). Enfin, les gaies et plus particulièrement la gale chorioptique par l'atteinte scrotale qu'elle entraîne, affectent les performances de la reproduction. Sur le plan monétaire, les pertes causées par les différentes gales sont difficiles à évaluer, surtout dans les pays du Tiers Monde. Aux Etats-Unis d'Amérique, les pertes sont évaluées à environ 5,8 millions de dollars chaque année (19). Les gales revêtent aussi une importance sociale, car certaines d'entre elles sont des zoonoses. En effet, l'homme peut être parasité par les Sarcoptidés du chien, du chameau, du dromadaire, de la chèvre, du mouton, des bovins et des chevaux (44). De même, les dermatoses causées par Demodex affectent la plupart des mammifères y compris l'homme (20), mais ce ne sont pas des zoonoses. C'est au regard de tout ce qui précède, que réside l'intérêt de la lutte contre les gales des animaux domestiques. Cette lutte passe tout d'abord par la connaissance des agents étiologiques et de Pépidémiologie des différentes gales. CONNAISSANCE DES PARASITES TAXONOMIE Les acariens responsables des gales des animaux domestiques appartiennent à quatre familles, dont deux sont classées dans le sous-ordre des Sarcoptiformes (Sarcoptidés et Psoroptidés), tandis que les deux autres sont rangées dans le sous-ordre des Trombidiformes (Psorergatidés et Démodécidés). MORPHOLOGIE Morphologie générale Les agents des gales sont tous caractérisés par un corps ramassé, globuleux et'non segmenté, à l'exception de Demodex qui a un corps allongé et vermiforme. Les pièces buccales composées de chélicères forment avec les pédipalpes un tout appelé rostre, 1229 situé à l'extrémité antérieure du corps. Ce sont des parasites microscopiques, ayant une cuticule molle. Les formes adultes et les nymphes possèdent quatre paires de pattes insérées sur des épimères, tandis que les larves sont hexapodes. Le dimorphisme sexuel est bien marqué. En dehors de ces caractères communs, il existe des différences morphologiques nettes entre les parasites des deux sous-ordres. Morphologie spécifique Les acariens sarcoptiformes Les acariens sarcoptiformes (33, 41, 50, 55) sont des acariens astigmates. Certaines pattes portent des ventouses pédonculées. Les différents parasites de ce sous-ordre possèdent des caractères spécifiques permettant une identification facile des genres. a) Les Sarcoptidés ont un corps circulaire, un rostre court, et des pattes courtes dont les deux paires antérieures dirigées vers l'avant ne dépassent pas le rostre. Les deux paires de pattes postérieures ne dépassent pas le bord postérieur du corps. Certaines pattes se terminent par des ventouses soutenues par des pédicules longs et uni-articulés. - Sarcoptes est le plus commun des agents de la gale ; il comprend une seule espèce : Sarcoptes scabiei. Il est présent chez presque tous les mammifères domestiques, et chez l'homme. Il porte à la surface dorsale des écailles triangulaires en position transversale et dix paires d'épines dont trois antérieures et sept postérieures et portées sur des socles. - Notoedres comprend une seule espèce chez les petits mammifères domestiques, Notoedres cati. Il est plus petit que Sarcoptes. Il est pourvu d'écailles mousses à la face dorsale et de dix paires d'épines sans socle, dont quatre paires disposées antérieurement et six paires postérieurement. b) Les Psoroptidés ont un corps ovulaire pourvu de pattes longues. Les mâles portent à leur bord postérieur deux lobes abdominaux, en avant desquels se trouvent sur la face ventrale deux ventouses copulatrices. - Psoroptes possède des ventouses en forme de cornets à glace et portées par des pédicules tri-articulés et courts. Plusieurs espèces ont été décrites en fonction des hôtes (Psoroptes equi, P. ovis, P. bovis, P. cuniculi). - Chorioptes possède des pattes dont les ventouses sont en forme de flûtes de champagne, larges et portées par des pédicules très courts. Les lobes abdominaux des mâles portent chacun de longues soies foliacées. Une seule espèce, Chorioptes bovis, parasite les animaux domestiques (petits ruminants, Equidés, bovins). - Otodectes est assez semblable à Chorioptes, cependant le mâle possède des lobes abdominaux peu développés et qui portent des soies filiformes. Une seule espèce est connue : Otodectes cynotis. Ce parasite est spécifique aux carnivores domestiques (chien, chat) et sauvages. Les acariens trombidiformes Les acariens trombidiformes sont des acariens prostigmates. Deux genres sont concernés dans l'apparition des acarioses appelées communément gales : Psorergates (appartenant à la famille des Psorergatidés) et Demodex (appartenant à la famille des Démodécidés). a) Psorergates (55, 62) se caractérise par un corps de forme ovale, mesurant environ 200 (j sur 160 p, à rostre puissant, porteur de chélicères styliformes et de palpes terminés par deux crochets bifides. Les coxae sont aussi pourvues d'un crochet à leur base et les 1230 prétarses de deux griffes puissantes. Cette morphologie permet de comprendre le pouvoir vulnérant de ce parasite. Une seule espèce est intéressante, Psorergates ovis. b) Demodex (18, 20, 33, 41, 50, 55) se caractérise par un corps allongé, vermiforme et mesurant environ 150 p à 350 u sur 25 u à 60 p. Le rostre est court, d'aspect carré. Les pattes sont très courtes, voire atrophiées. Il existe plusieurs espèces liées à des hôtes spécifiques (Demodex canis, D. bovis, D. ovis, D. caprae, D. equi, D. folliculorum, etc.). BIOLOGIE Alimentation Les agents des gales se nourrissent de cellules dermiques, de lymphe, de sébum, et de sérosités dermiques provenant des inflammations qu'ils provoquent. Cycle évolutif Le cycle évolutif des agents des gales débute avec la ponte des œufs. Ceux-ci sont, chez les acariens sarcoptiformes, ovoïdes, noirâtres, transparents et de grande taille (150 p X 100 p). Ils sont sphériques et mesurent 48 p chez Psorergates, tandis qu'ils sont allongés, fusiformes, en citron, et mesurent de 70 p à 90 u sur 25 p à 35 p chez Demodex. De ces œufs vont éclore des larves hexapodes, qui après une mue, se transformeront en nymphes. Celles-ci muent deux fois avant de devenir des adultes mâles et femelles, qui vont s'accoupler. La femelle ovigère va pondre des œufs, bouclant ainsi le cycle. Spécificités évolutives Il existe cependant des différences significatives entre les Sarcoptidés, les Psoroptidés, les Psorergates et les Demodex. - Chez les Sarcoptidés, l'accouplement a lieu sur la peau, et les femelles ovigères pénètrent dans l'épiderme et y creusent des galeries pour pondre les œufs qui vont donner des larves lesquelles à leur tour se transformeront en nymphes. Les nymphes vont également creuser des galeries afin de se retrouver à la surface de la peau au stade adulte. - Chez les Psoroptidés (55, 62), tout le cycle s'effectue à la surface de la peau, et les femelles pondent leurs œufs au milieu des croûtes épidermiques. - Les adultes de Psorergates vivent sous le stratum corneum de la peau. - Chez Demodex, la ponte des œufs, ainsi que l'éclosion larvaire se déroulent dans le follicule pilo-sébacé. Puis les nymphes de deuxième stade remontent à la surface, pouvant ainsi atteindre un autre follicule. Au niveau de l'orifice folliculaire les nymphes se transforment en adultes mâles et femelles, qui vont s'accoupler. Les femelles fécondées s'enfoncent immédiatement dans le follicule pour y pondre leurs œufs, tandis que les mâles meurent à la surface de la peau. Durée du cycle évolutif La durée du cycle évolutif varie entre deux et trois semaines pour les Sarcoptidés, de trois semaines à deux mois pour Psoroptes, tandis qu'elle dure environ trois semaines pour Chorioptes. Chez Psorergates, elle est de cinq à six semaines (62), et de neuf à dix jours chez les Demodex (20). 1231 Longévité et résistance La longévité des agents des gales est variable selon les espèces. Les Sarcoptes peuvent vivre entre trois et six semaines chez l'hôte, tandis que leur survie en milieu extérieur est de dix à seize jours (41). La durée de vie des Psoroptes adultes sur les hôtes varie entre trois à six semaines et celle des Chorioptes ne dépasse pas huit semaines. Leur survie en milieu extérieur est de dix à quarante jours. La résistance des acariens sarcoptiformes en milieu extérieur varie en fonction de l'humidité et de la température ambiante. En milieu humide (90 % d'humidité) et à une température située entre + 4 °C et 25 °C, ces acariens sont détruits au bout de sept jours. Mais en période de grande sécheresse et de forte chaleur, leur survie est très limitée. Exposés à la chaleur sèche de 60 °C, les parasites adultes sont détruits en une heure. Les Demodex sont très résistants dans les follicules où ils vivent environ deux mois, et peuvent survivre pendant plusieurs jours après la mort de leur hôte. Cependant, à la surface de la peau, ils meurent en trois à cinq jours (20). La durée de vie des Psorergates sur les ovins n'est pas bien connue, mais séparés de leur hôte, ils meurent après un à deux jours (55,62). ÉPIDÉMIOLOGIE RÉCEPTIVITÉ ET SENSIBILITÉ L'évolution des agents des gales ne peut se réaliser que sur un hôte réceptif et sensible. Mais la réceptivité et la sensibilité de l'hôte dépendent de plusieurs facteurs. Facteurs intrinsèques L'espèce Les acariens sont des parasites généralement spécifiques pour leurs hôtes. Cependant ils peuvent infecter d'autres hôtes, mais leur développement reste alors généralement limité. C'est le cas de Sarcoptes scabiei var. canis, bovis, equi, suis et de Notoedres cati chez l'homme, de Psoroptes ovis chez le cheval (27) et de Sarcoptes scabiei var. caprae chez le dromadaire (40). La race La race des hôtes intervient surtout dans l'expression de la maladie. C'est le cas de la gale sarcoptique qui est essentiellement localisée sur la tête chez les moutons à laine, tandis que cette même gale atteint toutes les parties du corps chez les races africaines à poils (45). L'âge En général, les individus de tout âge peuvent être infectés par les agents des gales (gales stricto sensu, démodicose des ruminants). Mais dans certaines acarioses, les jeunes sujets sont les plus réceptifs et les plus sérieusement atteints. C'est le cas de la démodicose canine qui n'affecte que très rarement les chiens de plus de trois ans (20), ainsi que de la démodicose caprine qui atteint surtout les animaux âgés de 15 mois à trois ans (21). Les animaux très vieux peuvent redevenir très sensibles aux gales. 1232 Le sexe En général les gales affectent les animaux de tout sexe, mais dans le cas de la démodicose, les femelles semblent plus sensibles que les mâles (13,14,20). Facteurs extrinsèques La malnutrition Une alimentation particulièrement déficiente en vitamine A et en sels minéraux favorise le développement des acariens sarcoptiformes sur les animaux (62), tandis que les carences en vitamines B2 et B6 favorisent la multiplication intrafolliculaire des Demodex (20). Maladies intercurrentes Les dysendocrinies, tel l'hypothyrodisme, et d'autres maladies cutanées telles que la phthiriose et les dermatomycoses, accentuent les lésions de gales. Conditions d'élevage Dans les élevages mal entretenus, les animaux sont plus réceptifs et la maladie est plus sévère. En effet, une mauvaise hygiène cutanée, les souillures par les fèces et les urines, sont de véritables sources d'irritation de la peau, élevant ainsi la sensibilité des animaux. MODALITÉS D'INFESTATION Sources de parasites Les sources de parasites sont essentiellement les animaux porteurs, mais des supports inertes en milieu extérieur peuvent jouer le rôle de sources secondaires. Mode d'infestation Les animaux se contaminent généralement par contact direct avec des animaux porteurs. Dans les gales (stricto sensu), la contamination peut aussi se faire indirectement à partir d'objets souillés par des parasites. Dans le cas de la démodicose bovine, les poux et les oiseaux (pique-bœuf à bec jaune : Buphagus africanus) pourraient transporter des nymphes d'un animal à un autre (20). Conditions favorisantes La promiscuité entre animaux malades et sains, le manque d'hygiène des animaux et dans le milieu, et les facteurs physiques tels que la température, l'humidité et l'ensoleillement sont des conditions qui favorisent l'infestation. SYNTHÈSE ÉPIDÉMIOLOGIQUE Les acarioses dues aux Sarcoptidés, Psoroptidés, Psorergatidés et Démodécidés sont certes des maladies cosmopolites, mais elles sont particulièrement fréquentes dans les pays tropicaux (20). La contamination des animaux peut se faire pendant toute l'année. Cependant les gales ont généralement un caractère saisonnier (31), avec une prédominance pendant les saisons humides en régions tropicales (13,43). En Europe, les gales semblent être des maladies hivernales (20), mais la démodicose peut aussi sévir en été (34). Ce sont des maladies contagieuses. Elles affectent particulièrement les élevages caractérisés par une grande promiscuité des animaux et une mauvaise hygiène, et prennent généralement des allures de véritables épizooties. 1233 PATHOLOGIE PATHOGÉNIE La pathologie observée dans les acarioses est la conséquence des actions traumatiques, irritatives, phlogogènes, antigéniques et favorisant les infections, des différents acariens sur la peau des animaux parasités (Sarcoptidés, Psoroptidés, Psorergatidés), et dans les follicules pilo-sébacés (Démodécidés). Les gales stricto sensu Les conséquences pathogéniques des gales stricto sensu sont les suivantes : - le prurit : premier signe de la gale, le prurit est dû, d'une part à l'action irritative des parasites sur les terminaisons nerveuses cutanées, et d'autre part à la réaction d'hypersensibilité provoquée par des substances antigéniques libérées par les acariens (48) ; - la formation de boutons de gale, qui résultent de l'inflammation locale de la peau à l'endroit d'alimentation des acariens ou de leur pénétration dans l'épiderme, dans le cas particulier des Sarcoptidés ; - l'altération cutanée, due aux grattages et aux morsures des animaux eux-mêmes à cause du prurit et aussi à la macération tégumentaire résultant de l'exsudation ; - la création de portes d'entrée : la peau altérée devient perméable aux germes microbiens résidents ou accidentels de la peau tandis que la macération tégumentaire crée un milieu propice à la prolifération de divers germes (bactéries, champignons) ; - l'atteinte viscérale, conséquence de la résorption des toxines libérées par la macération tégumentaire et des toxines provenant des germes microbiens ayant pénétré secondairement par la peau lésée. Elle se traduira aussi par de l'adénite, et par une atteinte hépatorénale. La psorergatose Les conséquences pathogéniques dues à Psorergates sont identiques à celles dues aux acariens psoriques. La démodicose Les Demodex dans les follicules pilo-sébacés exercent aussi plusieurs types d'actions pathogènes (3,20) : - une action mécanique, irritative et phlogogène, qui va entraîner la dilatation des follicules, une folliculite et une séborrhée ; - une action allergisante, qui se traduit par un érythème cutané ; elle est due à des allergènes qui sont représentés par des produits du métabolisme des parasites et par des protéines dégradées de l'hôte par l'action lytique des Demodex ; - une action favorisante des infections, déterminant la suppuration folliculaire et l'apparition des pustules. TABLEAU ANATOMO-CLINIQUE La classification des gales peut se faire en fonction soit de l'espèce parasite (gales sarcoptiques, psoroptiques, chorioptiques, etc.), soit de la localisation des acariens sur la 1234 peau (gales térébrantes ou superficielles), soit enfin de l'étendue des lésions (gales extensives ou localisées). Pour des raisons de commodité les gales seront classées ici selon l'espèce parasite. La gale sarcoptique La gale sarcoptique (16,28,41,45, 50, 55, 62) frappe l'homme et quasiment tous les mammifères domestiques sauf le chat. Les signes caractéristiques du début de la maladie sont la présence sur la peau, de petites papules rouges et d'un érythème. La zone touchée est très prurigineuse, et excoriée par les grattages et les morsures. Ensuite surviennent la chute des poils, l'apparition de croûtes, l'épaississement et le plissement de la peau. Chez les bovins, les zones touchées sont habituellement le cou et la tête, puis les lésions s'étendent à la face interne des cuisses et autour de la base de la queue (11,41, 50,55,62). Chez le mouton à laine, la gale sarcoptique atteint essentiellement la tête. La région mammaire des brebis allaitantes est souvent touchée à partir des agneaux. Chez les ovins africains à pelage, la gale débute sur la tête puis elle se généralise sur toutes les autres parties du corps, surtout les membres, le tronc et les régions mammaire ou scrotale (45). Chez les caprins, les lésions sont identiques à celles des ovins à poils d'Afrique (16, 28, 43). Le porc présente une gale sarcoptique généralisée. Les lésions débutent habituellement au niveau de l'oreille externe. Elles atteignent la face, s'étendent ensuite au tronc et aux membres (12, 41, 55, 62). Chez les Camélidés (chameau et dromadaire), la gale siège d'abord aux endroits à peau mince (les plis de l'aine, les ars, le ventre), puis elle se généralise rapidement à tout le corps. Chez le dromadaire, on observe parfois des ulcérations d'où s'écoule une sérosité fétide. La gale sarcoptique est une des maladies les plus importantes du chameau et du dromadaire (41). Les Equidés font aussi une gale généralisée qui débute par le garrot et s'étend ensuite sur le dos, le tronc et les membres. Les parties couvertes de crins ne sont pas touchées. Les lapins souffrent également de gale sarcoptique. Les lésions siègent au bout du nez et au pourtour de la bouche, pour envahir ensuite la face plantaire des pattes. Les lésions de la gale peuvent empêcher les lapins de se déplacer et de manger. La gale psoroptique La gale psoroptique (22, 41, 50,55, 62) s'observe chez les Bovidés, les Equidés, les petits ruminants et le lapin. Mais c'est surtout chez les ovins à laine qu'elle revêt une importance majeure. Chez le mouton, le prurit est violent. Les lésions cutanées peuvent siéger en n'importe quelle partie du corps, mais elles sont plus visibles sur les côtes. Les lésions débutantes sont des petites papules de 6 mm de diamètre, d'aspect blanchâtre ou jaunâtre, et laissant exsuder une sérosité qui en se desséchant constitue des croûtes jaunâtres. En tombant ces croûtes entraînent la chute de la laine. La toison paraît déguenillée. La laine s'arrache facilement par touffes. Le prurit aidant, l'animal se frotte à des supports solides, ce qui a pour effet d'accélérer la chute de la laine et d'augmenter 1235 l'irritation de la peau qui devient le siège d'inflammation, de contusion et de nécrose superficielle. Sur les lésions plus anciennes, la peau s'épaissit et se plisse. Les animaux deviennent cachectiques, faibles et la mort peut s'ensuivre. Chez les caprins, la gale peut atteindre toutes les parties du corps, mais elle peut aussi se manifester sous la forme d'otocariose (6). Chez les bovins, la gale débute soit à la croupe et à la base de la queue, soit au cou et au garrot, puis elle gagne la tête, le dos, les épaules et le tronc. Le prurit est très violent. Les parties touchées présentent de nombreuses petites vésicules remplies de sérosité, qui à l'épanchement se concrètent, formant ainsi de véritables écailles adhérant à la peau. Lorsque ces écailles sont tombées, la peau reste dépilée. Avec le prurit les lésions cutanées s'aggravent et sont souvent accompagnées d'adénite, se traduisant par l'hypertrophie des ganglions superficiels. L'animal devient cachectique et peut mourir dans un marasme physiologique si les traitements ne sont pas préconisés à temps. Chez les Equidés, l'affection est localisée au cou, particulièrement sous la crinière, à la base de la queue et au garrot. Les signes et lésions sont les mêmes que chez les bovins, mais l'évolution est très lente. Chez le lapin, la gale psoroptique est localisée au niveau du conduit auditif externe (24), d'où la synonymie de gale auriculaire. Elle se caractérise par un prurit auriculaire violent. L'animal présente au début une très forte irritation du conduit externe, puis il y a apparition de croûtes jaunâtres emboîtées les unes dans les autres en cornet et sous lesquelles la peau est très enflammée. Des manifestations épileptiformes surviennent souvent, ainsi qu'une torsion de la tête. La gale chorioptique La gale chorioptique (15, 41,50, 55, 62) se rencontre fréquemment chez les Equidés et les bovins, mais elle existe également chez les ovins et les caprins. Elle débute en général au niveau de la région inférieure des membres, d'où son nom de gale des pâturons, puis elle remonte jusqu'au ventre. Le prurit, les dépilations et les croûtes sont les signes habituels. Chez les bovins, en dehors des lésions au niveau du pâturon et du canon, on peut aussi voir des croûtes fibroïdes au niveau de la queue. Chez les chevaux, les lésions sont classiques, cependant le tableau clinique se complète par la manière de frapper du pied pendant la nuit et de se mordiller les membres. Chez les ovins, la gale chorioptique est ascendante. Elle affecte les pattes postérieures et surtout la partie entre l'articulation du boulet et les ergots des béliers ; elle remonte ensuite pour atteindre le scrotum qui présente des plis très épais et de nombreuses croûtes. L'atteinte scrotale peut entraîner une chute des performances de reproduction. Les gales cnémidocoptiques Les gales cnémidocoptiques (33,41,50,55) atteignent strictement les volailles ; elles sont dues à Knemidocoptes laevis et à K. mutans. La gale due à l'espèce K. laevis est appelée encore gale déplumante des oiseaux (poulets, pigeons). Cette affection débute généralement par le croupion, puis envahit les cuisses, le dos, le ventre et le cou. Il y a du prurit et du picage. Les plumes tombent. La peau est peu lésée. On voit des manchons et des débris épidermiques à la base des brins de duvet. Le plus souvent l'état général n'est pas troublé. 1236 La gale provoquée par K. mutans est une affection localisée aux pattes des poules, d'où son nom de gale des pattes. Les parasites se développant sous les écailles des pattes, entraînent la formation de croûtes épaisses, blanchâtres, crayeuses, d'où la synonymie de « pattes crayeuses ». Sous les croûtes, le derme est irrité et saignant. L'oiseau marche difficilement, et peut même perdre une phalange ou un doigt. Cette gale des pattes évolue très lentement et dure de six mois à un an si le traitement n'est pas préconisé à temps. La psorergatose La psorergatose (55,62) est une acariose qui frappe spécialement les ovins à laine, dans certaines régions du monde (Afrique du Sud, Amérique du Nord et du Sud, Australie et Nouvelle-Zélande). Elle est due à Psorergates ovis, un acarien trombidiforme de la famille des Psorergatidés. Les ovins infestés présentent un prurit intense qui les pousse à ronger, à mordre leur toison et à se frotter contre des supports solides. La toison est délabrée, elle s'arrache en touffes, agglutinée par des croûtes jaunâtres. La peau est lésée et écaillée. Cette acariose se généralise lentement à toutes les parties du corps recouvertes par la laine. La mort peut survenir lors de surinfections bactériennes. La démodicose La démodicose (14,20, 41,55, 63), appelée encore démodécie ou gale démodécique, est une acariose due à Demodex, un acarien trombidiforme. Elle affecte de nombreux mammifères domestiques dont le chien, les bovins et les petits ruminants. Contrairement aux autres acarioses étudiées, la démodicose est une affection généralement non prurigineuse, sauf en cas de complications. Le tableau anatomo-clinique de cette dermatose parasitaire est fonction de l'hôte infesté. Dans beaucoup de cas, les animaux infestés de Demodex en sont porteurs latents, et des signes cliniques n'apparaissent qu'après l'intervention d'un facteur immunodépressif. Chez les bovins la maladie est due à Demodex bovis. Elle se caractérise par la présence de nombreux nodules de la taille d'un pois, voire d'un œuf de pigeon, formés par la dilatation des follicules pileux infectés. Par pression sur les nodules, il sort un pus jaunâtre, épais et contenant de nombreux Demodex. Le tégument est dépilé et recouvert de croûtes. Les lésions siègent sur la tête, l'encolure, les épaules et les membres. L'état général est habituellement peu affecté, sauf dans la forme généralisée, où l'on note un amaigrissement progressif de l'animal. Des complications sont possibles par infection fongique, bactérienne (dermatophilose) ou parasitaire. Chez les ovins la démodicose est causée par Demodex ovis. On note des pseudo-kystes cutanés de quelques millimètres à un centimètre de diamètre, qui rarement suppurent, et des zones tégumentaires dépilées. Les lésions siègent surtout autour des paupières, dans la région périnéale et rarement sur le tronc. La maladie a une évolution chronique. Chez la chèvre l'agent causal est Demodex caprae. Les kystes sébacés qui ont une localisation plus profonde sont volumineux, leur taille varie entre celle d'un pois et celle d'une noisette. Ils sont perceptibles à la palpation. Ils suppurent rarement et renferment un contenu caséeux, riche en parasites. On note des zones de dépilations sub-circulaires érythémateuses et couvertes de squames. Les parties atteintes sont principalement le cou, le thorax, les épaules et la croupe. La démodicose du porc est due à Demodex phylloides. Elle détermine des kystes sébacés du volume d'un grain de blé, qui souvent confluent, formant ainsi des plaques sub-circulaires, saillantes, à surface irrégulière en chou-fleur (20). Ces kystes peuvent
Description: