c a e r s h 4 4 i 7 7 3 3 (cid:116) Faut-il encadrer les hauts revenus ? s s N° 374 ai ai f r a n a (cid:116) Quels dépassements des honoraires nç nç ç i s pour les médecins ? L’ENVIRONNEMENT SACRIFIÉ ? a a r r f f s s (cid:116) Les trois crises de la politique culturelle r r e e i i de l’État en France h h a a C C DOSSIER Éditorial par Olivia Montel-Dumont ? L’ENVIRONNEMENT Un état des lieux des dommages et des risques environnementaux Lionel Ragot É I F Lutter contre les problèmes d’environnement, pourquoi est-ce si difficile ? I R Katheline Schubert C A La crise a-t-elle fait passer l’environnement au second plan ? Éloi Laurent T S SACRIFIÉ ? Les politiques de l’environnement sont-elles efficaces ? Marc Baudry N E M De Stockholm à Rio+20 : quarante ans de négociations internationales E Franck-Dominique Vivien N N La justice climatique internationale en débat Olivier Godard O R La fiscalité écologique dans les pays de l’OCDE, bien en deçà des ambitions affichées I V Jacques Le Cacheux N E Un bilan du marché européen du carbone Raphaël Trotignon L’ Comment juger le Grenelle de l’environnement ? Gilles Rotillon Quelques dilemmes et autres paradoxes de la transition énergétique Patrice Geoffron Que peut-on attendre des territoires et des villes durables ? Magali Reghezza-Zitt Diffusion Direction de l'information légale et administrative La documentation Française DÉBAT Téléphone : 01 40 15 70 10 www.ladocumentationfrancaise.fr Faut-il encadrer les hauts revenus ? Directeur de la publication 1. Pour une limitation des hauts revenusHenri Sterdyniak Xavier Patier 2. Une mesure contraire à l'efficacité économiqueClaire Celerier et Boris Vallée 3 1 LE POINT SUR… 0 2 Cahiers français n N° 374 Quels dépassements des honoraires pour les médecins ? Pierre de Montalembert -jui Mai-juin 2013 ai M POLITIQUES PUBLIQUES Impression : DILA a" Dépôt légal : 2e trimestre 2013 e@ DF 2CF03740 Les trois crises de la politique culturelle de l’État en France Françoise Benhamou Dr@ ISSN : 0008-0217 E - Ra@n@ 0? 9,80 € BIBLIOTHÈQUE 9,8]: F: ]U &:DANNNA=YUX\Y\: La Lcariusree nqtu Di vaiveenzti.e Lsa, nouvelle fracture territoriale 374 - ]U^ Seuil, 2012. 8 - G= La 06K présenté par Baptiste Marsollat 5P documentation 0K M I H &’: Française dF HORS-SÉRIE Sommaire Problèmes économiques DOSSIER 58 Quelques dilemmes et autres paradoxes CCAAHHIIEERRSS FFRRAANNÇÇAAIISS 1 ÉDITORIAL de la transition énergétique par Olivia Montel-Dumont Patrice Geoffron Équipe de rédaction 2 Un état des lieux Philippe Tronquoy 63 Que peut-on attendre (rédacteur en chef) des dommages et des risques des territoires et des villes Olivia Montel-Dumont, environnementaux durables ? Céline Persini Lionel Ragot (rédactrices) Magali Reghezza-Zitt Jean-Claude Bocquet 10 Lutter contre les (secrétaire de rédaction) problèmes d’environnement, pourquoi est-ce si difficile ? DÉBAT Conception graphique Katheline Schubert 68 Faut-il encadrer Bernard Vaneville Illustration 16 La crise a-t-elle fait les hauts revenus ? Manuel Gracia passer l’environnement 68 1. Pour une limitation Infographie au second plan ? des hauts revenus Annie Borderie Éloi Laurent Henri Sterdyniak Édition Carine Sabbagh 75 2. Une mesure contraire 22 Les politiques Promotion à l’efficacité économique Anne-Sophie Château de l’environnement Claire Celerier et Boris Vallée sont-elles efficaces ? 6,80 € Avertissement au lecteur Marc Baudry LE POINT SUR… Les opinions exprimées dans les articles n’engagent 28 De Stockholm à Rio+20 : que leurs auteurs. 81 Quels dépassements des Les atouts et les faiblesses Les grandes crises du XXe Les rouages du marché quarante ans de négociations Ces articles ne peuvent être honoraires pour les médecins ? de l’économie française et du XXIe siècles du travail décryptés reproduits sans autorisation. internationales Pierre de Montalembert Celle-ci doit être demandée à Franck-Dominique Vivien La Documentation française 29, quai Voltaire 34 La justice climatique POLITIQUES PUBLIQUES 75344 Paris Cedex 07 ou internationale en débat 88 Les trois crises [email protected] Olivier Godard de la politique culturelle LES MEILLEURS SPÉCIALISTES 38 La fiscalité écologique de l’État en France dans les pays de l’OCDE, © Direction de l’information Françoise Benhamou SE MOBILISENT POUR FAIRE LE POINT légale et administrative, Paris 2013 bien en deçà des ambitions affichées En application de la loi du 11 mars 1957 (art.41) BIBLIOTHÈQUE et du code de la propriété intellectuelle Jacques Le Cacheux du 1er juillet 1992, toute reproduction 93 Laurent Davezies, partielle ou totale à usage collectif 45 Un bilan du marché de la présente publication La crise qui vient. est strictement interdite européen du carbone La nouvelle fracture territoriale. sans autorisation expresse Raphaël Trotignon de l’éditeur. Il est rappelé Seuil, 2012. à cet égard que l’usage abusif et collectif de la photocopie 52 Comment juger présenté par Baptiste Marsollat met en danger l’équilibre économique le Grenelle de l’environnement ? des circuits du livre. Gilles Rotillon En vente chez votre libraire, en kiosque, sur www.ladocumentationfrancaise.fr et par correspondance : DILA - CS 10733 23 rue d’Estrées - 75345 Paris cedex 07 609130030int.pdf - Mars 29, 2013 - 1 sur 96 - BAT DILA éDitorial Des obstaCles au-Delà De la Crise En 2006-2007, l’environnement était au cœur du débat public. Un an à peine après la remise par Nicholas Stern de son rapport sur les coûts du réchauffement au gouvernement britannique, le prix Nobel de la paix était attribué conjointement au Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et à l’ancien vice-président américain Al Gore, connu pour son engagement sur la question du changement climatique. Au même moment, le gouvernement français élu depuis quelques mois lançait le «Grenelle de l’environnement». La grave crise économique qui a touché les pays développés dans la foulée semble avoir stoppé net le mouvement, la croissance et le soutien aux industries sinistrées devenant prioritaires dans les préoccupations des citoyens et plus encore dans les politiques publiques. L’échec de la conférence de Copenhague, en décembre 2009, à faire émerger un nouveau protocole succédant à celui de Kyoto atteste ce basculement au niveau de la gouvernance mondiale, largement recentrée depuis 2008 sur les stratégies de sortie de crise et la régulation de la finance. Si l’Europe s’est démarquée un temps en créant un marché de quotas d’émissions échangeables, la Commission refuse aujourd’hui de prendre les mesures nécessaires pour relever le prix de la tonne de CO, devenu presque dérisoire. Dans le même temps, le poids de la fiscalité écologique diminue 2 dans la plupart des pays membres, certains projets parmi les plus ambitieux passant à la trappe, à l’instar de la taxe carbone en France. Les projections des scientifiques sur l’état de l’environnement demeurent pourtant, elles, inchangées : sans la mise en œuvre de mesures massives, le réchauffement climatique pourrait dépasser 5 degrés d’ici 2100 ; près de la moitié des espèces seraient menacées de disparition ; 40% de la population mondiale souffrirait dès 2050 d’un accès insuffisant à une eau de qualité ; les maladies et décès liés aux pollutions diverses, notamment celles émanant des transports routiers dans les agglomérations, continueraient pour leur part inexorablement d’augmenter. La crise, toutefois, ne saurait être rendue seule responsable de la disproportion, maintes fois constatée et dénoncée, entre les actions et les enjeux. Car, si l’urgence du chômage, de la réduction des déficits publics et du soutien à certains secteurs de l’industrie offrent a priori un contexte peu favorable au lancement de politiques environnementales, les difficultés récentes invitent aussi à développer de nouvelles activités et technologies, à réformer la fiscalité et plus globalement à repenser la croissance, le lien entre la crise économique et celle de l’environnement étant souligné par plusieurs économistes. Quel que soit le contexte, les actions en faveur de l’environnement se heurtent à des obstacles qui relèvent de la nature même des problèmes à combattre : tandis que les dommages ont un caractère mondial, le pouvoir décisionnel demeure cantonné à l’échelle des nations, la coopération entre elles étant d’autant plus difficile que s’affrontent des intérêts conflictuels, notamment entre Nord et «Suds» ; à cela s’ajoutent les multiples incertitudes entourant les dommages et leur évaluation monétaire, ainsi que la disjonction temporelle entre les efforts à consentir et les bénéfices qui en découlent. Bien au-delà du recentrage sur la croissance dû à la crise, ce sont ces obstacles-là qu’il faudra surmonter pour affronter ce qui constitue l’un des défis majeurs du XXIe siècle. Olivia Montel-Dumont Cahiers français n° 374 1 609130030int.pdf - Mars 29, 2013 - 2 sur 96 - BAT DILA un état Des lieux Des Dommages et Des risques environnementaux Lionel Ragot Université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense Economix et CEPII Négligeables jusque dans les années 1960, les problèmes d’environnement sont considérés depuis la fin de la décennie 1980 comme faisant partie des plus grands défis mondiaux du XXIe siècle. Si les premières catastrophes industrielles –Seveso, Bhopal, marées noires – ont contribué à éveiller les consciences, c’est surtout l’émergence des problèmes environnemen- taux planétaires – réchauffement climatique, biodiversité, accès aux ressources naturelles, pollutions transfrontières – qui a accéléré la montée des préoccupations et alerté sur la gravité de la situation: il ne s’agit pas uniquement de limiter des risques technologiques mais de réorienter le développement économique de telle sorte qu’il puisse se poursuivre pour les générations futures. Les analyses de l’état de l’environnement et les diverses projections effectuées, sur lesquelles Lionel Ragot fait le point, sont en effet sans appel: sans inflexion notable des modes de production, le réchauffement climatique pourrait s’élever à 5 degrés d’ici 2100, on assisterait à l’extinction de près de la moitié des espèces terrestres et à une aggravation considérable des problèmes de pollution et d’accès aux ressources. C. F. Une prise en compte progressive L’éveil des consciences des problèmes environnementaux aux questions environnementales La première prise de conscience des problèmes envi- Jusque dans les années 1960, la place de l’environ- ronnementaux se développe au cours des années 1970 nement dans le débat public est restée mineure dans et 1980 avec la succession de catastrophes industrielles la très grande majorité des économies développées et leur médiatisation à l’échelle planétaire. et inexistante dans les pays en développement. Les années 1970 ont constitué un premier tournant et mar- L’un des premiers incidents graves est celui de qué un début de prise de conscience. L’émergence des la baie de Minamata au Japon. Au milieu des années grands problèmes environnementaux planétaires dans 1950, une mystérieuse maladie affecte les animaux; les années 1980 a ancré ces questions parmi les prin- des chats deviennent fous et se suicident en se jetant cipaux défis que les économies vont devoir surmonter dans la baie tandis que des oiseaux se laissent tomber. dans les décennies à venir, sans distinction de niveau Ces premières manifestations sont suivies par l’hos- de richesse. pitalisation de personnes, de plus en plus nombreuses 2 Cahiers français n° 374 609130030int.pdf - Mars 29, 2013 - 3 sur 96 - BAT DILA Dossier - un état Des lieux Des Dommages et Des risques environnementaux (essentiellement des pêcheurs et des membres de leur famille), souffrant de troubles neurologiques, sensoriels et moteurs. Ce n’est qu’à la fin de la décennie que la cause de ces troubles énigmatiques est découverte: une pollution au mercure dont la contamination se fait par la consommation de poissons. Depuis 1932, une usine pétrochimique rejetait du mercure dans la baie. Ces déversements continueront jusqu’en 1966 et aboutiront à un bilan officiel de 13000 victimes dont 900 décès. La deuxième grande catastrophe est celle de Seveso: le 10 juillet 1976, un accident survient dans une usine chimique produisant des herbicides dans le Nord de l’Italie. Cet accident ne fera pas de victime directe mais de nombreux blessés par brûlure de la peau. Les dommages sont importants au niveau du bétail situé à les consciences à la question environnementale. Mais proximité et des bâtiments et maisons environnantes cet accident marque un tournant en raison de l’ampleur qui doivent être rasés ou décontaminés. du désastre et de ses conséquences internationales. Il survient à un moment où émergent de nouveaux grands Dans la nuit du 2 au 3 décembre 1984, c’est une problèmes environnementaux qui concernent cette fois- explosion dans l’usine de pesticides Union Carbide de ci l’ensemble de la planète et ont potentiellement des Bhopal (Inde) qui répand un nuage toxique sur des zones conséquences humaines, écologiques et économiques très peuplées et entraîne directement ou indirectement d’une ampleur sans équivalent jusqu’à présent. la mort de plusieurs milliers de personnes(1). L’émergence des problèmes À cette liste des catastrophes industrielles les plus environnementaux planétaires retentissantes s’est ajoutée la succession des marées noires provenant de naufrages de pétroliers ou d’explo- À partir des années 1980, de nouveaux problèmes sions sur des plateformes pétrolières, qui ont contribué environnementaux surgissent. Le grand public, après les à la montée des préoccupations environnementales dans experts, devient de plus en plus sensible à ces nouveaux l’opinion publique. risques et leur reconnaissance institutionnelle durant les années 1980 et 1990 va les transformer en autant Jusque dans les années 1980, les risques environ- de grands défis que tous les pays se doivent de relever. nementaux se résument pour l’essentiel à des risques Le risque climatique qui résulte de l’augmentation, technologiques et des pollutions localisées dans d’origine anthropique, de la concentration de gaz à l’espace et dans le temps. L’enjeu des politiques envi- effet de serre (GES) dans l’atmosphère en est sans ronnementales est alors d’encadrer, d’accompagner le aucun doute le plus emblématique. développement industriel et économique de manière à limiter les risques au maximum. Ce n’est pas tant Ces nouveaux problèmes sont caractérisés par au le développement industriel, que le non-respect de moins trois évolutions majeures par rapport aux risques certaines normes de sécurité, qui est la cause de ces technologiques locaux évoqués précédemment. accidents. Ainsi, la catastrophe de Seveso a conduit à Des biens publics mondiaux la directive européenne du même nom qui impose à tous les États membres d’identifier les sites industriels Tout d’abord, ils prennent la forme d’externalités présentant des risques d’accidents majeurs et de prendre négatives multilatérales publiques qui ont toutes les les mesures nécessaires pour y faire face. caractéristiques d’un mal (bien) public global. Leur dimension planétaire implique une coopération entre L’explosion du réacteur no 4 de la centrale nucléaire de États qui fait généralement défaut, ce qui explique Tchernobyl en Ukraine le 26 avril 1986 peut être rangée qu’ils se révèlent si difficiles à gérer. Depuis le traité dans cette liste des catastrophes industrielles qui ont éveillé de Westphalie en 1648, seuls des États consentants peuvent se voir imposer des obligations internationales. (1) Le dernier bilan officiel des autorités indiennes s’élève à plus Ainsi, les États-Unis ne peuvent pas être contraints, de 7500 décès et environ 300000 personnes intoxiquées et blessées. Cahiers français n° 374 3 609130030int.pdf - Mars 29, 2013 - 4 sur 96 - BAT DILA Dossier - un état Des lieux Des Dommages et Des risques environnementaux par une autre institution, à réduire leurs émissions de Les solutions adoptées GES, fût-elle internationale. La forte asymétrie entre au niveau international les coûts et les bénéfices supportés par les différentes Pour permettre l’émergence de ce nécessaire consen- nations empêche généralement de trouver un accord sus mondial, la solution proposée pour le changement international qui convienne à tous. climatique et qui s’est révélée efficace a été la mise en Une remise en cause du développement économique place en 1988 du Groupe d’experts intergouvernemen- tal sur l’évolution du climat (GIEC) sous l’égide du Ensuite, ils entraînent une transformation majeure Programme des Nations unies pour l’Environnement dans la perception de la relation entre qualité de (PNUE) et de l’Organisation météorologique mon- l’environnement et développement économique. Les diale. Composé de scientifiques et d’experts reconnus catastrophes industrielles ne remettaient pas en cause sur la question, le GIEC évalue les informations et la vision partagée des bienfaits de l’expansion éco- études scientifiques disponibles sur le changement nomique.À partir des années 1980, un dilemme se climatique, apprécie les conséquences écologiques et manifeste entre la poursuite de la croissance écono- socio-économiques de ce changement et formule des mique dans les mêmes conditions et la protection de recommandations aussi bien pour atténuer ce proces- l’environnement(2). De cette transformation va naître sus que pour s’y adapter. Les quatre rapports qui ont le concept de développement durable. L’objectif est émané de ses travaux ont fortement contribué à la dorénavant de concilier développement économique reconnaissance consensuelle de l’origine anthropique et social et préservation de l’environnement. du réchauffement climatique, de l’importance de ses Des dommages d’une ampleur inédite impacts négatifs et de la nécessité de mettre au plus vite en place des politiques. Ce succès a abouti à la Enfin, les catastrophes industrielles mentionnées création en avril 2012, toujours sous l’égide du PNUE, précédemment, comme les marées noires, ont causé d’un «GIEC biodiversité» dénommé «Plateforme des dégâts considérables sur les écosystèmes locaux intergouvernementale scientifique et politique sur la et au niveau humain pour certaines d’entre elles. Mais biodiversité et les services écosystémiques (IPBES)». ils sont sans commune mesure avec les dommages écologiques, humains et économiques qui peuvent Malgré ces avancés, on ne peut que constater la résulter de ces nouveaux risques planétaires. relative paralysie actuelle dans les négociations inter- nationales sur le changement climatique. Cependant, Une incertitude multiple elle ne doit pas occulter la réussite d’un autre accord Ces nouveaux risques possèdent une quatrième international, le protocole de Montréal de 1987, qui caractéristique, qui est, elle, en partie commune avec les a permis de réduire quasiment à néant la production risques technologiques: une forte incertitude. Celle-ci et l’utilisation de la plupart des gaz appauvrissant la est d’ailleurs multiple et porte aussi bien sur les ori- couche d’ozone(3). Néanmoins, le déséquilibre dans la gines et les causes des problèmes que sur leurs divers couche d’ozone provoqué par ces gaz va continuer à impacts environnementaux, sur la santé des individus se faire sentir durant les cinquante prochaines années. ou encore sur l’évaluation économique des dommages En effet, même s’ils ne sont plus consommés, plus de causés et anticipés. 50% des CFC émis dans le passé n’ont pas encore atteint la couche d’ozone. Il en résulte une grande difficulté à établir un consen- sus et une prise de conscience solide des enjeux, autant Il en va de même pour les émissions à l’origine des de conditions nécessaires (mais souvent insuffisantes) dépôts acides. Ils ont fait l’objet d’une série d’accords et pour que les politiques environnementales soient accep- de protocoles internationaux depuis 1985, qui ont provo- tées. Comment faire supporter aux citoyens des coûts qué une diminution sensible des émissions, à des niveaux élevés aujourd’hui pour éviter des dégradations envi- proches des objectifs fixés. En 2006, les émissions de ronnementales plus ou moins lointaines dans le temps SO de l’ensemble des pays membres de l’OCDE avaient x et, qui plus est, incertaines? déjà diminué de plus de 50% par rapport à leur niveau de 1990. La baisse des émissions de NO est moins x (2) Au début des années 1970, le rapport Meadows commandé par le Club de Rome avait déjà posé ce dilemme, en insistant plutôt (3) Sur les négociations internationnales autour de l’environne- sur l’épuisement des ressources naturelles. ment, voir dans ce même numéro l’article de F.-D. Vivien, p. 28. 4 Cahiers français n° 374 609130030int.pdf - Mars 29, 2013 - 5 sur 96 - BAT DILA Dossier - un état Des lieux Des Dommages et Des risques environnementaux prononcée (environ 25%) mais confirme le découplage versité, sur les ressources disponibles en eau douce et entre activité économique et quantités rejetées. sur la pollution de l’air. De même, la biodiversité et les services écosystémiques sont étroitement associés aux Si les évolutions constatées et anticipées vont dans ressources en eau, etc. L’évolution de l’un d’entre eux le bon sens pour ces deux formes de pollution plané- est donc intimement liée à l’évolution des trois autres. taires, considérées comme les problèmes majeurs dans les années 1980-1990, il n’en est pas de même pour le Le changement climatique changement climatique et la perte de biodiversité, qui Depuis les années 1970, les émissions mondiales restent deux des principaux défis environnementaux de GES(7) ont été multipliées par deux sous l’effet de la des prochaines décennies au niveau mondial. croissance économique et de la forte augmentation de la consommation d’énergies fossiles par les pays émergents Les grands défis environnementaux et en développement. À politiques environnementales du XXIe siècle inchangées, c’est-à-dire sans nouvelle mesure par rap- port à celles mises en place aujourd’hui, les émissions Dans le champ de l’environnement, quatre grands devraient à nouveau doubler d’ici 2050. Cette hausse défis mondiaux devront être relevés durant le XXIe sensible résultera essentiellement de l’augmentation siècle: le changement climatique, l’appauvrissement de prévue de la consommation d’énergie mondiale, qui la biodiversité, les pressions accrues sur les ressources devrait se situer aux alentours de 80%, répondant à la disponibles en eau douce et les répercussions sur la santé forte croissance économique de grands pays émergents de certains polluants (essentiellement la pollution de (Chine, Inde, Brésil, Indonésie, Afrique du Sud). l’air et l’exposition aux produits chimiques dangereux). La concentration atmosphérique atteindrait alors Plusieurs institutions, nationales et internationales, 685 parties par million équivalent CO (ppm éq-CO ) 2 2 effectuent plus ou moins régulièrement des projections en 2050, contre 438 en 2008 et environ 280 avant l’ère sur l’évolution de ces problèmes, qui permettent aux industrielle. La projection de l’OCDE table même décideurs plublics comme à l’opinion publique d’en sur un niveau de concentration qui dépasse les 1000 cerner l’ampleur et d’évaluer leurs impacts écologiques ppm eq-CO à l’horizon de la fin du XXIe siècle. Lors 2 et socio-économiques potentiels. Le GIEC actualise tous de la conférence de Cancun en 2010, un accord a été les cinq à six ans, lors de la parution de son rapport, conclu pour fixer comme objectif une concentration ses projections d’émissions mondiales de GES(4) et maximale de 450 ppm eq-CO . Reprenant les travaux 2 les impacts attendus. De même, le secrétariat de la du GIEC, cet objectif de concentration correspond à Convention sur la diversité biologique effectue des une limitation de la hausse de la température moyenne projections sur les changements de la biodiversité et des mondiale à environ 2° C par rapport à son niveau pré- services écosystémiques à l’horizon du XXIe siècle(5). industriel(8). Les niveaux de concentration projetés par l’OCDE à l’horizon 2050 et 2100 correspondent, Les données présentées ici sont reprises des pro- respectivement, à des hausses de la température de jections de l’OCDE(6). Elles ont l’avantage de se situer 2,0-2,8° C et 3,5-5,6° C. dans la fourchette des projections réalisées par les autres organismes plus spécialisés et d’être fondées sur un cadre Les impacts naturels et économiques, déjà à l’œuvre unique d’hypothèses cohérentes. En effet, il existe des avec l’augmentation constatée de la température mondiale interactions très fortes entre ces quatre grands problèmes moyenne, devraient fortement s’intensifier avec ces élé- environnementaux. L’évolution anticipée du changement vations. Leur liste est longue et diffère d’une région du climatique a des répercussions importantes sur la biodi- monde à l’autre: multiplication de certains événements (7) Six gaz sont responsables de l’essentiel du réchauffement, (4) Le quatrième rapport d’évaluation du GIEC, intitulé Chan- parmi ceux-ci trois constituent à eux seuls 98% des émissions gements climatiques 2007, est paru en novembre 2007. Le cin- totales: le dioxyde de carbone (CO), le méthane (CH) et le pro- quième rapport doit paraître en 2014. toxyde d’azote (NO). Les émissions2 de CO qui représ4entent 75% 2 2, (5) La troisième édition, Perspectives mondiales de la biodiver- des émissions totales, proviennent pour l’essentiel de la consomma- sité – 3, est sortie en mai 2010. tion d’énergies fossiles dans le secteur énergétique, le résidentiel et (6) OCDE (2012), Perspectives de l’environnement de les transports. l’OCDE à l’horizon 2050: les conséquences de l’inaction, Paris, (8) La température mondiale moyenne dépasse déjà aujourd’hui OCDE. son niveau d’avant l’ère industrielle d’environ 0,8° C. Cahiers français n° 374 5 609130030int.pdf - Mars 29, 2013 - 6 sur 96 - BAT DILA Dossier - un état Des lieux Des Dommages et Des risques environnementaux Schéma 1. Impacts du réchauffement climatique en fonction de l’accroissement de température Changement de température moyenne planéaire par rapport à 1980-1999 (°C) 0 1 2 3 4 5+C Disponibilité d’eau accrue sous tropiques humides et hautes latitudes Disponibilité d’eau réduite et accroissement des sécheresses dans les moyennes EAU et basses latitudes semi-arides Centaines de millions de personnes exposées à plus de stress hydrique Jusqu’à 30 % d’espèces Larges* extinctions ont un risque d’extinction accru à l’échelle mondiale Blanchiment accru Majorité des coraux Mortalité étendue du corail du corail blanchis ÉCOSYSTÈME Préservation de la biosphère terrestre vers une source nette de carbone : - 15 % - 40 % des écosystèmes affectés Accroissement des déplacements Chargement dans les écosystèmes suite à l’affaiblissement d’espèces et feux de forêts de la circulation thermohaline Impacts négatifs complexes et localisés sur les petits propriétaires Agriculteurs de subsistance et pêcheurs ALIMENTATION Productivité céréalière tend Productivité de toutes les céréales à décroître dans les basses latitudes décroît dans les basses latitudes Productivité de certaines céréales tend Productivité céréalière décroissante à croître aux moyennes et hautes latitudes dans certaines régions Dommages accrus suite aux inondations et tempêtes Agriculteurs de subsistance et pêcheurs** Perte globale d’environ 30 % des zones côtières COTES humides** Des millions de personnes supplémentaires pourraient subir une inondation chaque année Poids accru de la malnutrition, diarrhées, maladies infectieuses et cardio-respiratoires Mortalité et morbidité accrues suite aux vagues de chaleur, inondations et sécheresses SANTÉ Changements de distribution de certains vecteurs de maladies Charge considérable des services de santé 0 1 2 3 4 5+C * large, correspond ici à plus de 40 %. ** sur la base d’une élévation moyenne du niveau de la mer de 42 mm/an de 2000 à 2080. Source : GIEC (2007), « Bilan 2007 des changements climatiques : conséquences, adaptation et vulnérabilité », contribution du Groupe de travail II au 4e rapport, Cambridge University Press. météorologiques extrêmes (canicule, ouragan, inonda- réalisée dans le Rapport Stern (9). Selon les travaux de cet tions …) ; bouleversement de nombreux écosystèmes, économiste, le coût de politiques efficaces conduisant à avec la disparition de plus de 40 % des espèces pour la stabilisation de la concentration de GES à 550 ppm un réchauffement supérieur à 4° C ; crises liées aux eq-CO d’ici 2050 (soit une augmentation d’environ 3° C 2 ressources alimentaires ; élévation du niveau de la mer de la température) s’élèverait à une perte annuelle et pour qui devrait provoquer l’inondation de certaines zones toujours d’environ 1 % du PIB mondial. Le coût annuel côtières (notamment les deltas en Asie et en Afrique) bou- de l’inaction, qui dans le rapport correspond à un scénario leversant ainsi l’activité économique des pays concernés où le réchauffement est compris entre 3,9° C et 4,3° C, et entraînant d’importants flux migratoires ; enfin, des atteindrait quant à lui de 5 % à 20 % du PIB mondial. impacts également importants sur la santé (cf. schéma). Les travaux du GIEC ont permis l’émergence d’un (9) Étude sur l’impact économique du changement climatique consensus international sur la nécessité et l’urgence d’agir. réalisée en 2006 par l’ancien économiste en chef de la Banque Celui-ci a été renforcé par les résultats de l’évaluation des mondiale, Sir Nicholas Stern, à la demande du ministère des Fi- nances britannique. Stern N. (2007), Stern Review on The Econo- conséquences économiques du réchauffement climatique mics of Climate Change, HM Treasury. 6 Cahiers français n° 374 609130030int.pdf - Mars 29, 2013 - 7 sur 96 - BAT DILA Dossier - un état Des lieux Des Dommages et Des risques environnementaux Il y a un consensus aujourd’hui, y compris parmi les Peu de mesures malgré les engagements internationaux experts qui considèrent que le rapport Stern surévalue les Malgré les engagements pris par les gouvernements, coûts(10), autour de la nécessité de lutter activement et dès 2002, «d’assurer, d’ici 2010, une forte réduction du rapidement contre le changement climatique et de mettre rythme actuel de perte de diversité biologique aux niveaux simultanément en place des politiques d’adaptation aux mondial, régional et national»(14), l’appauvrissement de hausses de température qui se produiront de toute façon. la biodiversité s’est poursuivi à un rythme soutenu et La biodiversité continuera dans les années à venir si aucune mesure forte n’est effectivement mise en œuvre. L’abondance moyenne Des enjeux écologiques et économiques considérables des espèces terrestres (AME) – l’un des 17 indicateurs La biodiversité dans son acception large, telle qu’elle adoptés par la CDB pour mesurer et surveiller la situation est définie dans la Convention sur la diversité biolo- de la diversité biologique – a diminué de 11% entre gique (CDB), représente «la variabilité des organismes 1970 et 2010. Les projections de l’OCDE en l’absence vivants de toute origine y compris, entre autres, les de nouvelles mesures des pouvoirs publics conduisent écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes à une nouvelle baisse de 10% entre 2010 et 2050. La aquatiques et les complexes écologiques dont ils font majeure partie de cet appauvrissement devrait se faire partie; cela comprend la diversité au sein des espèces et avant 2030. Il sera particulièrement marqué au Japon et entre les espèces ainsi que celle des écosystèmes». La en Corée (36%), en Europe (24%) et en Afrique australe biodiversité fournit aux individus et au milieu naturel (20%). Les projections réalisées pour les Perspectives des services essentiels à la vie tant au niveau local, que mondiales de la diversité biologique-3 ne sont guères national ou international. plus optimistes et confirment cette tendance pour les autres écosystèmes (pas seulement terrestres). Le constat Un des enjeux actuels pour les économistes est pré- est sans appel: «les projections concernant l’impact cisément de fournir une valorisation monétaire(11) de ces des changements mondiaux sur la diversité biologique services rendus par la biodiversité. À titre d’exemple, la indiquent une poursuite et souvent une accélération des valeur nette des récifs coralliens (pêcheries, protection extinctions d’espèces, des pertes d’habitats naturels et des côtes, tourisme…) a été évaluée à 30 milliards de des changements dans la répartition et l’abondance des dollars par an(12). Les services de pollinisation assurés espèces, des groupes d’espèces et des biomes pendant par certains insectes ont quant à eux été évalués au niveau tout le XXIesiècle». mondial à 192 milliards de dollars pour la seule année 2005(13). Les pertes liées au déboisement et à la dégra- Devant l’urgence de la situation, un nouveau pro- dation des forêts sont pour leur part estimées entre 2000 gramme de mesures en faveur de la biodiversité à et 4500 milliards de dollars par an. Elles pourraient être l’horizon 2020 a été adopté en 2010 à la Xe conférence évitées en investissant environ 4,5 milliards de dollars. des parties à la CDB qui s’est tenue à Nagoya au Japon. Les premiers progrès constatés dans l’adoption de ces La préservation de la biodiversité et des services mesures par un certain nombre de pays laissent espérer écosystémiques représente donc un enjeu considérable, qu’elles auront plus de succès que les engagements tant du point de vue écologique que du point de vue pris en 2002. économique. Mais, quelle que soit l’étendue de ces progrès, la préservation de la biodiversité passera nécessairement (10) Deux économistes, Richard Tol et William Nordhaus, ont par le succès des politiques de lutte contre le change- particulièrement critiqué la méthodologie employée dans le rap- port Stern, qui conduit selon eux à une surestimation des coûts de ment climatique. Dans les projections de l’OCDE, il l’inaction. Tol R. (2006), The Stern Review of the Economics of serait responsable d’un peu plus de 40% de la perte Climate Change : A Comment, Miméo; Nordhaus W. (2007), “A supplémentaire d’abondance moyenne des espèces review of the Stern Review on the Economics of Climate Change”, Journal of Economic Literature, vol. 45, n° 3. entre 2010 et 2050. (11) Qui intègre à la fois les valeurs d’usage et de non usage. (12) PNUE (2007), GEO-4: l’environnement pour le dévelop- pement, Nairobi, PNUE. (13) Gallai N., Salles J.-M., Settelle J., Vaissière B. E. (2009),” Economic Valuation of the Vulnerability of World Agriculture (14) Sixième réunion de la Conférence des Parties à la Confronted with Pollinator Decline”, Ecological economics, vol. Convention sur la diversité biologique, qui s’est tenue en avril 68 , n° 3. 2002 à La Haye. Cahiers français n° 374 7 609130030int.pdf - Mars 29, 2013 - 8 sur 96 - BAT DILA Dossier - un état Des lieux Des Dommages et Des risques environnementaux Les ressources en eau douce Pollutions et santé Il est inutile de développer les arguments pour se À cette dégradation de la qualité de l’eau vont venir convaincre que l’accès à une eau propre est vital pour un s’ajouter d’autres formes de pollutions qui exerceront grand nombre d’espèces, y compris l’espèce humaine. dans les décennies à venir des pressions importantes Or, dans un nombre croissant de régions du monde, sur la santé humaine, en particulier sur celle des plus l’eau n’est plus fournie en quantité et/ou en qualité fragiles, à savoir les personnes âgées et les enfants. On suffisantes. En 2000, 1,6 milliard d’habitants étaient peut citer, parmi les plus importantes, les pollutions localisés dans des bassins hydrographiques soumis à de l’air en zone urbaine et l’exposition aux produits un fort stress hydrique(15). Là aussi, les projections à chimiques dangereux. l’horizon 2050 ne sont guère optimistes et vont faire Toujours à politiques inchangées, les projections de la disponibilité en eau douce l’un des grands enjeux de l’OCDE à l’horizon 2050 s’accompagnent d’une environnementaux du XXIe siècle. En effet, selon les dégradation de la qualité de l’air en milieu urbain qui projections de l’OCDE, le nombre d’habitants concernés devrait devenir la première cause dans le monde de par le stress hydrique devrait grimper à 3,9 milliards en décès liés à l’environnement (environ 4,3 millions de 2050, soit 40% de la population mondiale à cet horizon. décès prématurés en 2050 contre moins de 1,8 million La quasi-totalité de la population du Moyen-Orient et de en 2010). Les polluants les plus néfastes dans cette l’Asie du Sud et une partie importante de la population catégorie sont les particules en suspension dans l’air(17) chinoise et de l’Afrique du Nord seront confrontées à (qui seraient responsables de plus de 3,6 millions de des stress hydriques élevés. Cette situation sensible- décès prématurés en 2050, contre moins de 1,5 million ment dégradée est expliquée essentiellement par une en 2010) et l’ozone troposphérique (les plus fortes augmentation de la demande mondiale d’eau estimée concentrations d’ozone d’ici 2050 devraient entraîner à 55% entre 2000 et 2050, qui provient des activités une augmentation des décès prématurés passant d’envi- manufacturière (+ 400%), de la production d’électri- ron 0,3 million en 2010 à plus de 0,7 million en 2050). cité (+ 140%) et des usages domestiques (+ 130%). La Chine et l’Inde seront particulièrement affectées par Cette forte augmentation des besoins va entraîner une la hausse des particules en suspension et d’ozone en concurrence accrue (et dans certains cas des conflits milieu urbain. Ces polluants atmosphériques d’origine entre nations) entre les villes, les agriculteurs, les indus- anthropique proviennent essentiellement de l’activité triels, les fournisseurs d’énergie et les écosystèmes. La industrielle et des rejets liés aux transports routiers. qualité de l’eau devrait aussi être fortement affectée par l’eutrophisation(16), l’acidification, les contaminations Le nombre de décès prématurés liés aux autres toxiques et les micropolluants (médicaments, cosmé- causes environnementales (insalubrité et défaut d’as- tiques, produits de nettoyage et résidus de biocides). sainissement de l’eau, pollution de l’air intérieur) Sa dégradation aura des impacts négatifs sur la santé diminuera sur la même période. humaine, l’irrigation et les écosystèmes aquatiques. On Toutes les substances chimiques ne sont pas dan- estime que cette dégradation constatée a déjà réduit la gereuses pour la santé, mais certaines d’entre elles biodiversité d’environ 1/3 dans les cours d’eau, les lacs peuvent se révéler particulièrement nocives (les PBT, les et les zones humides (les pertes les plus importantes se vPvB et les POP). L’Organisation mondiale de la Santé situant en Chine, en Europe et au Japon). De même, (OMS) a estimé en 2004 le nombre de décès imputables d’ici 2050, l’eutrophisation devrait toucher 20% de à l’exposition à une catégorie pourtant retreinte de ces lacs supplémentaires par rapport à 2000 et bouleverser produits chimiques à plus d’un million, soit plus que leurs écosystèmes. les décès prématurés dus à l’ozone en 2010. Avec une progression annuelle des ventes de la chimie mondiale estimée par l’OCDE à environ 3% jusqu’en 2050, on peut craindre que la morbidité mondiale imputée à (15) L’OCDE parle de fort stress hydrique quand le ratio des ces substances ne continue de croître. Ces évolutions prélèvements d’eau annuels divisé par les disponibilités en eau annuelles excède 40%. (16) L’eutrophisation résulte d’un apport en excès de subs- tances nutritives (nitrates et phosphates) dans un milieu aqua- (17) En particulier les plus petites d’entre elles car elles pé- tique entraînant la prolifération de végétaux aquatiques (parfois nètrent plus profondément les poumons, les PM (particules infé- 10 toxiques). rieures à 10 micromètres) et PM (inférieures à 2,5 micromètres). 2.5 8 Cahiers français n° 374