Copyright © 2015 Éditions Vie et Santé 60, avenue Émile Zola 77190 Dammarie-les-Lys, France www.viesante.com Tous droits de reproduction totale ou partielle et de traduction réservés. ISBN (Livre) : 978-2-85743-442-9 ISBN (eBooks) : 978-2-85743-443-6 Mise en page et corrections : IS Edition Illustration de couverture : Editions Vie et Santé L'auteur assume toute la responsabilité pour l’exactitude de tous les faits et des citations exposés dans le livre. Sauf indication contraire, toutes les références bibliques sont tirées de la Nouvelle Bible Segond. Richard LEHMANN APOCALYPSE DE JEAN TOME IV Entre les monstres et les anges Le choix ultime de l’humanité Chapitres 11.19-15.4 DU MÊME AUTEUR Épître à Philémon, le christianisme primitif et l’esclavage, Genève, Labor et Fides, 1978. Les Adventistes du septième jour, Turnhout, Brepols, 1987. Vivre dans l’espérance, Dammarie-les-Lys, Vie et Santé, 1995. L’Apocalypse de Jean, tome I, ch. 1-3, Collonges-sous Salève, Faculté adventiste de théologie, 1995. L’Apocalypse de Jean, tome II, ch. 4-8.1, Collonges-sous-Salève, FAT, 2000. La foi de Moïse, Dammarie-les-Lys, Vie et Santé, 2003. Le retour du Christ, manuel de théologie adventiste, tome 24, Collonges-sous-Salève, FAT, 2006. Vérités pour aujourd’hui de la bienheureuse espérance, Dammarie- les-Lys, Vie et Santé, 2010. L’Apocalypse de Jean, tome III, ch. 8.2-11.18, Collonges-sous-Salève, FAT, 2011. L’Église du reste, mythe ou réalité ?, Dammarie-les-Lys, Vie et Santé, 2014. Maranatha, Dammarie-les-Lys, Vie et Santé, 2014. 4 INTRODUCTION La première moitié du livre de l’Apocalypse (1-11) nous avait habitués à un découpage, facile à repérer, de trois séquences comportant chacune sept éléments : les lettres aux sept Églises, les sept sceaux et les sept sonneries de trompette. Chaque section commençait par une vision introductrice en référence au mobilier du sanctuaire : le chandelier pour les lettres aux Églises (1.13), le trône-table pour la série des sept sceaux (4.2), et l’autel des parfums pour la série de sept trompettes (8.3). Ces éléments se trouvent dans la première pièce du sanctuaire israélite, appelée le lieu saint, et sont l’objet d’un service quotidien. En raison du caractère continu et permanent de ce service, nous avions conclu que chacune des séquences s’inscrivait dans le déroulement de l’histoire, plus précisément de l’histoire de l’Église1. La seconde moitié du livre (12-22) offre une nouvelle tonalité. Deux notions s’y déploient alors qu’elles n’étaient qu’attendues ou annoncées dans la première partie. La première notion est celle de la colère. Elle n’est mentionnée que deux fois dans la première partie du livre, et dans un cadre eschatologique. Ainsi, le sixième sceau (6.16) annonce la colère de Dieu et de l’Agneau, un jour de colère (6.17) venant mettre fin aux agissements des méchants. On retrouve la mention de la colère 1. Voir Richard Lehmann, Apocalypse de Jean, tome III, Dammarie-les-Lys, Vie et Santé, 2011, p. 13-15. 5 à la fin de la sonnerie de la septième trompette (11.18). Dans notre analyse des sceaux et des trompettes, nous avions considéré que chacune des séries couvrait l’histoire de l’Église. Nous ne sommes donc pas surpris de trouver la mention de la colère divine à la fin de chacune d’entre elles. La dernière référence mérite une mention particulière. En effet, elle s’inscrit dans une requête adressée à Dieu par les vingt-quatre anciens. Les nations s’étant irritées (orgizomai), le temps est venu pour Dieu de répondre à leur emportement en manifestant sa propre colère (orgê). Ce verset joue donc un double rôle. D’une part, il achève la série des trompettes, et d’autre part, il annonce la suite2. Or, la suite confronte la colère du diable (12.12), du dragon (12.17) et la fureur (thymos) de la prostitution de Babylone (14.8 ; 18.3) à la colère et à la fureur de Dieu (14.10,19 ; 15.1,7 ; 16.1,19 ; 19.15), colère à laquelle nul ne résiste, car c’est celle du Tout-Puissant (19.15). La colère de Dieu est vindicative. Elle a pour objet de venger les saints, victimes du dragon et de Babylone qui s’est enivrée de leur sang (17.6), et de récompenser les serviteurs de Dieu (11.18). On ne sera donc pas surpris de voir développée, dans la seconde partie du livre, une seconde notion, celle du jugement. Le verbe juger, lui aussi, n’a été employé dans la première partie que deux fois. Chaque fois aussi sous la forme d’une requête. Les martyrs demandent que vengeance soit faite (6.10) et les vingt-quatre anciens associent le jour de la colère à celui du jugement (11.18). Dans la seconde partie du livre, ce thème est largement développé. Le monde est averti de la venue du jugement (14.7) et dans la séquence qui nous retient, le jugement prend forme de moisson et de vendange (14.14-20). Dans le reste du livre le jugement frappe le monde (16.5), la grande prostituée (17.1), Babylone (18.8,10,20 ; 19.2), la bête et le faux prophète 2. Ce modèle était déjà présent à la fin de la lettre à Laodicée. Ap 3.21 clôt la série des lettres, et en mentionnant le trône de Dieu, annonce la vision du trône du chapitre suivant. Ce procédé littéraire est fréquent dans l’épître aux Hébreux où, par exemple, He 2.17-18 achève la première partie du livre et annonce la seconde, sur le thème du Christ grand-prêtre. Voir Albert Vanhoye, Le message de l’épître aux Hébreux, Cahiers Évangile 58, Nouvelle série 19, février 1977. 6 (19.11), les morts (20.4,12,13), le diable (20.10), la mort et le séjour des morts (20.14). La seconde dimension du jugement sera d’accorder le salut aux fidèles serviteurs (22.1-22.14). La nouvelle séquence est introduite par une vision de l’Arche de l’Alliance dans le lieu très saint (11.19) qu'est le second appartement du sanctuaire. C’est dans ce lieu, qu’une fois par an, le souverain sacrificateur entrait pour obtenir le pardon des péchés du peuple (Lv 16 et 23). C’était à la fois un jour de grâce (16.30) et un jour de jugement. Quiconque ne s’humiliait pas en ce jour devait être exclu de la communauté (Lv 23.29). Comme les autres séquences, celle-ci comporte en finale un jugement eschatologique. Elle est formée de sept ou huit tableaux, selon le découpage que l’on veut en faire : (1) Le dragon et la femme (12.1-6 ; 13-18) ; (2) Michel et le dragon (12.7-12) ; (3) le monstre marin (13.1- 10) ; (4) le monstre terrestre (13.11-18) ; (5) les 144 000 (14.1-5) ; (6) les messages des trois anges (14.6-13) ; (7) la moisson et la vendange (14.14-20) ; (8) la foule des rachetés (15.2-4). Nous étudierons donc séparément chacun de ces tableaux tant dans leur contenu que dans leur rapport les uns avec les autres. Quatre tableaux soulignent l’œuvre du mal, quatre celle de Dieu. Trois anges appellent à la conversion ; trois anges appellent à l’exécution de la sentence. Nous ne nous situons plus dans le cadre du service quotidien, mais dans celui du service annuel. L’accent se porte donc sur les événements de la fin, même si des éléments historiques sont évoqués pour en donner le sens. Comme le dit Pierre Prigent, jusque là, « presque rien ne nous avait été dit sur l’origine de l’irréductible hostilité qui dresse les habitants de la terre contre les chrétiens »3. Les quatre premiers tableaux ont pour objet de mettre en évidence la nature des puissances qui sont à l’œuvre pour contrecarrer l’œuvre de Dieu. Les trois tableaux 3. L’Apocalypse de Saint Jean, édition revue et augmentée, Commentaire du Nouveau Testament XIV, Genève, Labor et Fides, 2000, p. 283. 7 suivants montrent comment Dieu agit à l’encontre de ces puissances et en faveur de ses fidèles. 8 APOCALYPSE 12 Le chapitre 12 nous introduit dans le grand conflit entre Dieu et Satan. Un conflit qui trouve sa source dans le ciel, bien avant donc les origines de la terre, et qui porte sur l’adoration de Dieu. L’attention est portée particulièrement sur les adorateurs qui ont le choix entre Dieu et l’Agneau ou Satan et ses acolytes. Les chapitre 12 et 13 nous révèlent l’action de Satan, les chapitres 14 et 15 celle de Dieu. Premier tableau : le dragon et la femme. Conflit dans le ciel. Le chapitre 12 présente une structure littéraire que l’on appelle une structure en sandwich. Le conflit entre Michel et le dragon (12.7-12) est inséré à l’intérieur du conflit entre la femme et le dragon (12.1-6 et 12.13-18). Bien que l’acharnement du dragon à l’encontre de la femme occupe la plus grande partie du chapitre, comme dans un sandwich, l’important, c’est ce qui est à l’intérieur. C’est le cœur du chapitre qui éclaire le diptyque qui l’entoure. Nous analyserons donc les deux parties avant d’en chercher la clef dans la partie centrale. 1 Un grand signe apparut dans le ciel : une femme vêtue du soleil, qui avait la lune sous ses pieds et une couronne de douze étoiles 9 sur sa tête. 2 Elle était enceinte et elle criait dans les douleurs et les tourments de l’accouchement.4 Un premier signe attire l’attention de Jean. Le terme de « signe » est pour lui l’équivalent d’un miracle, car les miracles sont à ses yeux porteurs de sens5. Les signes sont mentionnés sept fois dans l’Apocalypse. Trois fois, ce sont des signes célestes (12.1,3 ; 15.1) et quatre fois des signes démoniaques (13.13,14 ; 16.14 ; 19.20). Les signes démoniaques ayant pour but de détourner du vrai Dieu ou de s’opposer à lui, les signes célestes sont à prendre de manière positive, signes de l’action rédemptrice de Dieu. Jean qualifie ce premier signe de « grand », comme bien d’autres aspects de son témoignage. Si on ne peut attribuer trop d’importance à cette valeur en raison de la fréquence de son usage6, on notera cependant qu’il ne l’appose pas à la femme, mais au signe. Le signe est dit grand, non la femme, malgré sa dimension céleste. À l’inverse, quand Jean parle de son contraire, de Babylone, la prostituée, il la qualifie fréquemment de « grande »7. Il est possible que ce soit pour souligner les prétentions de cette dernière, qui proclame sa propre gloire (18.7). Une façon peut-être aussi de souligner la grandeur de la chute qu’elle va connaître quand un ange proclamera : « Elle est tombée, Babylone la Grande » (18.2). Jean voit une femme. Elle n’est pas définie, ne porte pas de nom. Bien qu’elle soit enceinte, elle n’est pas perçue comme une épouse (à la différence de 19.7), mais comme une mère, la mère du Messie. Comme telle, certains ont voulu voir en elle la vierge Marie, la mère de Jésus. 4. Tous les textes cités, sauf mention spéciale, sont extraits de la Nouvelle Bible Segond. 5. Voir par ex. Jn 2.11,18,23 ; Ap 13.13. Ce sont des prodiges dont il faut tirer enseignement. Le livre de l’Apocalypse est lui-même donné pour faire connaître (litt. signifier) à Jean les choses qui doivent arriver bientôt (Ap 1.1). Voir aussi les signes annonciateurs en Mt 24.30 ; Mc 13.24 ; Lc 21.25. 6. Jean emploie l’adjectif megas (grand) 80 fois dans l’Apocalypse, sur 194 dans l’ensemble du Nouveau Testament, soit près de la moitié. 7. Ap 11.8 ; 14.8 ; 16.19 ; 17.1,5 ,18 ; 18.2,10,16,18,19,21 ; 12.2. 10
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