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Du personnage au masque : le jongleur dans la littérature narrative des XIIe et XIIIe siècles PDF

625 Pages·2003·5.838 MB·French
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Preview Du personnage au masque : le jongleur dans la littérature narrative des XIIe et XIIIe siècles

UNIVERSITE PARIS IV SORBONNE ECOLE DOCTORALE « MONDES ANCIENS ET MEDIEVAUX » / / / / / / / / / / / (n° d’enregistrement) THESE Pour obtenir le grade de Docteur de l’Université de Paris IV Sorbonne Discipline : Littérature française Présentée et soutenue publiquement par M. Silvère MENEGALDO DU PERSONNAGE AU MASQUE LE JONGLEUR DANS LA LITTERATURE e e NARRATIVE DES XII ET XIII SIECLES Directrice de thèse : Mme Jacqueline Cerquiglini-Toulet JURY M. Dominique Boutet M. Jean Dufournet M. Jean-Marie Fritz M. Jean-Pierre Martin Mme Francine Mora A mes parents « Or chant et serf devant la gent, Ki me donent de lor argent, Por me maisnie soustenir. » L’Ermite et le jongleur (v. 437-439) Engager, poursuivre, achever ce travail n’aurait pas été concevable sans les conseils et le soutien de nombreuses personnes, auxquelles cet exercice de remerciements ne saurait certainement me permettre d’exprimer toute ma gratitude. Merci avant tout à Mme Jacqueline Cerquiglini-Toulet, qui a accepté de diriger cette thèse, et dont la constante disponibilité, la science et la bienveillance n’ont jamais été mises en défaut durant le long accouchement de ces pages. Merci ensuite à M. Jean-Pierre Martin et à Mme Emmanuelle Poulain-Gautret, pour avoir bien voulu relire une partie de ce travail, qui a ainsi pu bénéficier de leurs remarques et de leurs conseils. Merci également à Messieurs Jean-René Valette et François Suard pour leur précieux apport bibliographique. Merci enfin pour leurs relectures, amendements, traductions, échanges de vues, discussions, encouragements, et tout simplement pour leur amitié, à Agathe, Andrea, Benedicte, Craig, Daniel, Estelle, Guillaume, Julia, Laurent, Mattia, Mickaël, Myriam, Nelly, Olivier, Solène, Thomas, et mes parents, évidemment. SOMMAIRE INTRODUCTION 9 PREMIERE PARTIE DAUREL ET BETON, OU LE JONGLEUR HEROÏQUE CHAPITRE I. Daurel « lo bo joglar » dans Daurel et Beton. 37 CHAPITRE II. Daurel et le jongleur épique. 77 CHAPITRE III. Daurel et la littérature narrative occitane. 115 DEUXIEME PARTIE LE PERSONNAGE DE JONGLEUR : QUALIFICATIONS, FONCTIONS, EVALUATIONS CHAPITRE IV. Qualifications : le portrait du jongleur. 185 CHAPITRE V. Rôle actanciel, rôle thématique, fonctions narratives. 233 CHAPITRE VI. Evaluations. 295 TROISIEME PARTIE LES MASQUES DU JONGLEUR CHAPITRE VII. Jongleur de cour, jongleur des rues. 349 CHAPITRE VIII. Se déguiser en jongleur. 415 CHAPITRE IX. Le jongleur, masque de l’auteur. 459 CONCLUSION 509 ANNEXES 517 BIBLIOGRAPHIE 563 TABLE DES MATIERES 625 INTRODUCTION The way was long, the wind was cold, The Minstrel was infirm and old ; His wither’d cheek, and tresses gray, Seem’d to have known a better day ; The harp, his sole remaining joy, Was carried by an orphan boy. The last of all the Bards was he, Who sung of Border chilvary ; For, welladay ! their date was fled, His tuneful brethren all were dead ; And he, neglected and oppress’d, Wish’d to be with them, and at rest. Walter Scott, The Lay of the Last Minstrel (v. 1-12) Depuis le XIXe siècle, depuis surtout l’ouvrage initiateur de l’abbé de La Rue1, jongleurs et ménestrels ont été un constant objet d’étude pour les médiévistes, qui se sont efforcés de faire revivre ceux que l’on considérait comme des acteurs importants de la création littéraire. Dans le même temps, des écrivains, des poètes se sont emparé de cette figure, l’ont représentée à leur manière, selon leur propre vision du Moyen Age, ou même suivant des intentions toute différentes : c’est, chez les Romantiques anglais notamment, le minstrel de Scott ou de Beattie, plus ou moins confondu avec la figure du barde, qu’ont notamment immortalisée les poèmes de MacPherson2 ; 1 Abbé G. de La Rue, Essais historiques sur les bardes, les jongleurs et les trouvères normands et anglo- normands, Caen, 1834. 2 Poème bien oublié aujourd’hui, The Lay of the Last Minstrel paraît en 1805 et sera traduit à plusieurs reprises en français au XIXe siècle. Nous citons le texte d’après The Poetical Works of Sir Walter Scott, éd. J. Logie Robertson, 1894. Voir aussi le personnage d’Allan-a-Dale dans Ivanhoe. Mais avant Walter Scott, il y avait eu notamment The Bard de Thomas Gray (1757), The Minstrel de James Beattie (1771), et bien sûr les fameux poèmes d’Ossian publiés par le faussaire MacPherson, dont la première publication date de 1760. Voir Les Préromantiques anglais, trad. R. Martin, Paris, Aubier, 1939. 12 c’est le modeste musicien errant d’Eichendorff3 ; plus tard c’est la légende du jongleur de Notre-Dame, qui en France a connu un certain succès depuis la fin du XIXe siècle4 ; enfin le joyeux baladin aujourd’hui popularisé par le cinéma ou la bande dessinée5. En somme, si le jongleur est parvenu jusqu’à nous, c’est à travers une série de filtres, l’accumulation de multiples représentations, plus ou moins contradictoires, plus ou moins éloignées de leur modèle originel, mais qui n’en constituent pas moins le point de départ, aujourd’hui, de toute enquête prétendant se consacrer à cette figure. Il est évident que certaines de ces représentations sont plus conformes à la réalité historique que d’autres. Il ne suffit pas toutefois de se prévaloir d’une position d’historien, de la littérature ou autre, pour échapper aux effets de l’imagination, comme en témoignent au premier chef les études pionnières consacrées au jongleur durant le XIXe siècle. Sans vouloir en guise de préambule jeter sur notre recherche un voile de scepticisme, nous voudrions seulement rappeler que le jongleur « réel » nous reste à jamais inaccessible, derrière la série de représentations, superposées les unes aux autres, qui font écran entre le Moyen Age et notre époque. 1. En guise d’état des lieux : Edmond Faral et les études sur le jongleur. Point n’est besoin de dire la place essentielle occupée par le jongleur dans les études médiévales, tant en France qu’à l’étranger. Il n’est guère de dictionnaire consacré au Moyen Age qui ne comporte son article sur le jongleur6 ; d’innombrables études sont spécialement consacrées à cette figure, ou bien l’évoquent plus ponctuellement, dans les domaines les plus divers, de l’histoire à la musicologie, de l’histoire de l’art7 à celle de la « littérature » (avec guillemets 3 Eichendorff, Poésies, trad. A. Spaeth, Paris, Aubier, 1953, « Der Musikant », p. 82. 4 La légende du jongleur de Notre-Dame a inspiré écrivains (Anatole France) et librettistes (pour un opéra de Jules Massenet), et ce jusque très récemment, puisque M. Zink en a proposé une adaptation dans Le Jongleur de Notre-Dame, Paris, Seuil, 1999. Voir P. Kunstmann (Vierge et merveille, Paris, U.G.E., 10/18, 1981, p. 11- 12), qui recense au moins une vingtaine de traductions et d’adaptations de ce conte. 5 Sur la bande dessinée, voir l’excellente étude de F. Plet, « Le jongleur, portrait de l’artiste en clown », Etudes de lettres, 255, 2001, p. 37-64. 6 Pour nous en tenir aux publications récentes (d’ailleurs assez nombreuses) : Dictionary of the Middle Ages, éd. J.R. Strayer, New York, Charles Scribener’s Sons, 1986, tome sept, p. 116-117 et 1987, tome huit, p. 415-417 ; J. Favier, Dictionnaire de la France médiévale, Paris, Fayard, 1993, p. 536 ; Lexikon des Mittelalters, Munich, Lexma, 1995, tome sept, p. 2112-2113 ; Dictionnaire encyclopédique du Moyen Age, éd. A. Vauchez, Paris, Cerf, 1997, tome un, p. 836. 7 Contentons-nous de signaler les travaux récents d’I. Marchesin : « Les jongleurs dans les psautiers du haut Moyen Age : nouvelles hypothèses sur la symbolique de l’histrion médiéval », Cahiers de civilisation médiévale, 41, 1998, p. 127-139 et L’Image organum. La représentation de la musique dans les psautiers médiévaux (800-1200), Turnhout, Brepols, 2000, où l’on trouvera une abondante bibliographie sur le sujet. 13 zumthoriens de rigueur)8, de la lyrique des troubadours et trouvères à la chanson de geste ou au théâtre9. Bref, le jongleur est partout. Aussi, plutôt que de nous essayer à dresser un improbable bilan critique sur une question aussi vaste, nous paraît-il plus important de souligner la position très particulière dont jouit, au sein des études médiévales françaises, l’ouvrage bien connu d’E. Faral, Les Jongleurs en France au Moyen Age, paru en 191010. Comme le déclare l’auteur dès la première page, c’est « un livre qui prétend être une histoire des jongleurs », une entreprise de synthèse qui s’efforce de donner une vision d’ensemble de « tous ceux qui faisaient profession de divertir les hommes »11, en France, depuis la fin de l’Antiquité jusqu’à celle du Moyen Age. Du travail d’E. Faral, deux idées essentielles nous semblent devoir être retenues : (1) au même titre que les « trouveurs », les jongleurs sont des poètes, et « quant à la littérature, c’est aux jongleurs qu’elle doit le meilleur de sa substance, et notamment c’est par eux qu’a été constitué le trésor poétique du Moyen Age »12. (2) la distinction entre le jongleur itinérant d’une part, et le ménestrel d’autre part, terme qui, « avant qu’une extension plus large en eût modifié la valeur, s’employa d’abord pour les jongleurs qui faisaient partie d’une cour et qui y étaient attachés de façon permanente »13. En dépit d’incontestables dettes contractées à l’égard de ses devanciers, et en particulier L. Gautier14 et E. Freymond15, en dépit aussi d’un accueil assez contrasté lors de sa parution16, cette étude est rapidement devenue et reste encore aujourd’hui 8 P. Zumthor, La Lettre et la voix. De la « littérature » médiévale, Paris, Seuil, 1987. 9 Notons que les rapports entre théâtre et jongleurs ont été l’objet d’une attention toute particulière en Italie : citons notamment Il Contributo dei giullari alla drammaturgia italiana delle origini, Viterbe, Bulzoni, 1978 et L. Allegri, Teatro e spettacolo nel Medioevo, Bari, Laterza, 1988, en particulier p. 59-109. Sur le jongleur acteur en France on pourra consulter notamment l’ouvrage de synthèse de C. Mazouer, Le Théâtre français du Moyen Age, Paris, Sedes, 1998, ainsi que les travaux de M. Rousse, « Le jeu de saint Nicolas du clerc au jongleur », Hommage à Jean-Charles Payen. Farai chansoneta novele, Université de Caen, 1989, p. 311-321 et « Le théâtre et les jongleurs », Revue des langues romanes, 95, 1991, p. 1-14. 10 E. Faral, Les Jongleurs en France au Moyen Age, Paris, 1910. L’ouvrage a été réimprimé à deux reprises, en 1964 et en 1987. 11 Ibid., p. 2. C’est la « définition d’essai » proposée d’emblée par E. Faral, l’ensemble de l’ouvrage ayant pour but de la compléter et de la préciser. 12 Ibid., p. 259. Sur les relations entre « jongleurs et trouveurs », voir les p. 73-79 : E. Faral conclut à ce propos que « tout trouveur qui faisait métier de poésie était jongleur, et tout jongleur qui composait était trouveur » (p. 79). 13 Ibid., p. 104. 14 L. Gautier ne consacre pas moins de six chapitres et presque trois cents pages de ce monument que sont Les Epopées françaises, Paris, 1878-1892 (tome deux, p. 3-271) aux jongleurs. E. Faral doit à n’en pas douter beaucoup de ses références à cette somme d’érudition, dont la lecture peut toujours être profitable en dépit d’une pratique de la reconstitution historique aujourd’hui obsolète (voir en particulier les chapitres intitulés « La journée, l’année, la vie d’un jongleur » et « De l’exécution des chanson de geste. Une séance épique dans un château », respectivement p. 102-184 et 226-271). 15 E. Freymond, Jongleurs und Menestrels, Diss. Heildeberg, 1883. Il semble que ce soit notamment à cette courte mais excellente étude lexicologique qu’E. Faral doive sa fameuse distinction entre le jongleur et le ménestrel. 16 Voir notamment le compte rendu assassin de J. Acher dans La Revue des langues romanes, 53, 1910, p. 522- 526, ainsi que celui, assez mitigé, de F. Castets, dans la même revue, p. 422-425. Les autres comptes rendus que nous avons consultés (voir notre bibliographie) sont plus favorables, notamment celui d’A. Guesnon dans 14 l’ouvrage de référence sur la question, partout et toujours cité depuis presque un siècle. Un ouvrage dont l’autorité est telle qu’elle semble avoir découragé, en France du moins, tout travail d’importance sur le même sujet. Et si la critique actuelle a pu prendre quelques distances vis-à-vis de cette étude, les conclusions auxquelles elle aboutit n’ont jamais franchement été remises en cause, du moins à notre connaissance. Difficultés d’ordre méthodologique posées par l’hétérogénéité des sources concernant le jongleur. Sans lui dénier son importance, ni cacher tout ce que notre travail peut lui devoir, l’ouvrage d’E. Faral n’est pourtant pas, on s’en doute, à l’abri de certaines critiques, qui nous semblent inciter à une nouvelle approche de la question. Son défaut le plus important nous paraît résider dans le projet et la méthode mêmes de l’auteur. En effet, pour faire « une histoire des jongleurs », pour produire une synthèse à la fois historique et littéraire, mais qui cherche à toucher au jongleur « réel », E. Faral a été amené à utiliser conjointement, à comparer et à combiner l’ensemble des sources écrites disponibles sur le sujet, de la chanson de geste au livre de comptes, du fabliau aux chroniques, en passant par les traités théologiques, les manuels de confesseurs, les sermons ou les décrets synodaux17. Cette approche n’est pas propre à E. Faral et se retrouve peu ou prou dans la plupart des études de synthèse sur le jongleur, qui ont à sa suite adopté une perspective similaire, depuis R. Menendéz Pidal jusqu’à T. Saffioti en passant par W. Salmen, W. Hartung ou J. Southworth18. Seul l’ouvrage d’A. Schreier-Hornung, qui attire d’ailleurs l’attention Le Moyen Age, 14, 1910, p. 111-114. 17 E. Faral souligne cette difficulté à une reprise, dans une note discrète p. 272. A propos de la liste de citations qu’il fournit à la fin de son ouvrage, le critique précise : « nous nommons à la suite, dans l’ordre chronologique, mais sans ordre critique, des œuvres d’imagination et des documents proprement historiques. […] On saura, en parcourant la liste présente, la différence qu’on doit faire entre un texte et l’autre, entre une chanson de geste et une chronique, et comment il convient d’interpréter chacun des passages allégués ». 18 En dépit de la difficulté méthodologique que nous soulevons ici, toutes les études que nous citons (à l’exception de celle de W. Hartung) se recommandent par leur qualité, et intéressent toute recherche sur les jongleurs. On s’aperçoit cependant à la lecture de ces ouvrages, qui se consacrent pour la plupart à l’aire géographique et linguistique correspondant à leur pays de publication, qu’il faut se garder de négliger, au-delà d’évidentes similitudes, les différences parfois importantes qui se font jour d’un pays européen à l’autre. Voici la liste des études en question, par ordre chronologique de publication, accompagnée de quelques commentaires : - R. Menendéz Pidal, Poesía juglaresca y juglares, Madrid, Centro de Estudios Históricos, 1924. Cette étude, aussi fondatrice que celle d’E. Faral, a été rééditée à plusieurs reprises jusqu’à sa version définitive de 1957, sous le titre de Poesía juglaresca y origenes de las literaturas romanicas (Madrid, Instituto de Estudios Politicos), qui a encore été réimprimée en 1991 (Poesía juglaresca y juglares. Orígenes de las literaturas románicas, Madrid, Espasa calpe). - W. Salmen, Der fahrende Musiker im europäischen Mittelalter, Kassel, Hinnenthal, 1960. Cette excellente étude est l’œuvre d’un musicologue, et s’intéresse donc plus particulièrement au jongleur musicien, dans toute l’Europe. Elle a été rééditée en 1983 (Der Spielmann im Mittelalter, Innsbruck, Helbling), avec un texte presque identique, mais accompagné d’une vaste bibliographie (p. 145-154) et d’une très riche iconographie (p. 155-238), toutes deux absentes de la première édition. On déplorera cependant que ces indispensables ajouts soient au prix de la disparition de toutes les notes ! 15 sur ce problème19, nous semble parvenir, tout en utilisant la même variété de textes, à maintenir entre eux une frontière suffisamment nette. Pourtant, si la relative rareté des sources disponibles sur le jongleur peut certainement expliquer le choix de les utiliser toutes conjointement, il n’en reste pas moins que leur hétérogénéité pose d’importants problèmes de méthode. On peut distinguer, pour simplifier, deux grandes catégories de sources textuelles, littéraires d’un côté, historiques de l’autre (livres de comptes, statuts de confréries, divers textes d’origine cléricale)20. A partir de là diverses questions se posent nécessairement à qui prétend adopter une perspective historique. Dans quelle mesure est-il fondé à utiliser comme documents des textes littéraires très divers21 ? Dans quelle mesure ces textes littéraires, dont la valeur historique est nécessairement sujette à caution, peuvent-ils se comparer ou se combiner aux documents historiques, eux-mêmes très divers ? Prétendre en offrir une synthèse, n’est-ce pas dénier à chacune de ces sources sa spécificité et faire bon marché des intentions et du contexte particuliers qui ont pu présider à la rédaction de tel roman ou de tel sermon ? A l’inverse, écarter le témoignage de la littérature en se cantonnant aux sources traditionnelles de l’histoire, n’est-ce pas risquer22 de trop mettre en avant telle ou - W. Hartung, Die Spielleute. Eine Randgruppe in der Gesellschaft des Mittelalters, Wiesbaden, Franz Steiner, 1982. C’est une synthèse de qualité assez médiocre, qui, entre autres défauts, prétend embrasser l’ensemble de l’Europe, mais emprunte l’essentiel de ses références à E. Faral. - J. Southworth, The English Medieval Minstrel, Woodbridge, Boydell, 1989. Même si elle manque parfois un peu de rigueur, cette étude, qui n’est pas celle d’un médiéviste, n’en propose pas moins un bon tour d’horizon du jongleur anglais. - T. Saffioti, I Giullari in Italia. Lo spettacolo, il pubblico, i testi, Milan, Xenia, 1990. Bonne synthèse, accompagnée d’un recueil de textes p. 241-503. A ces ouvrages on peut ajouter certains recueils d’articles, dont Il Contributo dei giullari alla drammaturgia italiana delle origini et un numéro spécial de la revue Versants (28, 1995), intitulé Les Jongleurs en spectacle. Citons, pour finir, que nous n’avons pu consulter : G. Bonifacio, Giullari e uomini di corte nel 200, Naples, 1907, et La Juglaresca. Actas del I Congreso Internacional sobre la juglaresca, éd. M. Criado de Val, Madrid, EDI-6, 1986. 19 A. Schreier-Hornung, Spielleute, Fahrende, Aussenseiter : Künstler der mittelalterlichen Welt, Göppingen, Kümmerle, 1981. L’auteur souligne bien dans sa préface l’impossibilité, étant donné la variété des sources, de constituer une « einheitliches Gesamtbild von den mittelalterlichen Spielleuten » (p. VI). 20 La distinction est de fait simpliste : il faudrait plutôt se représenter l’ensemble des sources disponibles comme un spectre allant du document le plus brut (livre de comptes) au texte littéraire le plus élaboré, spectre par ailleurs traversé par diverses lignes de clivage, entre clercs et laïcs, entre latin et langue vernaculaire etc. 21 E. Faral ne semble guère se poser cette question, qui utilise indifféremment, ou presque, tous les textes littéraires comme des documents historiques. Ce défaut est particulièrement perceptible dans les chapitres les plus dépassés de son ouvrage, consacrés à « La situation morale des jongleurs » (p. 143-158) et à Rutebeuf, dont les textes sont lus comme des témoignages biographiques (p. 159-166). Et si à une occasion, citant divers fabliaux, E. Faral reconnaît tout de même que « ces récits ne prouvent rien historiquement », « il n’en reste pas moins, ajoute-t-il, qu’ils doivent être fondés sur la réputation ordinaire et sans doute méritée des jongleurs » (p. 146-147). On glisse de la reconstitution historique au jugement moral : « Le plus souvent dépourvus de vertus personnelles et inclinés au cynisme ; tenus, même les plus hauts placés, à un vasselage, à un service, qu’ils ont vanté, mais qui nous paraît bien humiliant ; voilà comment il faut se représenter, au XIIIe siècle, les jongleurs » (p. 157-158). 22 Sauf à exploiter un document précis appartenant à un contexte précis, et dont la neutralité n’est pas douteuse, comme le fait M. Bullock-Davies, dans Menestrellorum multitudo. Minstrels at a Royal Feast (Cardiff, University of Wales, 1978), en étudiant en détail le « payroll » qui conserve la liste des rétributions consenties à quelque 150 ménestrels, une petite partie certainement de tous ceux qui devaient être présents en 1306, lors de la fête donnée en l’honneur du futur Edouard II.

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